Des «campagnes d’assainissement» sont lancées un peu partout à travers le pays. On ne sait pas si la dénomination tient d’un hasard de formulation ou d’un brin de nostalgie mais il doit être bien difficile de ne pas y penser pour les Algériens en âge de vivre ça à l’époque et de s’en souvenir aujourd’hui. Parce qu’à l’époque de «la» campagne d’assainissement, les citoyens ne prenaient pas d’initiative. Même quand il s’agit de … volontariat, on le convoquait pour organiser ses élans patriotiques ou citoyens. Mais cette campagne-là était un peu spéciale. Il y était question à la fois de discipliner le citoyen dans ses comportements ordinaires, de sanctionner ses manquements au civisme, punir son manque d’ardeur à la tâche et le pousser au respect des heures et les jours de travail. Nous reviennent alors en mémoire les paniers à salade ramassant les «abstentionnistes» dans les rues d’Alger et des autres grandes villes du pays, les amendes à régler séance tenante et sans autre forme de procès, du zèle dans l’excès de certains policiers, ou enfin de situations comiques devenues, par la suite, des blagues légendaires.
Aujourd’hui, si nous sommes loin de l’époque et un peu de ses méthodes, il en subsiste tout de même quelque chose. Tenez, depuis quelques années, se développe un discours sur la propreté, l’hygiène publique, le respect de l’environnement et le devoir de le protéger.
Et si à l’époque on sanctionnait, maintenant on culpabilise, ce qui n’est pas forcément moins grave. Il suffit que les mots propreté, hygiène ou environnement soient prononcés et c’est parti pour d’interminables procès du citoyen ordinaire tenu parfois comme unique responsable de toutes les catastrophes en la matière. Pourtant, il n’a jamais eu à évoluer dans un cadre de vie sain qui le pousse à le maintenir en l’état ou, pourquoi pas, l’améliorer. Ailleurs, ce sont d’abord les services publics qui nettoient, entretiennent, boisent, fleurissent et surveillent l’espace public. Il y a un personnel, des infrastructures et des équipements pour ça, la vigilance du citoyen, son civisme et son sens de l’espace commun ne peut venir qu’en soutien et dans une modeste mesure. Quand bien même ils seraient exemplaires, ils ne sauraient faire un… programme pour l’environnement, l’hygiène et le cadre de vie d’une manière générale.
Que faut-il alors penser de ces dernières campagnes de volontariat où ça nettoie un peu avant de venir au micro faire la leçon à n’en plus finir ? Que faut-il dire des services de nettoyage communaux à qui instruction est donnée de ne pas nettoyer la m… des ivrognes, c’est-à-dire les bouteilles de vin et les canettes de bière ? On ramasse d’abord, on trie ou on sélectionne après, Messieurs ! Mais ce n’est ni de tri ni de sélection qu’il s’agit en l’occurrence. Parfois, il ne s’agit même plus de nettoyage !
S. L.
