Pour la première fois, en vingt ans de carrière, Ali Amran a animé un méga-concert à Alger. Le chanteur kabyle de pop-rock n’a eu aucun mal à remplir les 1 400 places de l’opéra de Ouled Fayet qui a accueilli cet événement organisé par une boîte privée.
Ali Amran est, sans doute, l’une des figures incontournables de la chanson kabyle moderne. Au fil de ses cinq albums, il a réussi à s’imposer sur la scène musicale locale et internationale par une recherche rythmique et mélodique exigeante, des textes engagés et fouillés, et un apport considérable à l’enrichissement et la modernisation de la chanson kabyle.
Pour son concert algérois inédit mercredi soir, Ali Amran a choisi de le chapitrer en hommage à la révolution en cours en Algérie et d’introduire plusieurs chansons en établissant un lien entre leurs thématiques et le soulèvement populaire. D’ailleurs, le chanteur a tenu, dès les premières minutes du gala, à rendre hommage au militant des droits de l’homme Kamel Eddine Fekhar, mort la veille en détention, pour la mémoire duquel il a demandé une minute de silence au public qui s’est empressé ensuite de scander «Pouvoir assassin».
Malgré une sonorisation défaillante en raison de l’acoustique de la salle, inadaptée à la musique rock, Ali Amran offrira aux centaines de personnes présentes un spectacle poétique, politique et lumineux. Passant avec aisance de la chanson pur rock à la ballade, grattant sa guitare, tambourinant sur abendayer ou chantant a capela, il suscitera tour à tour l’émotion, l’enthousiasme, les danses endiablées et les youyous.
Autour de lui, des musiciens de haute voltige : Youva Sid, le virtuose de la guitare électrique, l’indispensable Daniel Largent à la basse et Frank Montégari, incontrôlable à la batterie. Ensemble, ils feront preuve d’une grande générosité durant plus de deux heures, traversant les cinq albums et notamment le dernier, Tidyanin, sorti en octobre 2018.
Les chansons à textes alternent avec des titres beaucoup plus rythmés, remplissant durablement la piste de danse et entraînant le public dans une ambiance électrique où Youva ne se fera pas prier pour s’élancer dans des improvisations hallucinées.
Une réussite totale, qui doit beaucoup à un public chaleureux et parfaitement en symbiose avec l’artiste mais, surtout, à une performance scénique collective fondée sur la complicité, le professionnalisme et l’art du live.
Sarah H.
