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Rubrique Culture

La statue d’Aïn El Fouara «restaurée» Une transfiguration qui interpelle

Le ministre de la Culture, accompagné d’une délégation officielle et d’une équipe de journalistes, a procédé samedi au dévoilement de la statue d’Aïn El Fouara, vandalisée en décembre dernier par un salafiste de la région qui parvint à détruire une partie du visage et du buste, avant d’être appréhendé par les passants et les agents de police. 
«Diagnostiqué» très vite comme étant un déséquilibré mental, l’auteur des faits avait bouleversé l’opinion publique algérienne et suscité l’incontournable polémique entre supporters et indignés. 
Une députée avait même suggéré à l’Assemblée de «cacher» la statue dans un musée en raison de son corps dénudé, ce à quoi le ministre de la Culture avait répondu fermement, en arguant que ce sont les idées des fondamentalistes qui ont leur place au musée. Durant sept mois, une équipe s’est attelée à la restauration de ce monument emblématique de la ville de Sétif, sous la direction de l’archéologue Abdelkader Bensalah. Résultat des courses : l’œuvre de Francis de Saint-Vidal (1898) trône de nouveau sur la fontaine du même nom au centre-ville de Sétif, mais elle n’est plus tout à fait la même ! Malgré l’atmosphère de joie et de congratulations qui règne sur les réseaux sociaux et les médias à l’occasion du retour de la «Dame de marbre», il n’est pas évident de fermer les yeux sur ce qui s’apparente à des ratés considérables dans le travail de restauration. 
Refaite entièrement à neuf, la statue arbore désormais une blancheur immaculée et ne porte plus aucune trace de la vieille pierre qui a résisté durant 120 années aux assauts du temps et des hommes (Aïn el Fouara a été vandalisée une première fois à la dynamite en 1997). Restaurée ? Rien n’est moins sûr puisqu’en plus d’une transformation fondamentale, la statue a également perdu ses traits ! 
En effet, la morphologie du visage se révèle aujourd’hui complètement changée. De petits yeux bridés et quasi inexpressifs ont remplacé les grands yeux au regard lointain ; la forme du visage s’est allongée et la chevelure «relookée», etc. 
Bref, on reconnaît difficilement la sainte patronne de Sétif qui semble avoir fait les frais d’un travail de restauration peu rigoureux puisqu’on semble avoir accordé peu d’intérêt à l’obligation de rester fidèle à la morphologie et la plastique originelles de l’œuvre. Cela permet sans doute de poser la question sur la pratique en Algérie de cette discipline fondamentale pour les arts plastiques : comment et sous le contrôle de qui s’effectue ce genre de travaux dans les musées du pays ? Le respect des critères et modes d’action est-il toujours garanti ? Les personnes chargées de ce travail sont-elles dûment formées ? Toutes ces questions sont posées depuis plusieurs années dans le milieu artistique, notamment à la constatation des résultats aléatoires de restauration de tableaux de maître algériens. La dernière exposition du Mama «Patrimoine pictural» laisse, en effet, voir quelques carences au niveau du choix des matériaux et notamment l’usage immodéré du vernis. 
Sarah H.

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