Corruptions : Transparence budgétaire et recouvrement de la fiscalité
Efforts de la Cour des comptes et retard du gouvernement


Les données chiffrées contenues dans le projet de loi portant règlement budgétaire de l’exercice 2015 ont été validées par la Cour des comptes, validation qui va dans le bon sens en matière de transparence budgétaire. Ce projet de loi confirme ce que l’on savait déjà : le gouvernement a beaucoup de retard et d’insuffisances concernant la bonne utilisation de l’argent public.
Jeudi 7 décembre 2017, la commission des finances et du budget de l’Assemblée populaire nationale (APN) a entendu un exposé du ministre sur le projet de loi portant règlement budgétaire de l’exercice 2015, année qui a vu le lancement du programme quinquennal de croissance (2015-2019) et le début des retombées de la crise financière.
Le projet de loi portant règlement budgétaire de l’exercice 2015, dont les chiffres ont été validés par la Cour des comptes, révèle que les dépenses effectives s’élevaient à 7 249,4 milliards de dinars et 7 424,33 milliards de dinars avec les dépenses imprévues contre des dépenses prévisionnelles dans la loi de finances complémentaire de 2015 s’élevant à 8 753,73 milliards de dinars, soit un taux de réalisation de 84,8%, a fait savoir le ministre des Finances lors de cette réunion qui s’est déroulée en présence du ministre des Relations avec le Parlement.

Près de 150 milliards de dinars de dépenses… imprévues !
Les dépenses imprévues étaient de l’ordre de 147,95 milliards de dinars. Les dépenses réelles de fonctionnement se chiffrent à 4 660,35 milliards de dinars (contre un budget prévisionnel de 4 972,28 milliards de dinars au titre de la loi de finances complémentaire 2015), soit un taux de consommation de 93,73%, tandis que les dépenses d’équipement s’élevaient à 2 589,02 milliards dinars (contre 3 781,45 milliards de dinars de dépenses prévisionnelles), soit un taux de réalisation de l’ordre de 68,46%. Par ailleurs, les recettes réalisées avaient atteint 4 563,8 milliards de dinars en 2015, soit 388,9 milliards de dinars, moins que le montant prévu par la loi de finances complémentaire 2015 (4 952,7 milliards de dinars), avec un taux de réalisation de 92,15%. Pour les ressources ordinaires, elles avaient représenté 62,25% des recettes effectives, tandis que le taux de la fiscalité pétrolière a été de 37,75%.

Le Trésor au secours du déficit et de la dette interne
Alors que la loi de finances complémentaire 2015 tablait sur un déficit prévisionnel de 3 801,03 milliards de dinars (-20,82% du PIB, produit intérieur brut), le déficit effectif enregistré a atteint, selon le projet de loi portant règlement budgétaire, 2 806,6 milliards de dinars (-17,24% du PIB). Ce déficit a été couvert par les liquidités disponibles au Trésor à l’époque et des prélèvements sur le Fonds de régulation des recettes (FRR), dont le solde a atteint 3 110,35 milliards de dinars fin 2015. Au cours de l’année 2015 et en raison du recul des cours du pétrole — avec une moyenne de 52,8 dollars contre 99 dollars en 2014 — (respectivement 100 dollars et 60 dollars dans les lois de finances initiale et complémentaire 2015), le PIB nominal s’était établi à 16 591,9 milliards de dinars contre une prévision de 18 255,5 milliards de dinars dans la loi de finances complémentaire (2015).
Par ailleurs, l’encours de la dette publique externe a atteint, fin 2015, 26,38 milliards de dinars (soit 246,64 millions de dollars), tandis que celui de la dette publique interne a atteint 1 380,8 milliards de dinars, dont 998,5 milliards de dinars de dette de marché et 382,3 milliards de dinars de dette d’assainissement. Le ministre des finances s’est félicité de «l’effort budgétaire» consenti par l’État, notamment à travers le maintien des transferts sociaux, en dépit de la crise financière. Un effort dont les fruits se sont traduits en 2015 par des indices de développement humain positifs, a-t-il relevé.

Dette fiscale à récupérer, «l’assainissement est nécessaire», selon le ministre des Finances
La dette fiscale s’élevait à environ 3 500 milliards de dinars (mds DA) en 2015, alors que les restes à recouvrer par l’administration fiscale au titre des amendes judiciaires avoisinaient les 7 500 mds DA, une situation dont l’assainissement s’avère «nécessaire», a indiqué le ministre des Finances, toujours lors de cette réunion à l’APN.
La dette fiscale s’élevait à environ 3 500 milliards de dinars (mds DA) en 2015, alors que les restes à recouvrer par l’administration fiscale au titre des amendes judiciaires avoisinaient les 7 500 mds DA, une situation dont l’assainissement s’avère «nécessaire», a indiqué le ministre des Finances.
«Quand on parle de 11 000 mds DA de restes à recouvrer, il ne faut pas imaginer que l’administration fiscale est en train de les regarder sans rien faire. La dette fiscale effective tourne autour de 3 500 mds DA, alors que le reste est surtout constitué d’amendes judiciaires portant sur des banques et entreprises dissoutes», a-t-il souligné.
La totalité des membres de la commission des finances et du budget de l’APN, qui sont intervenus juste après l’exposé présenté par le ministre sur le contenu de ce projet de loi, ont pointé du doit le montant faramineux des restes à recouvrer par l’administration fiscale avancé par la Cour des comptes sur la base des données de la Direction générale des impôts.

Plus de 11 000 milliards de dinars d’impôts à recouvrer

Selon le rapport de la Cour des comptes qui accompagne annuellement le projet de loi portant règlement budgétaire, ces restes à recouvrer étaient de 11 039,53 mds de dinars à fin 2015, dont 10 207,34 mds déjà enregistrés à fin 2014 et 874,95 mds enregistrés au cours de 2015. Mais les restes à recouvrer représentent notamment le cumul des amendes judiciaires, ainsi que les dettes des entreprises publiques dissoutes et qui ont été effacées, souligne le ministre des Finances. Sur l’ensemble de ces amendes, 5 295,58 mds DA concernent la Banque commerciale et industrielle d’Algérie, selon la Cour des comptes.
«Une seule banque est, à elle seule, l’objet de plus de 5 000 mds DA d’amendes. La banque a été dissoute, et il n’y a aucun moyen de récupérer ces montants aujourd’hui, ce sont des écritures qui restent et qui sont reprises par le rapport de la Cour des comptes chaque année», note le ministre. Interrogé par un député si le gouvernement avait l’intention d’assainir cette situation en décidant l’annulation par la justice des dettes fiscales dont le recouvrement s’avère impossible, étant par exemple en lien avec des entreprises dissoutes ou remontant à plusieurs décennies, le ministre a jugé nécessaire une telle réflexion : «Oui, je crois qu’une réflexion pour assainir la situation est nécessaire.»
Depuis le temps que cette énorme masse d’impôts perdus dans la nature ne cesse de grossir, qu’a fait de concret le gouvernement pour essayer de remédier à ce très grave manque à gagner pour les finances publiques ? Le ministre des finances nous promet un temps de réflexion ! A quand le temps de l’action ?
Djilali Hadjadj et dépêche APS


Loi de règlement budgétaire, de quoi il en retourne ?

Loi qui arrête à chaque fin d’année budgétaire le montant définitif des dépenses et des recettes de l’Etat, ratifie les opérations réglementaires ayant affecté l’exécution du budget, fixe le résultat budgétaire et décrit les opérations de trésorerie.
Elle peut comprendre des dispositions sur l’information et le contrôle des finances publiques, la comptabilité et la responsabilité des agents.
Le projet de la loi de règlement budgétaire est assimilé à un document comptable transmis annuellement à l’organe législatif (APN) à l’effet d’exercer son contrôle sur l’exécution des lois de finances de l’année n-1 avant d’envisager les discutions et le vote des crédits et les objectifs proposés pour l’exercice n.
En application des dispositions de l’article 18 de l’ordonnance n°95-20 du 17 juillet 1995, modifiée et complétée par l’ordonnance n°10-02 du 26 août 2011 relative à la Cour des comptes, «la Cour des comptes est consultée sur les avant-projets annuels de la loi de règlement budgétaire. Les rapports d’appréciation qu’elle établit à cet effet au titre de l’exercice considéré sont transmis par le gouvernement à l’institution législative avec le projet de loi y afférent».
L’article 5 de la loi 84-17 du 17 juillet 1984 relative aux lois de finances dispose que «la loi de règlement budgétaire est l’acte par lequel il est rendu compte de l’exécution d’une loi de finances et, le cas échéant, des lois de finances complémentaires ou modificatives afférentes à chaque exercice».



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http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2017/12/11/article.php?sid=221220&cid=11