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Rubrique Ce monde qui bouge

Tunisie, le coup de tonnerre Algérie, l’incertitude...

Ainsi, l’offre politique de Abdelkader Bensalah, à savoir la tenue du scrutin présidentiel le 12 décembre et ce qui va avec, est sans concession. En moins d’une semaine tout a été plié : adoption des lois organiques par le gouvernement et le Parlement, après avis du Conseil d’Etat et du Conseil constitutionnel. Le gouvernement Bedoui que l’Instance de médiation et de dialogue (panel) a pourtant qualifié d'«émanation du système corrompu» et dont elle a demandé le départ, reste en place. Et, jusqu’à preuve du contraire, il n’y aura pas de climat d’apaisement comme s’y était engagé
M. Bensalah le 25 juillet. D’ailleurs, la liste des activistes du Hirak arrêtés lors des manifestations des vendredis et mardis, s’est encore allongée. Et presque à l’unanimité, tous les acteurs de la société civile et politique, ont dénoncé et qualifié de «dangereux» cette vague d’arrestations sans précédent. 
Dans ces conditions, si rien ne change dans les trois mois à venir, il ne faudra pas s’étonner que perdure le face-à-face entre les autorités de fait et le peuple qui manifeste chaque vendredi. Les Algériens ne vont pas se satisfaire de ce qui leur est proposé pour se rendre aux urnes le 12 décembre. Ils ne demandent pas la lune. Ils veulent surtout des garanties politiques, constitutionnelles et juridiques, qui n'existent pas dans la Constitution actuelle, et sur lesquelles ils pourraient s'appuyer pour exercer et défendre leurs droits. Ce que le panel n’a même pas suggéré. 
Certes, il est compréhensible que la poursuite de la mobilisation citoyenne née le 22 février suscite des inquiétudes chez certains tenants de l’ordre établi, mais en même temps, ce mouvement citoyen n’est pas porteur de désordre social : le pays n’est pas à l’arrêt, administration, postes, banques, train, métro, bus, entreprises fonctionnent. Car les Algériens font la part des choses entre revendiquer pacifiquement le changement et le nécessaire fonctionnement des institutions administratives et socio-économiques. Cela dit, il faudra bien sortir de ce face-à-face. Et c’est encore possible. 
Le pouvoir politique dispose de quelques cartes en la personne de Abdelmadjid Tebboune, peut-être d’Ali Benflis qui rêve d’un destin présidentiel... Il pourra compter sur l’UGTA et les partis de l’ex-Alliance présidentielle qui se mettent à espérer un retour sur scène. Comme il peut jouer sur le fait que le Hirak n’est pas structuré et se méfie des partis politiques, même de ceux qui cherchent à parler en son nom pour des raisons qu’il serait trop long d’expliquer dans cette chronique. Reste une incertitude : qui ira voter et quel sera le taux de participation ?
En Tunisie, le parti islamiste Ennahdha que tout le monde voyait arriver en tête, a subi un échec : son candidat, Abdelatif Mourou (12,8 %), arrivé en 3e position, est éliminé. L’un des ténors de la gauche, Hama Hammami (0,7%), n’a même pas franchi la barre des 1%, lui qui était arrivé en troisième position en 2014 ! 
Le second tour – un vrai coup de tonnerre — opposera donc Kaïs Saied (18,4%) un constitutionnaliste sans parti politique, prônant une vision conservatrice de la société, et le patron de Nessma TV, le libéral populiste Nabil Karoui (15,5%), actuellement en prison pour fraude fiscale. 
Quoi qu’on pense de ce scrutin, les Tunisiens ont voté librement et personne n’a remis en cause le résultat qui a vu pourtant l’élimination de deux membres du gouvernement sortant, le ministre de la Défense Abdelkarim Zbidi (10,1%) et le Premier ministre Youssef Chahed (7,4%). 
Pour l’heure, ça se passe plutôt bien. Grâce aux institutions mises en place après la chute de Ben Ali et le changement de la Constitution, toutes choses qu’il n’a pas été facile de mettre en place, le peuple tunisien est parvenu à instaurer un système politique respectueux de la volonté populaire qui fonctionne et qui les met à l’abri contre tout retour en arrière. Et ce, en dépit de la menace en provenance de Libye, du terrorisme qui a ensanglanté le pays sur fond d’une crise sociale aiguë, sans oublier les pressions étrangères, notamment celle du couple émirato-saoudien qui ne voit pas d’un bon œil le processus de démocratisation tunisien. 
Moralité. Quand il y a un Etat et des institutions démocratiques qui fonctionnent, des contrepouvoirs, une presse libre, des citoyens conscients de leurs droits et où l'alternance politique n'est pas qu'un slogan ou un faire-valoir pour légitimer le maintien d'un système autoritaire, il n'y a aucune raison que ça ne marche pas. 
H. Z. 

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