Corruptions : YEMI OSINBAJO :
«Messieurs du G20, aidez l’Afrique à lutter contre la corruption en
mettant fin à votre propre opacité !»
Dans une tribune publiée dans nombre de médias
internationaux, Yemi Osinbajo, président par intérim du Nigeria, demande
aux Européens de rendre publiques les informations sur les trusts et
sociétés écrans qu’ils abritent. La récente conférence du partenariat
pour l’Afrique — tenue le mois passé, en prévision du sommet du G20 à
Hambourg, en Allemagne — a marqué un tournant historique en se penchant
sur ce que les gouvernements africains et du G20 peuvent faire pour
répondre aux défis économiques et politiques sur l’un des continents les
plus dynamiques au monde.
L’Afrique est, en effet, prête à surmonter les obstacles qui se
présentent à elle tout en coopérant avec des partenaires qui lui ont
souvent promis la prospérité. Derrière les pupitres et lors des débats,
le G20 et les dirigeants africains ont manifesté de sérieux engagements
en la matière. Ils doivent désormais passer de la parole aux actes et
prendre des mesures concrètes pour aider le continent africain à
déployer tout son potentiel.
Plus de place où se cacher pour les corrompus
La France, l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni — des piliers
européens du G20 — ont l’opportunité d’agir de la sorte, alors que
l’Union européenne finalise sa directive anti-blanchiment d’argent. Pour
le président nigérian par intérim, l’Afrique est prête à surmonter les
obstacles qui se présentent à elle tout en coopérant avec des
partenaires qui lui ont souvent promis la prospérité.
Ces pays devraient faire preuve d’un réel engagement dans la lutte
contre la corruption, en Afrique et ailleurs (notamment chez eux), en
rendant publiques les informations sur les bénéficiaires effectifs des
entreprises, trusts et autres entités juridiques… Rendre ces
informations publiques permettrait, d’une part, aux journalistes, aux
organisations de la société civile et aux citoyens africains de les
examiner et de repérer ainsi les cas de corruption et, d’autre part, de
rétablir la confiance dans un système mondial que beaucoup considèrent
comme inéquitable. La directive européenne anti-blanchiment d’argent
serait aussi un moyen de dissuasion, qui obligerait les criminels
potentiels et les individus prêts à se laisser corrompre à réfléchir à
deux fois avant de se lancer dans une activité illégale. Et le président
nigérian par intérim d’asséner : «Depuis des années, mon pays s’efforce
de récupérer des milliards de dollars volés, dont la plupart ont été
secrètement envoyés en Europe.» La réduction de la corruption et des
marchés illicites aiderait les gouvernements africains à récupérer des
revenus réellement nécessaires.
L’argent caché en Europe pourrait développer l’Afrique
Les trusts et les sociétés écrans, véhicules préférés des corrompus du
XXIe siècle, ont souvent facilité ces flux illicites et les biens mal
acquis — de l’argent qui, autrement, pourrait contribuer à financer des
infrastructures et des programmes sociaux dans les pays africains. Ces
besoins de financement sont plus importants que jamais. Mais les efforts
en Afrique pour générer une croissance économique durable sont compromis
par la corruption, que facilitent les systèmes juridique et financier
des pays du G20. Si les gouvernements échouent à répondre aux besoins de
cette jeunesse, l’instabilité politique et les déplacements massifs de
population qui s’ensuivront relégueront à l’arrière-plan l’actuelle
crise des réfugiés en Europe. Si l’Europe tient réellement à aider
l’Afrique, elle doit aider les gouvernements africains à s’attaquer à la
corruption. L’Europe pourrait montrer son attachement à un vrai
partenariat avec l’Afrique en établissant des règlements
anti-blanchiment novateurs, qui empêcheront les criminels et les
individus corrompus de rester anonymes et voler son avenir à la
population africaine. Ne pas s’y atteler pourrait mettre à mal tous les
autres efforts européens visant à assurer la prospérité africaine.
LSC
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