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Rubrique Ici mieux que là-bas

Où est donc passé Bouteflika senior ?

On ne sait pas trop comment s’acquiert la crédibilité en politique. On sait encore moins qui est habilité à la délivrer. En fait, elle doit provenir de la jonction d’un ensemble de facteurs basés sur des faits et des comportements mais elle s’appuie sur quelque chose de subjectif. Lorsqu’une société fait confiance à une personne, c’est que son intelligence collective a décelé en elle les éléments qui la satisfont.
Ce petit préambule relativement oiseux, je le concède, pour m’étonner que des personnes censées lire dans la complexité du monde, habituées aux arcanes de la politique sous tous les cieux, ne voient pas l’énormité de ce qu’elles acceptent. Comment des individus qui se posent en défenseurs du mouvement citoyen du 22 février peuvent-ils être frappés de cécité au point de ne pas distinguer que ce qu’on leur demande est voué à l’échec et qu’ils vont finir par perdre le peu de crédit qui leur reste ? Accepter de figurer dans le « panel » (quel drôle de mot !), si décrié par des millions d’Algériens, c’est du suicide garanti. Que des fossiles politiques s’y collent pour recouvrer un chouia de complément d’âme, ça se comprendrait. Mais des gens sérieux ou perçus comme tels ?
Je sais. Il y a des listes incommensurables d’arguments de bon sens. Il faut, tout de même, finir par dialoguer. Le pays est en danger, le ministre russe des Affaires étrangères dévoile qu’il y a un plan contre l’Algérie. Et j’en passe !
Mais quand bien même ce serait le cas, il faut organiser la défense du pays avec les Algériens. C’est absurde de répondre à un danger contre le pays par... une élection présidentielle, refusée par le peuple. Le mouvement, qui n’a pas été dissous dans les vapeurs caniculaires d’un été particulièrement torride, a pris une telle ampleur, une telle maturité que les manifestants ont franchi une nouvelle étape dans la détermination. A Alger, au 26 ème vendredi, ils ont pu faire libérer du commissariat un manifestant interpellé. Ce n’est pas la première fois, certes. La chose est arrivée à Tizi-Ouzou où la pression déterminée des manifestants est parvenue à faire fléchir la volonté des forces de l’ordre de régler le problème du mouvement populaire par la répression. Mais que ça arrive à Alger et dans un des commissariats les plus durs prouve qu’on passe vraiment à la phase supérieure !
Je suis en train de lire la réédition, plutôt actualisée dans le sens du buzz, du livre consacré par Khaled Nezzar à Bouteflika. Paru d’abord en 2003, ce bouquin vient d’être réédité par les éditions Chihab sous le titre dans l’air du temps d’aujourd’hui : Bouteflika, la faillite annoncée.
Khaled Nezzar, qui est lui-même au cœur d’une autre actualité, s’explique sur le retour de ce livre dans les librairies. Il ne voit aucune entrave à la morale ou à l’éthique en le ressuscitant. Pourquoi pas ? Sauf que, maintenant, tomber à bras raccourcis sur Boutef est à la mode et que ça n’entraîne aucune peine de prison contrairement au cas Mohamed Benchicou lorsque Bouteflika, avec le soutien de l’armée, était au zénith.
Bref, pour le reste, c’est plutôt du bon Nezzar. Pugnace, querelleur en diable, sachant utiliser une plume sous forme de scalpel qui scarifie littéralement sa cible. Bouteflika en sort en lambeaux. Nezzar reconnaît même quelques erreurs d’appréciation de sa part. On est sur le bon chemin de la résilience ?
Justement, on se demande ce que devient Bouteflika. Pas la photocopie du frère, mais l’original, l’ex-Président lui-même. Pendant que tous ses proches et même quelques-uns de ses adversaires politiques partagent les mêmes geôles, lui, on l’a perdu de vue. Il passe de l’omniprésence insupportable à l’absence absolue. Pourtant, on aurait eu besoin de savoir, un tantinet, ce qu’il advient de l’auteur principal de ce chaos. En jetant en prison tout ce beau linge, c’est, en fait, le procès d’une époque qui est enclenché. Mais comment peut-on incriminer les saints en épargnant le bon Dieu ?
On en revient à cette histoire de crédibilité. Une démarche est crédible aussi par sa cohérence. Ce n’est pas vraiment le cas ici !
Même dans l’état de santé qui est le sien, l’ex-Président aurait sans doute bien des choses à raconter. Il dédouanerait peut-être quelques-uns de ceux qui l’ont suivi et qui ont exécuté ses ordres, pris des mesures sous son autorité. Il situerait les responsabilités des uns et des autres.
Le fait qu’il soit épargné renseigne sur la nature de la démarche.
Ah oui, il y a quelques années, nous nous étions amusés à recenser les différents Présidents qui se sont succédé à la tête de l’Algérie et à décrire la façon dont ils sont arrivés au pouvoir et celle dont ils l’ont quitté. Ben Bella arrive par un coup d’Etat et part par un coup d’Etat. Boumediène arrive par un coup d’Etat et s’en va par un coup du sort. Chadli arrive par un coup d’Etat de l’armée qui l’adoube et s’en va par un coup d’Etat de l’armée qui le déboulonne. Zeroual arrive sur les baïonnettes de l’armée et démissionne sans doute à cause de ces mêmes baïonnettes. On se demandait comment allait finir Bouteflika. Eh bien, imposé en 1999, il fallait attendre 2019 pour découvrir qu’il est le premier Président à être élu dans un « scrutin loyal » pour une fois, mais à l’envers. Il a été dégommé par le peuple et sans les urnes.
A. M.

P. S. : Ouf ! Heureusement qu’il y a, de temps en temps, des haltes pour reprendre son souffle. On se retrouve, ici, si vous le voulez bien, dimanche 14 septembre. On va recharger un peu les accus.

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