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Rubrique Constances

Portraits de braves anonymes

Dans le genre, ils nous renvoient surtout des images inquiétantes. Ils vendent tout, n’importe quoi, partout et dans des conditions souvent loin des recommandations de base. En les voyant sur un bout de trottoir, au coin d’une ruelle ou sur le parking d’une cité, on pense au marchand opportuniste, au larron de toutes les occasions plutôt qu’au brave jeune homme de bonne famille piaillant d’enthousiasme pour se rendre utile à une collectivité en détresse. Lui est visible avec sa petite camionnette qu’on devine Ansej. De ces véhicules qui, à la suite de leurs propriétaires, n’ont jamais eu une bonne réputation. Ils ne l’ont pas toujours volée, leur « mauvaise presse ». Fabriqués par une politique de l’emploi facile et hasardeuse qui leur a donné de l’argent au lieu de leur créer du travail, ils ont acquis ces engins dont ils n’ont jamais su quoi faire. Alors, ils en ont fait ce qu’ils pouvaient parfois, souvent n’importe quoi. Y compris ce qu’il ne faut jamais faire, comme squatter les routes en roulant comme des dingues. C’est un cliché mais c’est comme ça, peut-être qu’ils n’ont pas volé ça, non plus. Depuis que cette saloperie de coronavirus a bouleversé la vie des gens, on l’aperçoit avec sa camionnette. Il ne bouge plus beaucoup comme avant, quand, dans cette activité aléatoire, il faut être vachement mobile pour espérer grignoter des clients et garder un œil vigilant sur les patrouilles de police. Avant, ils n’avaient pas de nom, on les appelait les… camionnettes. Depuis que cette maudite maladie terrorise le pays, il en a un. Dans ce quartier on attend « Farid ». Il vient le matin, avec une variété de légumes et parfois un fruit. Un seul parce qu’il faut surtout proposer l’essentiel. Ne lui demandez pas pourquoi, il sait seulement que la pomme de terre est plus importante que l’orange. Farid porte un masque et, d’un jour à l’autre, ce n’est jamais le même. Rassurant. Il porte aussi des gants qu’il enduit de gel hydroalcoolique dont la bouteille est toujours visible dans un cageot d’oignons ou de courgettes. N’allez pas croire qu’il fait son cinéma d’opportunité. Ceux qui l’attendent aux portes de leur immeuble ou à partir de leur balcon savent sa disponibilité providentielle, ses prix inchangés et sa sollicitude touchante. C’est lui qui insiste pour les tenir à distance respectable de lui et entre eux. C’est lui qui recommande de tout laver à l’eau de Javel une fois à la maison. Et c’est lui qui propose ses légumes gratuitement à ceux qui lui paraissent en difficulté. Il y a combien de Farid dans le pays ? On ne sait pas, il faut compter plutôt les malades, et c’est normal. Quand cette saloperie sera vaincue, il faudra en parler. On n’en parlera pas ? Tant pis, c’est ça les braves sans nom.
S. L.
PS : d’autres portraits de braves anonymes suivront dans cet espace. Avant qu’on n’oublie.
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