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Rubrique Constances

Madjid, Ali et les autres

Quand Abdelmadjid Sidi Saïd et Ali Haddad s’esclaffaient, le micro à bout portant et les caméras en travelling, ils étaient, bien évidemment, loin, très loin d’imaginer que quelques semaines plus tard, ils allaient se retrouver dans la posture qui est la leur aujourd’hui. Ce jour-là, ils étaient au terme de l’une de leurs innombrables rencontres où le prétexte socioéconomique faisait rapidement place nette à ce qui les réunissait le plus. On allait dire aux… choses sérieuses ! Parce que les « choses sérieuses » précisément n’ont rien à voir. Ni avec l’action syndicale que doit incarner le premier, ni avec le souci de promotion et de développement de l’entreprise économique qui doit guider le second. Sinon, les Algériens n’auraient pas eu à vivre cet étrange compagnonnage venu de nulle part. Ils avaient en partage Bouteflika et ce qui « allait avec » et ce jour-là, ils se sont encore sentis obligés de nous dire, dans le ricanement et l’emphase, que les choses ne vont pas changer de sitôt. Ce jour-là, il était dans l’air du temps qu’ils « demandent » à Abdelaziz Bouteflika de briguer un cinquième mandat et il ne devait pas y avoir grand monde pour en être surpris. Ils ont fait mieux. Ou pire, puisque dans le cas précis, les deux termes peuvent miraculeusement avoir le même sens. Ils lui ont demandé de « continuer à être Président » en nous expliquant que cela relevait de l’évidence. Comme ils ne voyaient pas ce qui pouvait vraiment les retenir, ils ont poussé ça jusqu’au bout. Ils nous ont dit que le 18 avril allait être une… formalité, qu’ils pensaient plutôt à la fête et aux agapes qui allaient s’ensuivre. Ils n’imaginaient pas une seconde que quelques semaines plus tard, le monde Algérie allait glisser sous leurs pieds. Alors que le pays grondait déjà, l’un a été pris dans de ténébreux conciliabules avec celui qui allait diriger la campagne électorale du Président alors « candidat », mystérieusement sur la place publique. Depuis, il s’est éclipsé de la scène en compagnie du premier fusible collatéral des promesses de la colère populaire. Dans la foulée, l’autre pensait s’aménager une honorable porte de sortie en lançant le ballon de sonde d’une « retraite » qui n’avait fait rire personne. Ils ne sont pas seuls à vivre leur « terrible solitude » dans un pays qu’ils croyaient durablement installé à leurs pieds mais les a surpris par la fulgurance de son soulèvement. Ils ne sont pas les seuls, déjà laissés sur le carreau par leurs cercles les plus proches, heureux de s’en tirer à bon compte, parce qu’ils n’ont pas eu la… chance d’être dans le rang des premiers de cordée. Il y en aura d’autres qui vont tenter le sursaut désespéré ou faire le mort. Beaucoup d’autres encore, qui vont partager cette horrible détresse : ils ne sont pas invités à la fête de leur pays.
S. L.

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