Actualités : LOUISA HANOUNE :
«Risque d’une explosion sociale terrible»


Louisa Hanoune a lancé hier un appel solennel au président de la République pour qu’il use de toutes ses prérogatives afin de stopper la dérive vers laquelle se dirige le pays. «Personne, prévient-elle, ne peut prévoir ou prédire la date où s’opérera la rupture».
Abla Cherif - Alger (Le Soir) - Cette rupture, on s’y achemine pourtant sûrement, soutient la responsable du PT. Son analyse est pessimiste, elle craint pour l’avenir du pays, l’avenir immédiat en raison des processus enclenchés. Des «processus de désertification, de destruction qui mèneront inévitablement l’Algérie vers le chaos, l’abîme» argumente-t-elle. Le front plissé, elle brandit sous le regard des journalistes invités à sa conférence de presse des notes prises lors de la relecture du projet de loi de finances 2017. «Nous sommes terrifiés», dit-elle en dressant une liste exhaustive des augmentations, taxes tous azimuts appelées à être introduites au cours des mois à venir. Avec force détails, elle signale que ces augmentations appliquées à la base (comme celle des carburants par exemple) provoqueront inévitablement un envol des prix dans tous les secteurs, et sur tous les produits. «Nous voyons déjà ce qui se passe dans le Sud où des manifestations ont eu lieu, et se poursuivent pour dénoncer les augmentations des factures d’électricité». Elle cite à ce moment le cas d’un cadre moyen qui s’est récemment présenté au parti pour raconter son calvaire. Le malheureux qui perçoit un salaire de 27 000 DA a reçu une facture d’électricité de 22 000 DA. «Il lui reste 5 000 DA pour faire vivre sa famille». L’exemple est, dit-elle, symptomatique d’une situation de dégradation générale qu’elle impute pas seulement à la chute du prix du baril de pétrole, mais aux conséquences «désastreuses de la mauvaise gestion qui a caractérisé les gouvernants». Dans ce contexte, la grève entamée hier à travers le pays est qualifiée comme étant un moyen légitime, constitutionnel, soutenu par le Parti des travailleurs. Elle intervient comme un facteur d’ordre et de décantation, un facteur de recomposition politique mené par des travailleurs qui refusent d’être les moutons du sacrifice et prouvent au contraire leur éveil et leur conscience des enjeux à venir». «Nous le redisons, martèle-t-elle, la loi de finances 2017 est un programme de destruction de tout lien positif entre le citoyen et l’Etat (…) tout ce qui se passe présage en outre de l’arrivée d’une explosion sociale terrible». Dans ce contexte, elle perçoit la prochaine échéance électorale comme étant un facteur de risque d’aggravation de la crise. «Nous n’avons pas encore inscrit les législatives à l’ordre du jour des débats du parti et nous ne pouvons pas encore le faire car il y a des priorités. Ce qui se passe est très grave et en face, nous observons une politique de terre brûlée, de fuite en avant». Elle incrimine au passage le gouvernement qui tente de recourir à l’endettement extérieur alors que le procédé avait été totalement banni par le président Bouteflika. «Je n’incrimine pas tous les ministres, certains sont très sincères et se battent réellement ». Elle cite la ministre de l’Education, Mme Benghabrit, qui «mène un véritable combat pour réformer le secteur» ainsi que M. Nouri, le ministre du Tourisme qui «se bat lui aussi pour tenter d’apporter du nouveau, d’agir de manière qualitative, mais on leur a réduit le budget, que peuvent-ils faire dans ces conditions ?» Le climat actuel ne permet, selon elle, nullement de se diriger vers des élections. «On entend certains responsables dire que leur parti aura la majorité aux législatives, cela prouve que les garanties nécessaires ne sont pas réunies (…) pire, on constate que le milieu des affaires a investi le monde de la politique, on voit des organisations patronales prendre des décisions politiques, c’est très grave. Cette situation ressemble à celles des élections qui ont eu lieu en Égypte avant la chute du régime Moubarak». Elle a conclu sur un commentaire qui, dit-elle, n’est pas à l’ordre du jour de la conférence. «Nous sommes très inquiets, tous savent aujourd’hui qu’il existe aussi des plans et des coups tordus qui risquent d’engloutir le pays. C’est ce qui nous fait très peur».
A. C.





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