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Rubrique Contribution

Révolution algérienne : implantation militaire française 1954/1962

Par Ali Chérif Deroua
Cher lecteur, pour ne pas avoir à  subir les critiques de certains, à savoir privilégier l'action politique, diplomatique ou informationnelle, je change de créneau avec cette contribution. Comme je ne veux pas suivre les «sentiers battus», je vais écrire sur l'implantation militaire française en Algérie durant la guerre de libération. À part les auteurs français qui ont écrit sur ce sujet, du côté algérien, très peu, pour ne pas dire aucun n'a écrit sur les forces de l'adversaire. Certains ont parlé des atrocités, de répression, d'accrochages, de batailles. 

Bref, à mon humble avis, il y a un vide à remplir afin de donner le maximum de données, à même d'aider  le lecteur à se faire sa propre opinion sur le cours de la Révolution, la valeur de ses combattants, sans avoir à diminuer celle de l'adversaire. Bien au contraire. Méditez la maxime de Corneille : «À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.» 
Nous avons tenu tête à  la troisième puissance de la planète en ce temps- là. Nous n'avons pas été vaincus militairement. Nous avons gagné politiquement. L'Algérie est libre et indépendante. Tel a été notre but dans la Déclaration du 1er Novembre. Le but a été atteint. 
Il y a d'autres acquis concrets que je m'abstiens à énumérer pour ne pas avoir à trop glorifier notre RÉVOLUTION, entre autres...!!!
Pour étayer mon écrit, quoi de plus intéressant que d'aligner les déclarations d'acteurs illustres (ce qualificatif va sûrement causer des réactions négatives) de cette guerre, côté français.
À tout seigneur, tout honneur. Le général de Gaulle a fixé les conditions de l'écrasement de la rébellion. Il déclare le 16 septembre 1959 : «On pourrait considérer comme acquis  le retour à  la paix lorsque le nombre des embuscades et attentats mortels serait inférieur à  200 en un an.»
Or, à la fin de 1960, le nombre d'attentats contre les civils se monte à  environ 300 par mois. Le nombre de morts du seul côté français s'élève à 3 700 en 9 mois.
De son côté, le colonel Bigeard déclare en août 1959 devant le général de
Gaulle : «la pacification  semble se dérober comme un mirage, en dépit des progrès indiscutables, à  mesure que le temps passe... Le mal est profond, le cancer bien accroché. La dissolution des katibas de l'ALN éclatées en petits groupes moins vulnérables pose problème.»(1)
Enfin, le témoignage du fameux Maurice Challe, général, commandant en chef des forces françaises en Algérie, parlant du Nidham ou organisation politico-administrative (OPA) du FLN : «Leur propagande est meilleure que la nôtre.»(2)
Aux sceptiques, je ne peux dire que ceci : on ne peut être plus royaliste que le roi.
Aussi, permettez-moi  de vous dire, cher lecteur, que vous avez le devoir d'être fier de votre Révolution et de vous rappeler le merveilleux message que nous a légué Didouche Mourad : «Si vous venions à  mourir, défendez nos mémoires.»  Nous avons fait une révolution merveilleuse. Ne l'oubliez jamais. Surtout, ne jugez pas votre révolution, elle n'a rien à voir avec les aléas,les avatars et vicissitudes de la politique ou les ambitions de certains, l'après-indépendance.
Après cette introduction et pour la justifier, je vous dresse un tableau de l'implantation militaire de l'armée française en Algérie.
Au déclenchement de la Révolution, l'armée française en Algérie avait comme effectifs 50 000 soldats, sans compter les effectifs de la gendarmerie, éparpillés sur l'ensemble du territoire algérien. De notre côté, il y avait environ 1 000 combattants répartis  grosso modo comme suit : zone 1 : 350 combattants ; zone 2 : 150 combattants ; zone 3 : 350 combattants ; zone 4 : 90 combattants ; zone 5 : 67. 
Ce qui donne une moyenne de 1 combattant algérien pour 50 soldats français.
L'armée française s'est retrouvée renforcée par l'apport de 100 000 durant l'année 1955. À partir de 1956, grâce à  une mobilisation générale, le total des troupes françaises était de plus de 400 000 soldats répartis comme suit : (3)
L'armée française en Algérie avait divisé le pays en 15 zones militaires
1- Oranie, 5 zones 
Zone Nord-Oranais (ZNO)  5e division blindée, PC à  Nedroma, puis Mostaganem 
Zone Centre-Oranais (ZCO) 29e division d'infanterie PC à Témouchent, puis Bel Abbès 
Zone Ouest-Oranais (ZOO) 12e division d'infanterie, PC à Tlemcen
Zone Est-Oranais (ZEO) 13e division d'infanterie, PC à Tiaret
Zone Sud-Oranais (ZSO) 4e division d'infanterie motorisée, PC à Mecheria puis Saida.
2- Algérois, 4 zones
Zone Ouest-Algérois (ZOA) 9e division d'infanterie, PC à  Orleansville (Chlef)
Zone Est-Algérois (ZEA) 27e division d'infanterie alpine, PC à Tizi Ouzou
Zone Sud-Algérois (ZSA) 20e division d'infanterie, PC à Médéa 
Zone Nord-Algérois (ZNA) 7e division motorisée rapide, PC à Fort-de-l'Eau (Bordj-El-Kiffan)
3- Constantinois, 4 zones
Zone Ouest-Constantinois (ZOC) 19e division d'infanterie, PC à Sétif 
Zone Nord-Constantinois (ZNC) 14e division d'infanterie, PC à Constantine
Zone Sud-Constantinois (ZSC) 21e division d'infanterie, PC à Batna 
Zone Est-Constantinois (ZEC) 2e division d'infanterie motorisée, PC à Guelma, puis Bône (Annaba).
4. Sahara, 2 zones
La zone couvrant le territoire de la Saoura, PC Béchar avec 2 régiments de la légion étrangère 
La zone couvrant le territoire des oasis, PC Touggourt, avec 2 régiments d'infanterie et de méharistes.
Il y a 3 remarques sur cette implantation des forces militaires françaises.
- la zone Sud-Oranais hérite de la 4e division d'infanterie motorisée pour pouvoir contrôler facilement une zone très vaste et surtout pour surveiller la partie sud du barrage électrifié sur la frontière algéro-marocaine connu sous le nom de barrage Pedron, nom du général Pedron, commandant le corps d'armée d'Oran, bâtisseur de ce premier barrage électrifié en Algérie, aussi étanche et meurtrier que les barrages Morice et Challe. Il est très peu cité dans les écrits parus à ce jour. Certains ont tendance à l'occulter de l'Histoire militaire de la Révolution algérienne. Pourquoi ? Au lecteur de trouver la réponse en son âme et conscience. Pour prouver de façon irréfutable le danger de ce barrage, je rappelle que le Colonel Lotfi est mort aux environs de Béchar. S'il a franchi la frontière à ce niveau, c'est que le barrage Pedron était aussi étanche et meurtrier que les autres. Sinon pourquoi ne pas avoir tenté de le traverser plus au nord ?
- la zone Est-Algerois a hérité de la 27e division d'infanterie alpine parce que les autorités militaires françaises ont décidé d'envoyer dans cette zone montagneuse et accidentée des bataillons de chasseurs alpins spécialisés dans la lutte en montagne. 
- la zone Est-Constantinois a hérité de la 2e division d'infanterie motorisée pour permettre de surveiller les deux barrages électrifiés Morice et Challe qui étaient sous pression permanente durant toute la durée de la guerre de libération à cause d'une présence d'une armée de l'ALN des frontières qui représentait un danger potentiel important.
En plus de cette implantation, il y avait des forces d'appoint ou unités de réserve générale : pour l'Algérois, la 10e division parachutiste ; pour le Constantinois, la 25e division parachutiste ;  pour l'Oranie, la réserve de la légion étrangère. Ces unités de réserve intervenaient sur l'ensemble du territoire algérien. À titre d'exemple, le colonel Bigeard a servi à Annaba, Alger et Saïda.
Tous les spécialistes s'accordent à  quantifier une division entre 20 000 et
30 000 hommes.
Prenons une moyenne rationnelle et logique de 25 000 par division. On a, en incluant les deux divisions de réserve de paras, 15x25 000= 375 000.
Plus l'aviation et la marine, on arrive à
400 000, chiffre que tous les experts ont adopté sans compter les forces annexes, gendarmerie, CRS, unités territoriales, harkis... 
En ce qui concerne l'aviation, il y avait en Algérie 700 avions de différents types d'utilisation, chasse, bombardement, surveillance, transport de troupes, et 200 hélicoptères répartis comme suit : 200 avions et 50 hélicoptères par corps d'armée d'Alger, Constantine et Oran et 100 avions et 50 hélicoptères pour les deux départements de la Saoura et des Oasis (Sahara).
Les aérodromes les plus importants étaient Alger Maison-Blanche, Blida Boufarik, Bône les Salines, Teleghma, Oran la Sénia, base aéronavale de Lartiques (Tafraoui), Colomb Béchar, Touggourt et Hassi Messaoud. 
À quoi bon écrire tout ce qui précède ? La suite en sera la réponse.
En Algérie, ironie de l'Histoire, le dernier recensement fait par la France date du 31 octobre 1954, soit la veille du déclenchement de la Révolution.
À cette date, cette implantation militaire obéissait à 3 paramètres ou objectifs :          1- La répartition des troupes était équitablement faite en tenant compte du relief, de la densité de la population, du degré d'implantation des forces de l'ALN, tout en respectant le découpage administratif de l'Algérie.
2- La défense des infrastructures du pays, barrages hydrauliques,  centrales électriques, usines, ponts stratégiques 
3- La défense des personnes et des biens des Européens installés en Algérie dans les villes et dans les campagnes.

Répartition de la population
Dans le Constantinois, avec une superficie de 101 165 km2 et une population de 3 769 000 d’habitants, il y avait une présence militaire de 125 000 soldats.
Dans l'Algérois, avec une superficie de 71 787 km2 et une population de 3 435 341 d’habitants, il y avait une présence militaire de 125 000 soldats.
Dans l'Oranie, avec une superficie de 122 151 km2 et une population de
2 694 088 d’habitants, il y avait une présence militaire de 125 000 soldats.
Soit un soldat pour 30 habitants pour le Constantinois, un soldat pour 27 habitants pour l’Algérois, un soldat pour 21 habitants pour l'Oranie.(4)
Le lecteur peut constater de lui-même et vérifier les chiffres : il y a une différence d'habitants d'un million et plus entre les 3 départements. Cher lecteur, la réponse est simple : l'extermination du peuple algérien durant l'invasion de d'Algérie par les forces coloniales a été plus cruelle dans l'ouest algérien. Que ceux qui ont  d'autres explications s'annoncent et les avancent pour un éventuel débat.
Enfin, je vous signale, pour plus de compréhension, que les 5 zones  créées le 1er Novembre1954, futures wilayas historiques, sont un ancien découpage hérité de la structure d'implantation du PPA/MTLD, parti dont sont issus les 6 ou 9 pères de la Révolution. À chaque lecteur de choisir le chiffre qui lui convient.

Découpage administratif fln
Au déclenchement de la Révolution, il y avait 5 zones devenues wilayas après le Congrès de la Soumman.
Wilaya 1, Aurès ; Wilaya 2, Nord- Constantinois ; Wilaya 3, Kabylie ; Wilaya 4, Algérois ; Wilaya 5, Oranie.
Durant toute la Révolution, les moudjahidine se réclamaient exclusivement du numéro de la wilaya. Pour couper court au régionalisme, il était interdit d'utiliser d'autres appellations que le NUMÉRO de la wilaya.
Cher lecteur, j'espère que ces contributions sont à la hauteur de vos attentes et vous aideront à mieux comprendre.
A. D.

(1) «Challe. Bilan d'une mission». Magazine Historia n°309 avril 1973.
(2) idem.
(3) Pierre Montagnon. La guerre d'Algérie, page 175, éditions Pygmalion. 
(4) Archives recensement Algérie 31 octobre 1954.

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