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Rubrique Ce monde qui bouge

À propos du manifeste contre le nouvel antisémitisme

Le manifeste contre le nouvel antisémitisme, signé par 300 personnalités françaises, publié dans le Parisien de dimanche dernier, fait débat en France. Parmi les signataires, des personnalités respectables dont on se demande si elles ont bien lu le texte avant de le signer. D’autres, comme le rédacteur du manifeste Philippe Val, l’ex-président Nicolas Sarkozy, l’ex-Premier ministre Manuel Valls, Bernard Henri-Lévy, Alain Finkielkraut qui a franchement décomplexé la parole raciste (ses propos sur la présence de Noirs en équipe de France de football, sur les «non-souchiens» absents lors de l’hommage à Johnny Halliday…), Pascal Bruckner et son «sanglot de l’homme blanc», sont dans leur rôle, ils se sont toujours affichés en toutes circonstances plus pro-israéliens que les Israéliens eux-mêmes.
Malgré les précautions de forme et de style, ce texte sur le «nouvel antisémitisme», qui dénonce «une épuration ethnique à bas bruit au pays d’Émile Zola et de Clemenceau», la dénonciation d’un «antisémitisme musulman», et qui joue sur l’affect et l’émotion, est une mise en accusation des «musulmans», vocable – c’est tendance – par lequel sont désignés, amalgamés et suspectés potentiellement, tous ceux ayant des noms à consonance maghrébine ou arabe, quelles que soient leurs convictions.
La gauche radicale est accusée d’avoir «trouvé dans l’antisionisme l’alibi pour transformer les bourreaux des juifs en victimes de la société». «De qui parle-t-on ? s’écrie à ce propos le journaliste Dominique Vidal. Des communistes ? Des insoumis ? Des écologistes ? Des trotskistes ? Des chrétiens de gauche ? Aucun de ces partis, groupes ou mouvements n’a jamais flirté, de près ou de loin, avec la haine des juifs ! Au contraire, c’est de ce côté-là que les juifs ont trouvé, à l’heure du plus grand péril, leurs défenseurs les plus héroïques.» Et de citer la sociologue Nonna Mayer, pour qui le concept de «nouvel antisémitisme» est inspiré des thèses de Pierre-André Taguieff qui «voit un antisémitisme masqué derrière la critique d’Israël et du sionisme, au nom de l’antiracisme et des droits de l’Homme…»
Et puisqu’il est question de «djihadisme» associé insidieusement à un groupe social déterminé, à savoir les «musulmans» toutes origines socio-ethniques confondues, les auteurs de ce manifeste se sont-ils posé un instant la question de savoir pourquoi les groupes islamistes, toutes tendances confondues, privilégient le «djihad» contre les Etats dits impies, comme la Syrie, plutôt que contre Israël ? Bien sûr que non : ils ne sont pas idiots et ils sont très bien informés. Et pourquoi en retour, Israël préfère frapper, sous prétexte de menace iranienne, les forces syriennes plutôt que les groupes djihadistes dont les blessés sont soignés en Israël comme l’ont montré les reportages de la télévision israélienne ? Rappelons que l’islamisme radical, que Washington a soutenu et armé dans les années 1960-1980 pour contenir le «communisme soviétique», a tué plus de musulmans – plus de 100 000 en Algérie, autant en Afghanistan, au Pakistan ou en Irak – que de juifs ou de chrétiens.
Enfin, comble de l’absurdité, ils demandent aux autorités religieuses musulmanes que «les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés d’obsolescence par les autorités théologiques, comme le furent les incohérences de la Bible et l’antisémite catholique aboli par Vatican II» ! Or, comme le signale le journaliste François Reynaert sur le site l’OBS, si les autorités catholiques ont bien mis fin à «l’enseignement du mépris» à l’endroit des juifs, «jamais, au grand jamais, elles ne l'ont fait en ‘’frappant d'obsolescence’’ le texte saint. Allons ! Un pape ou même un concile qui irait faire le tri dans Saint Paul, ou les poussières dans les actes des Apôtres ? Non.»
Les auteurs de ce brûlot, aux effets délétères, visent un autre but : criminaliser, sous couvert de lutte contre l’antisémitisme, toute critique de la répression israélienne contre les Palestiniens.
H. Z.

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