Chronique du jour : SOIT DIT EN PASSANT
Entre malaise et compromis !
Par Malika Boussouf
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Je n’ai pas encore décroché de cette histoire de harcèlement qui, en
à peine quelques jours, a largement débordé des frontières d’Hollywood,
parce que tout le monde semble s’être pris d’engouement pour elle. Je me
garderai bien de dire qu’il n’y a aucune raison d’en faire autant. Que
tellement de voix s’élèvent en même temps pour exprimer sympathie pour
les unes et rejet pour l’autre n’est pas surprenant.
Au contraire, cela rassure. Ce qui est déconcertant, par contre, c’est
le fait que les langues se délient à un moment plutôt qu’à un autre.
Presque trop tard, diront certains ! Comment expliquer, en effet, que
tout le monde sache mais que personne ne dise rien pendant des dizaines
d’années et qu’un matin, une victime qui ne supporte plus de garder le
silence décide de hausser le ton et en pousse d’autres, jusque-là dans
la soumission et le compromis, à faire pareil ? Parce que se taire
équivaut quelque part à composer avec le violeur et avec la société que
l’on craindrait trop puritaine pour encaisser et montrer de la
compassion lorsque pareils scandales viennent troubler son ronron. Elles
sont quand même incroyables ces femmes qui ont la force des projecteurs
pour elles, mais qui se taisent par peur de ternir leur réputation ou de
compromettre leur carrière, jusqu’au moment où le silence qui conforte
le traumatisme devient impossible à vivre. Elles ne parlent pas alors
qu’il suffit que l’une d’elles oublie ses ambitions, mette de côté les
risques encourus dans le cas d’un témoignage de sa part et le fasse pour
que sa vie change de ton et prenne une tournure plus apaisée. Parce que
rester discrètes sur les assauts d’un monstre lubrique, au pouvoir
certain, renforce indéniablement le malaise.
Qu’est-ce qui fait qu’une actrice qui a la notoriété pour elle et
bénéficie de la crédibilité nécessaire pour se faire entendre et se
retourner contre son violeur ne le fait pas au moment où cela se passe
et attend de s’assurer que personne ne la jugera avant de monter au
créneau ? Et pourtant, la dénonciation, quand elle est relayée par un
média qui a pignon sur rue, permet de rompre avec l’invivable compromis.
M. B.
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