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Rubrique Ici mieux que là-bas

Comment dit-on pardon en langue de bois ?

Bouteflika est parti… A petits pas, si on ose dire ! Il s’est cassé par la petite porte, le comble pour celui qui voulait forcer avec panache et flamboyance l’entrée du paradis. Celui qui voulait, de force, graver son nom dans les tablettes de l’Histoire s’en trouve effacé comme une faute d’orthographe.
Il s’en va sous les quolibets. Ses portraits glorificateurs du zaïmisme new-look, omniprésents pendant deux longues décennies, finissent tristement dans les poubelles. Qui l’eût cru ? Vingt ans de règne absolu qui s’effilochent dans la déroute et dans la panique de ses courtisans, voilà le résultat.
Dans une sorte de crédulité née d’une quasi-divinisation, avec l’aide de supporters et de serfs particulièrement zélés, il est parvenu à faire accroire qu’il était là pour… l’éternité. Lui, pas bouger ! Lui, inamovible, faisant passer le sceptre à la descendance ou la collatéralité. Mais là, toujours là !
Il semblait voué à recevoir un culte à célébrer, ce dont ne se sont pas privés ses zélotes. Ce n’est pas pour rien qu’un type propulsé responsable du FLN de la déroute a cru voir en lui un homme envoyé par Dieu pour réformer l’Algérie. Pas moins !
Ce n’est pas pour rien non plus, pour rester dans le registre métaphysique, qu’il a fait construire, sur les deniers publics, la plus grande mosquée d’Afrique. Cette œuvre pharaonique devait témoigner de la démesure messianique de son destin. Mais plus encore que ceux de Dieu, les desseins du peuple sont impénétrables. Et voilà !
L’ivresse du pouvoir est incontrôlable. Ça rend la chute d’autant plus pitoyable. La dégringolade entraîne la cohorte de  sbires et d’obligés matois. Les proconsuls d’hier, les spadassins, les janissaires de Bouteflika, tout ce beau monde qui grenouillait dans l’impunité et l’ostentation, tenant en otage un pays qu’ils ont pillé et clochardisé, essayent de passer inaperçus aujourd’hui. Ils essayent de rejeter sur l’autre la responsabilité du chaos.
Bouteflika, comme clef de voûte du système, a une responsabilité personnelle dans la dégradation générale de l’Etat et du pays tout entier. Mais il n’est pas le seul. Il y a réellement une responsabilité du système. Et c’est le problème que pose le changement. Peut-on passer à autre chose en ayant sacrifié juste la tête de gondole mais en gardant, corrosifs, les mêmes ?
Si Bouteflika ou ses ouailles a décidé de demander pardon, c’est qu’il y a des raisons. Beaucoup de personnes ont répondu à sa missive pitoyable. Faut-il en ajouter un couplet ?
Allez, juste pour le fun… D’ailleurs, à propos de cette lettre de demande de pardon au peuple algérien, on ne sait trop s’il vaut mieux en rire ou en pleurer. Sincèrement.
Comment celui qui avait la morgue de menacer de rentrer chez lui et de laisser les Algériens à leur médiocrité, peut-il reconnaître qu’il a failli au point de demander pardon ? Première question ! Insoluble !
Comment celui qui a osé mettre en avant de piètres personnages comme Saâdani, Ould-Abbès, Ouyahia et osé écarter, briser des cadres compétents et patriotes du seul fait qu’ils refusaient de faire allégeance, peut-il avoir l’audace de venir demander l’absolution pour les méfaits commis au détriment du peuple et du pays ?
Pour en arriver là, il a fallu une mobilisation monstre et trois syllabes : Dé-ga-ge. Il a fallu qu’il montre que plus qu’un AVC, ce dont il souffrait le plus, c’est la maladie du pouvoir.
Pour celles et ceux qui ont vécu l’ère Bouteflika dans l’humiliation, parfois même la honte d’être algérien, il a, en effet, beaucoup de choses à se faire pardonner. Il a à demander pardon, et pas seulement à celles et ceux à l’égard de qui il aurait « sans le vouloir manqué à (son) devoir ».
Il devrait demander pardon aux martyrs du Printemps noir, ces jeunes fauchés à la fleur de l’âge par les tirs des gendarmes pour avoir revendiqué trop tôt ce que le peuple algérien exige aujourd’hui en masse.
Il devrait demander pardon aux familles brisées par ces assassinats. Aux mères éplorées, aux pères hébétés, aux fratries décomposées, à tous ceux qui ont perdu espoir !
Il devrait demander pardon aux milliers de jeunes harragas avalés par la Méditerranée par la faute du pays irrespirable qu’il a érigé. Ces centaines de morts sont comme les taches ineffaçables d’un bilan calamiteux.
Il devrait demander pardon aux familles des victimes du terrorisme islamiste qui ont subi l’humiliation d’être narguées par les assassins des leurs, réhabilités par la politique de réconciliation nationale.
Il devrait demander pardon à Mohamed Benchicou injustement emprisonné pendant deux ans pour avoir exercé son métier de journaliste critique. Il devrait demander pardon à l’équipe du journal Le Matin dont le titre a été pulvérisé par l’arbitraire.
Il devrait demander pardon à tous les Algériens jetés en prison pour avoir revendiqué la justice, le pluralisme, la démocratie, la tolérance et leurs droits.
Il devrait demander pardon à tous les Algériens, avilis de voir leur pays devenir le paradis de tous les truands, ceux de la politique et les vrais de vrai, ceux des scandales bancaires, de la corruption, du trafic de cocaïne et on en passe.
Il devrait demander pardon aussi d’avoir perpétué et rendu encore plus efficace un système qui a déglingué le pays.
Il devrait enfin — et surtout — demander pardon de la langue de bois obséquieuse qu’il utilise dans cette lettre de demande de pardon qui respire l’inauthenticité.
A. M.

 

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