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Rubrique Ce monde qui bouge

Et si le coronavirus était apparu en 1990…

« Et si le coronavirus avait débarqué en 1990 quand nous n’avions ni internet ni smartphones ? » s’est demandé le journaliste belge Karim Fadoul de la RTBF (Radio-télévision belge) ? Et de se livrer à un exercice de fiction, sur une Belgique entrée en confinement depuis le 14 mars 1990. Et en Algérie, comment les choses se seraient-elles passées en 1990 si le coronavirus avait sévi ?
En cette moitié de l’année 1990, même s’ils n’étaient pas tout à fait coupés du reste du monde, les Algériens ne disposaient pas des mêmes moyens d’information qu’aujourd’hui. Ils lisaient la presse publique. La presse indépendante n’existait pas. Ils écoutaient Medi-1 plutôt que la Radio nationale. Quant à la presse étrangère, si vous connaissiez bien le patron du kiosque de votre quartier, il consentait à vous mettre de côté Le Monde, Libération… et Pif Le Chien pour les enfants ! 
L’apparition de la parabole, on n’en était qu’au début, que l’ex-FIS avait fustigée — « l’antenne para-diabolique » — et que ses militants n’hésitaient pas à faire arracher des terrasses, représentait une vraie opportunité. Elle permettait aux Algériens d’avoir une fenêtre sur le monde. Le même FIS finira quand même par découvrir que la télé par satellite pouvait servir ses objectifs. 
Quoi d’autre encore en 1990 ? Tout le monde n’avait pas le téléphone. Il fallait attendre des années pour avoir une ligne téléphonique ou disposer d’un sérieux piston pour en obtenir une. Pour appeler un ami, un parent, il fallait se rendre au bureau de poste du coin ou aller dans les cabines téléphoniques quand il y en avait et quand elles n’étaient pas vandalisées. Imaginez donc un pays sans smartphones, sans réseaux sociaux, sans internet… 
Et puisqu’en 1990, l’ex-FIS, alors au faîte de sa puissance, avait un avantage certain sur le pouvoir politique et ses concurrents politiques – par le biais des mosquées qu’il contrôlait, il disposait d’un vrai réseau de communication et d’information – aurait-il pu continuer à faire ses démonstrations de force en plein mois de Ramadhan comme la fameuse marche d’avril 1990 avec meeting devant le palais présidentiel à El-Mouradia ? Aurait-il eu besoin d’interdire par la force les concerts de musique et spectacles en plein mois de Ramadhan à l’heure des « tarawih » puisque le coronavirus aurait dissuadé les Algériens d’y assister ? 
Ben Bella et Aït Ahmed seraient-ils rentrés au pays ? Le RCD, le PAGS et leurs alliés démocrates auraient-ils pu organiser des marches comme ils l’ont fait en ce mois d’avril 1990 et le FFS le 31 mai ? Ou les auraient-ils annulées à la demande du gouvernement réformateur de Mouloud Hamrouche qui aurait alors édicté des règles de confinement ? 
Et les élections locales – APC et APW – du 12 juin auraient-elles eu lieu ? Le FIS aurait-il pu tenir son fameux meeting électoral du 5 juin 1990 et avoir recours au rayon laser pour duper les dizaines de milliers de personnes présentes au stade du 5-Juillet ? 
Pour rappel, ce 5 juin 1990, à une semaine des élections du 12 juin, lors du dernier meeting électoral de l’ex-FIS au stade du 5-Juillet, le discours de Abassi Madani fut soudain interrompu par une prétendue inscription « Allah ouakbar » en plein ciel. Subjugués, croyant au miracle divin, saisis d’émotion, des sympathisants du parti étaient tombés dans les pommes, pendant que d’autres versaient des larmes ou psalmodiaient des versets coraniques. 
L’impact sur la foule présente au stade du 5-Juillet et ailleurs dans le pays a été considérable. Ni Abassi Madani, ni aucun dirigeant de l’ex-FIS, pas même ceux que l’on nous présente aujourd’hui, trente ans après, comme des « modérés » à l’image de Abdelkader Hachani, n’ont expliqué à leurs militants ayant assisté à ce « miracle divin » que ce n’en était pas un, mais le produit d’un simple rayon laser actionné par une main humaine. 
Mais mon petit doigt me dit aujourd’hui que si le Covid-19 avait débarqué en 1990, l’ex-FIS aurait qualifié les mesures de confinement du gouvernement de Mouloud Hamrouche de « manœuvres sataniques »,  et aurait demandé à sa base de braver les interdits !  
H. Z.

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