Le Soir Auto : Industrie automobile
Vers un quota pour la production nationale ?
L’incertitude continue de planer sur le secteur
automobile. Décisions, contre-décisions, revirements de dernière minute,
autant d’attitudes qui ne permettent nullement de se projeter ni sur le
court, ni le moyen et encore moins le long terme. Les candidats à
l’investissement dans le cadre du développement d’une industrie
mécanique nationale ne s’y retrouvent plus.
Les dernières déclarations du chef du gouvernement, Abdelamlek Sellal,
lors de la visite du Premier ministre français, viennent remettre une
couche supplémentaire de flou. Il a, en effet, annoncé : «Nous sommes en
train d’analyser la situation de l’industrie automobile et de re-calibrer
nos projets en fonction des besoins du marché algérien ainsi que des
perspectives d’exportation vers le marché africain, sachant que la
Transsaharienne est en phase de finalisation.» Le chef de l’Exécutif
assènera par ailleurs : «Il ne suffit pas de ramener des véhicules en
pièces détachées, de les monter et d’ inonder le marché. Pour quoi faire
?»
La fin du dévoiement ?
Des déclarations lourdes de signification et qui semblent venir sonner
le tocsin à un début de dévoiement de la démarche industrielle nationale
initiée il y a à peine deux ans. Après avoir tempéré les «ardeurs» du
groupe Tahkout, à la suite de la diffusion sur les réseaux sociaux de
photos accablantes de véhicules importés en l’état et l’envoi d’une
commission d’enquête, le Premier ministre revient à la charge en
annonçant une pause pour faire le point sur le chemin parcouru et
reconsidérer les étapes à venir. Plus qu’une simple mise au point, cette
décision s’apparente plus à une refondation de cette démarche
industrielle, voire même un désaveu de l’actuelle stratégie, du reste,
fortement imprégnée par les orientations du ministre de l’Industrie et
des Mines, Abdeslam Bouchouareb.
M. Sellal ne manquera pas alors d’annoncer en filigrane que des
décisions seraient prochainement attendues pour rétablir la locomotive
sur ses rails.
C’est notamment le cas de la reconsidération des capacités de production
des unités d’assemblage en les adaptant aux besoins du marché local et
en imposant aussi une part qui pourrait se situer aux alentours du tiers
de la production, réservée exclusivement à l’exportation vers le marché
africain.
Cela pourrait se traduire sur le terrain par l’établissement de quotas
pour la production nationale à répartir entre les différents opérateurs.
Car si l’on s’en tient aux prévisions des constructeurs déjà installés
ou en voie de l’être, le volume global des véhicules assemblés en
Algérie à l’horizon 2020 atteindrait les 450 000 unités par an.
C’est aussi l’allusion tout aussi significative à l’acte d’assemblage et
le peu d’intérêt qu’il pourrait générer pour l’économie nationale s’il
n’est pas consolidé par une réelle intégration locale. Si les uns y
verront une chiquenaude à l’affaire Tahkout, beaucoup relèveront en
revanche une volonté de réviser les conditions de réalisation d’unités
d’assemblage à travers une probable révision du cahier des charges lié à
l’investissement dans le secteur automobile.
Les approximations du cahier des charges
En effet, dans sa mouture actuelle, ce document se contente presque de
généralités, au détriment des aspects purement techniques et
déterminants, dont l’intégration qui n’est abordé que dans 3 articles
sur les 17. Et autant le cahier des charges établi il y a deux ans pour
la sécurité à bord des véhicules était rigoureux et strict dans son
élaboration, autant celui portant conditions et modalités d’exercice de
l’activité de production et de montage de véhicules brille par son
approximation sur les questions de fond et permet même la
diversification des interprétations. D’où l’incapacité pour la
commission d’enquête dépêchée à l’usine Hyundai de Tiaret par le Premier
ministère de déceler une quelconque infraction par rapport à ce document
constitutif de l’activité d’assemblage. Même en assemblant juste les
roues, TMC reste en conformité avec ce règlement qui précise par
ailleurs dans son article 4 alinéa 5 que l’opérateur s’engage «à lancer
l’opération d’intégration après une durée qui ne peut excéder 2 années
pour les véhicules et une année pour les motocycles, à partir de la
phase d’entrée en exploitation». En outre, l’article 10 précise aussi
que «le taux d’intégration locale doit représenter au moins 40% à la 5e
année du démarrage de production avec l’atteinte du taux minimum de 15%
à la 3e année».
Autant dire une voie royale ouverte pour le contournement «légal» de la
loi sur les quotas à l’importation des véhicules en l’état et à la
surenchère sur les prix durant cette période de grâce, sachant par
ailleurs que le calcul de ce taux peut facilement faire l’objet de
manipulations diverses et en toute impunité.
Certes, le SKD s’avère, en l’état actuel des choses, un passage obligé
en attendant le développement d’une industrie locale de sous-traitance,
mais des garde-fous réglementaires auraient pu préciser le minima dans
la composition des collections de kits à assembler sur site, imposer
plus de rigueur sur le calcul du taux d’intégration et la limitation,
dans une première phase, du nombre de modèles montés et les circonscrire
aux seules entrée et moyenne gammes.
Les concepteurs de ce cahier des charges auraient gagné à s’inspirer des
expériences dans d’autres pays, comme l’Egypte qui regroupe plus de 17
unités d’assemblage et qui a réussi aujourd’hui à atteindre des taux
d’intégration respectables. Pour l’heure, les nombreux clients en quête
de véhicules neufs ainsi que les concessionnaires guettent les nouvelles
sur l’attribution des quotas d’importation des véhicules neufs pour
l’année 2017.
B. B.
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