Quelque part à l’abri des regards moqueurs, des rires narquois du vent
froid, une bande d’amis qui sont un peu plus qu’amis se penche sur les
résultats des élections locales anticipées. Pourquoi se cacher donc pour
faire le bilan d’une élection, décortiquer les chiffres qu’on connaît,
les chiffres qu’on ne connaît pas et les chiffres qu’on connaît sans
pouvoir en parler ? Pour trois raisons au moins. La première est que les
regards moqueurs, personne n’en supporte depuis quelque temps. Depuis
qu’on ne peut plus se permettre les répliques arrogantes et les
balayages d’un revers de la main, il faut se cacher pour vivre ses
privilèges, évoquer ce qu’on aurait pu perdre et le fait qu’on n’ait
finalement pas perdu grand-chose. La seconde est que les rires narquois
peuvent toujours inspirer d’autres gestes moins inoffensifs, ou plus
offensifs, si vous préférez les termes en mode positif. Et au point où
en sont les choses, ce serait une folie de passer aussi rapidement à la
« confrontation directe ». La « politique des petits pas » est peut-être
vieille et d’ancrage lointain mais elle n’est pas tout à fait
inopérante. Elle sert encore dans beaucoup d’endroits et à des endroits,
avec une redoutable efficacité. La troisième enfin est élémentaire,
basique et primaire. Le vent froid est d’abord froid avant d’être du
vent et comme son nom ne l’indique pas, c’est très mauvais pour la
santé. Ça provoque des rhumes carabinés, ça encourage des grippes
désormais mortelles et maintenant on se pose la question de savoir s’il
ne booste pas la propagation du coronavirus, surtout dans cette dernière
version dont on ne connaît pas encore grand-chose mais révèle chaque
jour un niveau de dangerosité plus inquiétant. Pour ramasser le tout et
boucler ainsi la boucle d’une manière magistrale, on sait que les amis
un peu plus qu’amis qui se retrouvent après les conférences de presse
depuis Zerhouni jusqu’à Charfi sont convaincus que leur vie est beaucoup
plus précieuse que celle de tous les autres. À ce titre et à tous les
autres titres, il n’est pas question de la laisser exposée à un vent
glacial après avoir traversé toutes les tempêtes sans jamais se
mouiller. Voilà, maintenant qu’ils ont fait le tour de la question sur
les raisons qui les ont poussés dans ce bunker à l’abri de tout, les
voilà face aux résultats des « élections locales anticipées ». Il faut
toujours écrire l’intitulé en entier pour deux raisons. La première est
que ça bouche un coin pour le chroniqueur qui connaît une légère crise
d’inspiration. La seconde est qu’avec les amis plus qu’amis réunis pour
des choses aussi sérieuses, il faut rester… sérieux. Le FLN a gagné les
élections locales anticipées. Sérieux…
S. L.
S. L.