Actualités : COALITION «ANTITERRORISTE» INITIÉE PAR RIYAD
Les raisons du non algérien
Une coalition antiterroriste de pays musulmans s’est
mise officiellement en place cette semaine à Riyadh. Restée à l’écart du
processus ayant mené à la concrétisation d’un projet vieux de deux ans,
Alger a décidé de ne pas figurer dans le lot des Etats ayant adhéré à la
nouvelle organisation.
Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Dimanche 26 novembre. Le prince
héritier Mohamed Ben Salmane annonce officiellement à Riyadh la
naissance d’une coalition militaire antiterroriste composée de 41 pays
musulmans. Il présente la réunion comme un «évènement très important
car, dit-il, les groupes terroristes agissaient dans nos pays sans qu’il
y ait de coordination pour les contrer».
D’un ton solennel, il ajoute : «Aujourd’hui, cette situation prend fin
car plus de 40 pays ont transmis des signaux forts indiquant que nous
allons désormais travailler ensemble et que nous allons coordonner nos
capacités militaires, financières politiques et de renseignement (…)
chaque pays y contribuera en fonction de ses capacités.»
Le prince héritier clôt son discours en transmettant son soutien aux
Égyptiens éprouvés par une terrible attaque survenue vendredi dans une
mosquée dans le Sinaï et affirme : «Nous allons nous tenir aux côtés de
tous les pays du monde qui combattent le terrorisme et l’extrémisme.» La
naissance de la coalition est officiellement annoncée. Les pays
musulmans ayant pris part à cette initiative se disent tous derrière
l’Arabie Saoudite, mais certains Etats ne figurent pas parmi la liste
des wagons de Riyadh. Parmi eux, l’Algérie qui s’est déjà récemment
distinguée par une position prouvant sa volonté de demeurer indépendante
face aux grands dossiers du monde arabe. C’était il y a moins d’une
semaine. Les autorités saoudiennes, encore une fois, avaient introduit
une demande pour la convocation d’une réunion urgente au sein de la
Ligue arabe. Objectif : débattre du «cas» Iran, son ennemi juré accusé
de soutien aux groupes terroristes activant dans la région, et
responsables, selon elle, d’une attaque au missile lancée à partir du
territoire yéménite et intercepté sur les terres saoudiennes.
Au Caire, les chefs de la diplomatie arabe se réunissent à la date
fixée, mais à l’instar de Baghdad qui préfère dépêcher un représentant
de second rang, l’Algérie se fait représenter par son ambassadeur sur
place. Le message délivré de manière très diplomatique est très clair.
Alger refuse de se laisser embarquer dans une «aventure à l’issue
incertaine (…) un va-t-en guerre qui ne dit pas son nom et une
initiative qui s’est d’ailleurs concrétisée par des prises de position
contraires à celles du pays».
La réunion de la Ligue arabe s’achève en effet avec l’adoption d’un
communiqué condamnant une nouvelle fois le Hezbollah, qualifié de groupe
terroriste, et en clouant au pilori l’Iran. Une contradiction parfaite
avec la position algérienne consistant à considérer ce mouvement comme
une force politique libanaise légale, et un mouvement de résistance face
à Israël, mais aussi et surtout une confirmation des appréhensions qui
laissaient entrevoir que le processus mis en place par les Saoudiens
s’apparente en fait à la mise en place d’une coalition anti-Iran. Les
faits qui se succèdent le confirment davantage lorsque Riyadh convoque
donc en début de semaine une réunion pour la mise en place, cette fois,
d’une force militaire où l’Iran est principalement ciblé.
Le front s’apparente à une coalition anti-chiite. Comme à son
accoutumée, l’Arabie Saoudite adresse des «invitations» aux pays
musulmans quelques heures avant la tenue de la réunion. L’Algérie figure
parmi les Etats auxquels ont été adressées des missives aux allures de
convocations. Aucune explication, ni détail concernant les objectifs de
cette rencontre ne figurent dans cette dernière. Les autorités
saoudiennes ne daignent même pas répondre aux lettres transmises par
certains Etats musulmans dont l’Algérie qui demandent des précisons sur
l’ordre du jour. Une «nouvelle aventure se met en place».
Consciente des enjeux, l’Algérie préfère se démarquer du troupeau et
adopter la position qui a toujours été la sienne. La mise en place de la
coalition militaire implique également des opérations de terrain
contraires à son principe de non-ingérence et pouvant cibler des pays et
des organisations respectés par les Algériens. De manière très
diplomatique, elle préfère également éviter de se lancer dans des
polémiques inutiles et contreproductives en évoquant publiquement le
sujet.
Le pays entretient des relations correctes avec l’Arabie Saoudite et
préfère s’en tenir là. Il observe l’évolution de la situation. Surtout
que dans les milieux diplomatiques arabes, y compris ceux impliqués dans
l’opération, on ne se voile pas la face : la coalition militaire est
perçue comme une nouvelle coquille vide destinée uniquement à asseoir la
suprématie saoudienne au sein de la Ligue arabe.
A. C.
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