Actualités : AGRODIV- BELGHITH : UN PARTENARIAT PUBLIC-PRIVÉ EXEMPLAIRE
M. Zerouki Abdelkrim : «notre solution : réduire de 25% la facture du
blé !»
Au moment où l'on parle tant du fameux PPP (Partenariat
public-privé), nous avons jugé utile de nous pencher sur une expérience
qui a été initiée, dans un esprit d'innovation et de complémentarité,
entre le groupe public Agrodiv, qui gère les minoteries étatiques, et un
partenaire privé, Pain Sur Table Spa (les Moulins Belghith). Alors que
le «partenariat», espèce d'auberge espagnole, sert surtout à cacher les
véritables visées de certains acteurs privés qui reviennent à la charge
pour absorber les minoteries publiques, cette expérience a permis de
démontrer qu'un accord sans arrière-pensées, ni dommages pour le secteur
public, était possible pour peu que chaque partenaire joue son rôle. Le
«partenariat» a souvent servi de toile de fond à de véritables razzias
qui ont permis à certains privés d'acheter, pour une bouchée de pain, et
sur crédit bancaire, des unités colossales hors de prix à cause de leur
emplacement, pratiquement au centre d'espaces urbains valorisés. Au bout
de quelques mois ou d'années, la bâtisse est détruite et il reste des
terrains courus par les promoteurs immobiliers ! Dans le cas qui nous
intéresse, les Moulins Belghith ont apporté leur savoir-faire afin
d'améliorer les rendements des 28 moulins d'Agrodiv, avec des retombées
positives sur l'importation de blé dont le coût ne cesse d'augmenter.
Bien menée, cette solution argumentée et démontrée lors de nombreuses
rencontres et forums, permettrait d'économiser 25% sur la facture
d'importation de blé tendre ! Afin d'en savoir plus, nous avons profité
de la présence de M. Zerouki Abdelkrim — patron des Moulins de Belghith
et de «Pain sur Table», une formule également révolutionnaire pour
offrir, en quantité et en qualité, du bon pain partout en Algérie —,
pour lui poser quelques questions rapides sur cette expérience.
Le Soir d'Algérie : Comment s'est construite la relation avec Agrodiv
?
M. Zerouki Abdelkrim : Tout le monde a été séduit par nos
propositions, les ministres (de l’Agriculture, de l’Industrie et du
Commerce), ainsi que les cadres et chefs meuniers des 26 moulins (de
Béchar à Tebessa), des propositions qui ne visaient aucune ingérence
dans la gestion des moulins publics, ni de prises de part, ni de
privatisation des infrastructures de base. Notre but était de transférer
les bienfaits du brevet de fabrication à fort taux de rendement de pain
au secteur étatique. Cependant, suite à la demande du groupe Agrodiv,
nous avons créé une société à part qui a pour mission d'implanter le
système de gestion (Target) qui va se traduire par une gestion
transparente et moderne permettant de réaliser des résultats importants,
mais surtout par une amélioration de la qualité du pain dont le moins
qu'on puisse dire est qu'elle ne présente pas actuellement toutes les
garanties pour la bonne santé des consommateurs. Notre PPP est en
quelque sorte un essai avant de généraliser le diagramme à tous les
moulins d'Agrodiv. Le transfert de savoir, de technologie (Brevet) et du
mode de gestion (Target) permettra à Agrodiv de réaliser sa mission
d'utilité publique sans être un fardeau sur le dos du Trésor.
Quand un privé s'intéresse à une société publique, on parle souvent de
bradage... Car, la majorité des expériences s'est soldée par un échec
qui a vu parfois la disparition de l'activité.
Dans notre cas, il n'y a aucun bradage étant donné que les valeurs des
apports en nature des deux partenaires ont été estimés par des
commissaires aux apports désignés par les tribunaux de Bouira et Koléa.
Et ce, conformément au code de commerce. De plus, c’est à la demande du
groupe Agrodiv spa que le partenariat a été réalisé. Nous ne touchons
pas aux Moulins. Nous apportons un plus et ce plus est reconnu par des
certifications internationales. Le privé intervient ici pour apporter
des solutions de rentabilité, d'économie et d'hygiène à un process qui
doit être modernisé. A mon avis, les échecs sont dus à une mauvaise
préparation et une mauvaise définition des objectifs en ce sens que
chaque partenaire est plus intéressé par les gains propres que par les
gains provenant du partenariat. Ce n'est pas le cas de notre PPP,
puisque la consistance du projet est partagée par les deux parties.
Dans le cas du pain, y a-t-il une perspective pour sortir du gaspillage
et des dépassements du secteur privé qui utilise la farine subventionnée
pour produire des gaufrettes, du biscuit, etc. ?
Afin d'éviter de détourner le service d'utilité publique qui
consiste à fournir au citoyen du pain au prix réglementé, notre PPP
couvre admirablement cet aspect par la création de centres de proximité
destinés à fournir la farine aux boulangers sans passer par des
intermédiaires. Je dois souligner que le rendement en pâtons de cette
farine est de 20% en plus (550 pains au lieu de 450 pains). Ce qui
améliore sensiblement les marges des boulangers. Il faut soit élargir ce
mode de PPP aux autres meuniers qui ont la capacité de transférer leur
savoir-faire (dans le cas éventuel où il existerait) en s'assurant de la
continuité du service d'utilité publique.
Comment encourager le PPP sans retomber dans les mêmes travers et,
surtout, sans courir encore une fois le risque d'assister à un bradage
en règle ?
Afin d'éviter de retomber dans les mêmes erreurs, il est préférable
d'établir un cahier des charges pour chaque secteur (tabacs, boissons,
corps gras, minoteries, semouleries).
R. C.
|