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Rubrique Corruption

Quand le Gouverneur de la Banque d’Algérie malmène la loi contre le blanchiment d’argent Une amnistie fiscale qui ne dit pas son nom !

A part de nombreux chiffres qu’il a communiqués aux députés sur la situation financière du pays, les propos du gouverneur de la Banque d’Algérie sur la «solution» visant à intégrer l’argent informel dans le circuit bancaire sont presque passés inaperçus ; et pourtant, il propose pas moins qu’une... amnistie fiscale ! Dépassant allègrement ses prérogatives sans que l’Exécutif réagisse. A moins que ce dernier lui ait donné un chèque en blanc…
Selon l’APS (Algérie presse service, agence gouvernementale d’information), la Banque d'Algérie (BA) promulguera incessamment une nouvelle instruction permettant de tracer le mouvement des capitaux et d'identifier leur origine, a indiqué mardi 13 février 2018, à Alger, le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Loukal, relevant que les fonds en circulation dans le marché parallèle varient entre 2 500 milliards de DA et 3 000 milliards de DA. Répondant aux questions des députés lors du débat autour du rapport sur les évolutions financières et monétaires en 2016 et en 2017 à l'Assemblée populaire nationale (APN), M. Loukal a affirmé que cette nouvelle instruction s'inscrivait dans le cadre du renforcement de l'efficacité de la loi en vigueur relative à la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, et qui a connu, selon lui, «une application restreinte».
Le gouverneur de la Banque d’Algérie considère donc que cette loi de 2005 ­— amendée à plusieurs reprises depuis cette date — est actuellement inefficace, sans donner plus de précisions à ce sujet.
A supposer que ce soit le cas, une «instruction» ne peut venir contourner une loi qui a pourtant été jugée «acceptable» par le Gafi (Groupement international intergouvernemental contre le blanchiment d’argent) dont l’Algérie est membre.
Plus grave encore, le gouverneur de la Banque d’Algérie est persuadé que son «instruction» permettra d'identifier le client et l'origine des fonds 48 heures après le dépôt, et ce, à travers «un guichet des renseignements financiers», et que passé ce délai (48 heures) les fonds pourront circuler dans le réseau bancaire ! Comment y parvenir en à peine 2 jours, sauf à fermer les yeux sur l’origine de cet argent ? Et cerise sur le gâteau, «sonnant et trébuchant», «une fois cette instruction promulguée, le client ne sera plus questionné sur l'origine des fonds qu'il souhaite déposer ou retirer». En fait, il s’agit là d’une amnistie fiscale qui ne dit pas son nom. «La procédure sera effectuée par des organes spécialisés», a ajouté le gouverneur de la Banque d’Algérie, relevant que les agents des guichets concernés par le dépôt des fonds suivront une formation spéciale leur permettant de mettre en œuvre les dispositions de cette instruction.
Est-ce à dire que l’on accepte d’abord n’importe quel dépôt d’argent, aussi suspect soit-il, puis on enquête après ?

Intégrer dans le circuit bancaire l’argent des réseaux informels à n’importe quel prix
A noter que la procédure en vigueur au niveau des banques soumet les clients à un questionnaire sur l'origine des fonds lors du dépôt et leurs canaux d'utilisation lors du retrait.
Le gouverneur de la BA a reconnu, à ce propos, avoir été destinataire de plusieurs plaintes de citoyens à ce sujet. Qui sont ces citoyens et quelles sont leurs activités ? Ont-ils demandé une amnistie fiscale ?
Le gouverneur de la Banque d’Algérie n’en dira pas plus… Toujours selon l’APS, la nouvelle instruction s'inscrit en outre dans le cadre des actions menées par la BA pour attirer la masse monétaire circulant dans le marché parallèle vers le circuit bancaire, estimée entre 2 500 milliards de DA et 3 000 milliards de DA, tandis que le restant de la masse monétaire en circulation hors circuit bancaire estimée entre 1 500 milliards de DA et 2 000 milliards de DA est thésaurisé par les privés, opérateurs économiques et ménages. M. Loukal a indiqué à ce propos que les banques allaient orienter leurs stratégies vers la mobilisation de ces épargnes thésaurisées à travers plusieurs mesures dont la proposition de prix adéquats, la prise en compte des taux d'inflation, la modernisation de la médiation bancaire, la diversification des services et produits bancaires et le développement des systèmes de paiement.
Si la Banque d’Algérie au regard des lois en vigueur est réputée indépendante, dans les faits, cette «indépendance» est tributaire de l’Exécutif.
Ce dernier a visiblement donné un quitus au chef de cette banque à l’effet de tenir pareils propos. Le gouvernement n’aurait donc pas le courage politique d’assumer une amnistie fiscale en bonne et due forme… Il est à parier que le FMI et la Banque mondiale ne sont pas étrangers à l’idée d’une pareille «instruction».
Décidément, tout se fait en cachette !
Djilali Hadjadj

 

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