
Culture : La la Land en projection à la salle el-Mouggar
Ode à un cinéma à réinventer
Après le succès qu’a connu le cycle de projections du
film multi-oscarisé, La la Land de Damien Chazelle, l’Office de la
culture et de l’information a décidé de reconduire sa programmation pour
le mois de mai à la salle El-Mouggar.
Comédie musicale palpitante et diablement rythmée, La la land a
amplement mérité ses six Oscars. A la fois grand public et
artistiquement exigeant, ce film qui met en vedette Ryan Gosling et Emma
Stone, tient en haleine le spectateur grâce à une mise en scène
novatrice et un scénario qui fait la part belle à une double sémantique
nostalgique et engagée contre la marchandisation de l’art.
Le début délirant de cette fiction annonce déjà la couleur : nous sommes
sur une route embouteillée de Los Angeles, où les automobilistes
semblent sortir, le temps d’un délire, de leur train-train étouffant et
entament une chorégraphie fébrile sur le bitume.
Le plan-séquence est étourdissant et la joie de vivre est fortement
contagieuse ! Au milieu de cette foule anonyme, une rencontre, d’abord
agressive, se muera en histoire d’amour entre une serveuse rêvant de
devenir actrice et un pianiste épris de jazz, rêvant de récupérer un
vieux club mythique devenu un bar à tapas.
Entre le star-system ambiant et les tracas de la vie quotidienne, les
deux amoureux finiront par revoir leurs ambitions à la baisse :
Sebastian acceptant de jouer du clavier pour un groupe à succès et Mia
renonçant aux castings et revenant vivre chez ses parents, jusqu’à ce
qu’une lueur d’espoir se présente à eux, mais le début de leur
consécration professionnelle marquera également la fin de leur histoire.
Au-delà de la trame, dont on devine que le scénariste l’a conçue, à
dessein, comme une fable des temps modernes, ce qui fascine dans La la
Land, c’est cette jonction habile entre un discours dénonçant
subtilement les lois mercantiles régissant désormais la plupart des
productions d’Hollywood et une esthétique à la fois naïve et exigeante
qui rend hommage aux classiques et, aussi, à une certaine idée du cinéma
et du spectacle.
Damien Chazelle a réussi à construire une œuvre multiple, où le
cinéphile ainsi que le novice trouvent leur plaisir. Un pari difficile
dont le succès doit beaucoup à la générosité des acteurs, notamment Ryan
Gosling qui joue lui-même au piano les très beaux morceaux de jazz du
film après avoir fait une formation intensive de trois mois, sans
oublier Emma Stone qui se jette à corps perdu dans son rôle et
s’illustre par une interprétation admirable de justesse et de limpidité.
S. H.
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