L’appel qui a été lancé sur les réseaux sociaux pour une grève générale
qui doit durer jusqu’au 12 décembre n’a pas suscité beaucoup de
réactions défavorables comme c’était le cas par le passé où l’idée de
«durcir le Hirak» n’a pas trouvé les disponibilités attendues par leurs
initiateurs. Sans doute parce que le maintien du cap des manifestations
pacifiques a le plus rassemblé les Algériens en colère, seul le passage
des marches bihebdomadaires aux contestations quotidiennes a fini par
être adopté par endroits et à des moments précis de la contestation
populaire, souvent dans la foulée de quelques événements
«périphériques». En même temps, se confirmait cette certitude que rien
ne peut désormais faire déborder le mouvement populaire de sa
philosophie : détermination dans la paix et la lucidité. A quelques
jours d’un rendez-vous déterminant au moins par ce qu’il va dessiner
comme nouvelles perspectives, l’appel à la grève générale n’a pas
suscité de réactions défavorables mais il n’a pas non plus été du niveau
d’enthousiasme que la mobilisation populaire a su et pu soulever autour
des actions majeures entreprises par le Hirak depuis le 22 février. Les
acteurs qui en ont eu l’idée et ceux qui y ont spontanément adhéré n’ont
pas forcément des motivations de «durcissement» et veulent simplement
marquer l’arrivée imminente d’un scrutin qui est au cœur de la
contestation depuis que sa date a été fixée, surtout que le pouvoir
politique en a fait l’essentiel de ses solutions à terme. Pour autant,
les sceptiques, les hésitants et les franchement défavorables à la grève
générale de l’intérieur du Hirak ne se recrutent pas forcément parmi les
moins engagés. Ils redoutent seulement le premier faux-pas dont,
soutiennent-ils, le mouvement populaire n’a pas le droit de se permettre
le luxe à un moment si crucial. C’est donc une question qui aurait
mérité discussion mais on ne va pas refaire ici le débat sur les
spécificités du Hirak qui, sans leaders déclarés et sans structures
visibles, n’a pas toujours fonctionné avec des niveaux de concertation
susceptibles de le mettre à l’abri de quelques mauvais tournants. Bien
sûr, on peut toujours estimer que c’est aussi sa force et ça ne manque
pas d’arguments, en l’occurrence. Quelques arrière-pensées d’ambitions
personnelles et de sporadiques tentatives d’emmener le mouvement dans
des combats d’arrière-garde ont déjà été constatées sur le terrain des
opérations. S’agissant de la grève, les premiers couacs ont déjà entamé
la formidable mobilisation dans ce qu’elle a de plus généreux et de plus
vertueux. La ruée par endroits sur les produits alimentaires, les prix
qui ont doublé du jour au lendemain, ce n’est déjà pas ça le Hirak.
Reste la limite dans le temps qui peut atténuer les appréhensions. Dans
quatre jours, il fera… jour.
S. L.
S. L.