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Rubrique Contribution

La PME, le moteur de la croissance et de l’emploi

En cette période préélectorale, de multiples propositions concernant le développement, la croissance et l’emploi sont inscrites dans les programmes des différents candidats à la présidentielle. Sans vouloir porter de jugement sur le contenu de ces différents programmes, il nous semble opportun d’insister sur l’importance de certains facteurs qui déterminent la réussite d’un modèle de développement économique.   
Beaucoup de spécialistes du développement retiennent l’entreprise et le climat des affaires comme des facteurs fondamentaux qui favorisent le dynamisme et l’évolution d’une économie. Ce sont des facteurs clés de succès de toute stratégie économique.
L’entreprise constitue un outil stratégique, vital et déterminant dans toute économie qui se donne comme objectifs un développement réel, dynamique, consistant et durable. Elle est l’instrument incontournable pour la création des richesses d’un pays, pour une croissance continue et soutenue, pour la création d’emplois. 
Les buts recherchés par une entreprise sont multiples. Ils sont déterminés par la stratégie retenue par les managers en fonction des données liées aux capacités de l’entreprise, à ses forces et faiblesses, à son environnement, au marché ciblé et aux caractéristiques de la concurrence. 
L’ambition pourrait être la maximisation des résultats, l’augmentation de la part du marché, l’élargissement de l’activité à de nouveaux segments de marché, l’ouverture vers les marchés extérieurs…Mais le but fondamental et idéal est de préserver la pérennité de l’entreprise et les postes de travail en assurant son maintien sur le marché et en garantissant un résultat positif, suffisant pour doter l’entreprise d’une capacité d’autofinancement suffisante.
Mais l’entreprise évolue dans un environnement. Dans le cas où des conditions liées à la réglementation, à la création d’entreprise, à la fiscalité, aux banques sont réunies, l’environnement peut favoriser l’investissement et contribuer au dynamisme d’une économie. Par contre, un climat des affaires défaillant peut constituer un facteur de blocage, de contre-performances et d’étouffement de toute initiative économique. Les caractéristiques politiques, économiques et sociales d’un pays déterminent la nature du climat des affaires et influent sur l’attractivité d’une économie.
Les lois sur les transactions et le respect des contrats, la stabilité macroéconomique, les équilibres macro-économiques, la flexibilité de l’emploi, la taille du marché, la réglementation relative aux transferts des capitaux, la qualité des infrastructures, la qualification de la main-d’œuvre, la protection de la propriété privée, la fiscalité…, toutes ces données constituent des préoccupations majeures pour tout investisseur.
En général, ces conditions fondamentales constituent des préalables à tout investissement national ou étranger. 
C’est pour cette raison que le climat des affaires est apprécié sur la base d’indicateurs qualitatifs et quantitatifs donnant des informations sur un environnement d’un pays, d’une région ou d’un marché. 
Les indicateurs sont, dans la plupart des cas, mesurables pour favoriser la comparabilité entre les différentes situations. 
Le porteur de projet peut ainsi, d’une part, détecter les marchés qui possèdent les capacités à attirer les capitaux, facilitent la création d’entreprises et permettent d’investir sans contrainte et, d’autre part, éviter les environnements contraignants où la bureaucratie, l’instabilité politique ou économique et la corruption sont endémiques. C’est pourquoi la qualité managériale d’une entreprise et la qualité de la gouvernance d’un pays sont intimement liées. La cohérence et la complémentarité entre ces deux facteurs conduisent à la concrétisation d’un double objectif : 
1. l’entreprise agit dans un environnement favorable, elle produit, crée des emplois, investit et paye ses impôts ;  
2. l’économie du pays se porte bien, le chômage baisse, la croissance et le niveau de vie s’améliorent, les recettes de l’Etat augmentent, la paix sociale est assurée, le gouvernement a atteint ses objectifs les plus nobles. 
La commission de développement chargée par des instances internationales, notamment la Banque mondiale, de réfléchir sur la croissance en analysant l’évolution des pays depuis 1950, nous donne quelques «ingrédients» de la croissance. Ses membres (des économistes prix Nobel et des experts reconnus) arrivent à la conclusion que : la qualité de la gouvernance et la pertinence des mesures prises en faveur des entreprises sont parmi les principaux facteurs qui expliquent le dynamisme de dix-sept pays (Corée du Sud, Taïwan, Chine, Malaisie, Botswana, Oman…) qui ont connu une croissance élevée et soutenue sur une période de vingt-cinq ans.
L’entreprise devrait donc être au centre des préoccupations des dirigeants d’un pays. La récente crise financière a démontré et confirmé le rôle fondamental de l’entreprise dans l’économie nationale, notamment la capacité des PME à redynamiser la croissance et à favoriser la création des postes de travail. 
La PME est l’un des facteurs déterminants dans une économie qui a pour objectif la croissance. Voyons quels sont les critères qui définissent une PME.
Il n’y a pas de définition de PME universellement reconnue, la distinction des PME des autres entreprises repose sur le nombre de salariés, le volume du chiffre d’affaires et le total du bilan. 
Ces seuils permettent également de faire la distinction entre la petite et moyenne entreprise (PME), l’entreprise à taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises. Au sein même des PME, des seuils sont retenus pour classer ce type d’entreprise en : moyenne, petite et micro-entreprise. 
Les données statistiques du ministère des Industries et des Mines indiquent qu’en 2017, le nombre des PME est de 1 060 289 dont 97.7% sont des très petites entreprises (les TPE) avec des effectifs inférieurs à 10 salariés. 
56.94% de ces PME ont un statut de «personne morale» et 43% sont de type «personne physique» et uniquement 0.3 % des PME ont un effectif supérieur à 49 salariés.
Les entreprises qui activent dans les industries de pointe, dans l’innovation et les nouvelles technologies sont rares (dans les pays membres de l’OCDE, 30 à 60% des PME sont des entreprises innovantes).
Une infime partie des PME algériennes arrive à atteindre un chiffre d’affaires supérieur à deux milliards de dinars. La densité des PME exprimée par le rapport (nombre des PME/1 000 habitants) est de 23 en Algérie, un très faible taux par rapport à la moyenne internationale qui est de 45 PME pour 1 000 habitants. Pour être au niveau maghrébin, l’Algérie devrait détenir plus de 1 500 000 PME.
Ces PME emploient 2 601 958 salariés soit 19% du total de la population active. En Europe, les PME emploient 70% de la population active. En France, les PME occupent 48.5% de la population active, fournissent 36% du chiffre d’affaires des entreprises tous statuts confondus et 43.4% de la valeur ajoutée et 15.5% du chiffre d’affaires à l’export.
Le rôle des PME dans les économies européennes est considérable. Dans l’Union européenne, par exemple, 99% des entreprises sont des PME qui emploient plus de 60% de salariés, participent à 53% dans la constitution de la valeur ajoutée et à plus de 45% du chiffre d’affaires.
Ce constat indique que la densité des PME est faible, elles sont, en général, de petite taille, la répartition au niveau national est déséquilibrée, l’industrie manufacturière enregistre un taux assez faible (16%). Les PME ne participent pas assez au chiffre d’affaires total, à la création de postes de travail et à l’export. Elles sont très peu innovantes. 
Ces caractéristiques et données confirment la nécessité de replacer la PME au centre de tout dispositif visant la croissance et le développement. 
Les pays membre de l’OCDE nous donnent une démarche qui peut nous servir d’exemple à étudier. En effet, l’OCDE considère fondamentalement la PME comme «une source considérable d’emplois et de revenus, mais aussi comme un moteur d’innovation et de croissance».
La commission a adopté un «Small Business Act» (loi pour les petites entreprises), en quelque sorte une loi-programme applicable dans tous les pays de l’Union, comprenant des options stratégiques, des mesures concrètes et des objectifs à atteindre selon un échéancier.  Cette approche est crédible et permet une évaluation mesurable pour éviter tout bilan démagogique, comme c’est le cas dans beaucoup de pays en développement.
Le «Small Business Act» vise à faciliter la vie aux PME et placer les besoins des PME dans le centre des politiques de l’Union, conformément au principe : «Penser PME d’abord.» Cette démarche devrait devenir «la norme» dans la définition des politiques économiques des pays européens.
La formule : «l’Europe, c’est bon pour les PME, les PME, c’est bon pour l’Europe», illustre, assez bien, la conviction, la volonté et la détermination de l’Union.
Le «Small Business Act» vise à inciter les pays de l’Union à développer des politiques favorables aux PME.
Nous résumons succinctement les principes retenus par la Commission et les mesures préconisées pour transformer ses principes en actions stratégiques : 
1. créer un environnement favorable à initiative, à la création d’entreprises où l’esprit d’entreprendre est récompensé ;
2. les PME qui déposent le bilan, mais dont la faillite est justifiée, auront des aides pour se relancer ou créer une nouvelle affaire. Une seconde chance est accordée aux gestionnaires ou propriétaires de ces PME en difficulté ou en faillite ;
3. rendre le principe «Priorité aux    PME» effectif par la promulgation d’une réglementation qui agit favorablement sur l’environnement au profit des PME ;
4. assurer la réactivité des administrations aux besoins des PME. Etre attentif à leurs difficultés et réagir efficacement comme soutien permanent aux entreprises ;
5. adapter les outils des pouvoirs publics aux besoins des PME, notamment en leur facilitant l’accès aux marchés publics ;
6. assurer une meilleure exploitation des dispositifs d’aide au profit des PME ;
7. faciliter l’accès des PME au financement par l’amélioration et l’adaptation des différents instruments et en créant de    nouveaux mécanismes ;
8. Faire en sorte que le marché unique soit un espace d’opportunités concrètes pour le développement et l’expansion des PME de l’Union grâce à une meilleure information et concertation sur les marchés ;
9. promouvoir la formation, l’adaptation des qualifications et l’innovation, facteurs déterminants pour l’amélioration de la compétitivité des PME et l’accès aux nouveaux créneaux ;
10. transformer les défis environnementaux en opportunités et non en contraintes ;
11. aider les PME à tirer profit de la mondialisation du commerce en améliorant constamment leur compétitivité et favoriser l’exportation de leurs produits.
Pour concrétiser cette option, la Commission européenne a retenu des objectifs assez précis, par étapes et selon un calendrier pour pouvoir évaluer objectivement les efforts accomplis. 
Certaines actions concernent le court, d’autres le moyen et long terme. Par exemple, réduire les charges administratives des PME de 25%, réduire les délais de paiement dans les contrats des marchés publics, réduire les délais de création d’une PME (objectif : moins d’une semaine), créer des bureaux d’information et de soutien dans les marchés émergents (en Inde, en Chine...) pour faciliter les exportations.
Cette stratégie a également retenu des actions en faveur du créateur d’entreprise, notamment pour compléter sa formation, l’accompagner et l’assister dans la création d’une entreprise innovante. Le but pour les pays européens est de maintenir un niveau de compétitivité assez élevé de leur économie, de la protéger des concurrents extérieurs et de s’accaparer une plus grande part du marché mondial.
Cette conception des problèmes de développement, ses certitudes et la démarche retenue méritent d’être étudiées et adaptées aux spécificités de notre économie.
En Algérie, une démarche similaire vient d’être introduite par la loi 17-01 du 10 janvier 2017 portant loi d’orientation sur le développement de la petite et moyenne entreprise. Elle vise les objectifs généraux suivants :
- l’impulsion de la croissance économique ;
- l’amélioration de l’environnement de l’encouragement de l’émergence des PME notamment innovantes et leur pérennisation ;
- l’amélioration de la compétitivité et de la capacité d’exportation des PME ;
- la promotion de la culture entrepreneuriale ;
- l’amélioration du taux d’intégration nationale et la promotion de la sous-traitance (article 2 de la loi).
A cet effet, la loi dans son article 15 retient des mesures d’aide et de soutien à la promotion de la PME. 
Les principales mesures visent, notamment, la disponibilité de l’information sur tous les aspects qui touchent la vie d’une entreprise, faciliter l’accès au foncier, mise en place de régimes fiscaux adaptés aux PME, développer la culture entrepreneuriale et l’innovation, faciliter l’accès au financement, encourager la sous-traitance, renforcer le dispositif de coordination aux niveaux central et local.
Pour permettre la concrétisation de ces objectifs, la loi prévoit la création d’une agence chargée de la mise en œuvre de la stratégie de développement des PME (article 17 de la loi).
La comparaison entre les deux démarches (européenne et algérienne) montre qu’il y a une certaine similitude dans les objectifs. Mais l’approche retenue par l’Union européenne est plus concrète, explicite, incite à l’action et la favorise (toutes les mesures énoncées débutent par un verbe d’action.). Elle a retenu des objectifs mesurables et programmés dans le temps, ce qui favorise une évaluation permanente et objective.
En Algérie, il y a toujours un décalage énorme entre les options retenues et leur application sur le terrain où la bureaucratie règne en maître. Le passage au concret est difficile et, parfois, les objectifs initiaux sont détournés au profit d’intérêts particuliers qui ne favorisent ni croissance ni développement. 
En outre, la démarche européenne accorde une importance capitale au profit du chef d’entreprise, considéré comme un facteur déterminant dans la gestion et l’évolution d’une entreprise. Aussi, l’accompagnement, le conseil, la formation aux outils de gestion et du management moderne des créateurs d’entreprise et des dirigeants sont des préoccupations majeures du dispositif européen. 
Le promoteur et le manager ont besoin d’outils pour guider leur savoir-faire et mener à bien le lancement d’un projet, gérer convenablement l’entreprise, la rendre rentable et lui assurer son expansion et sa pérennité. 
Günter Venheugen, ancien vice-président de la Commission chargée des entreprises et de l’industrie, qualifiait les entrepreneurs «de l’ADN économique dont nous avons besoin pour développer la compétitivité et l’innovation en Europe». 
Cette formule explique, à elle seule,    la place réservée à l’entreprise et à l’esprit d’entreprendre dans l’économie et    la stratégie économique des nations développées. 
B. L. 
Email [email protected] 

* Brahim Lakhlef est diplômé en économie, auteur de plusieurs ouvrages, notamment : Qualité des institutions, réformes et résultats économiques (ALE-Editions), la gestion d’une entreprise en difficulté (El-Djazaïria-Editions), Le tableau de bord pour piloter votre entreprise (Baghdadi-Editions). 

Sources
B. Lakhlef : Les outils pour bâtir un business plan, 2009 les éditions ALE. Ons.dz 
Sites de l’OCDE et de l’Union européenne

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