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Rubrique Kiosque arabe

C'est moins bon, quand c'est pire !

Il paraît que les Américains ont envoyé des observateurs pour vérifier que le scrutin présidentiel en Égypte se déroulait dans les meilleures conditions d'honnêteté et de transparence. Comme lesdits observateurs n'ont encore rien dit, il faut sans doute convenir que l'élection de Sissi est exempte de fraude, c'est du moins ce qu'affirment les médias égyptiens. On ne peut pas les contredire sur le déroulement des élections, mais il reste beaucoup à dire sur les conditions dans lesquelles elles ont eu lieu et sur le choix du concurrent Sissi. Trump qui est à la démocratie américaine ce que Custer était aux Indiens Sioux devra donc se résoudre à accepter le chiffre de 96,5% des suffrages obtenus par Sissi. Cela ne correspond pas tout à fait aux normes américaines, en la matière, mais Trump n'est certainement pas dupe des conditions de préparation du scrutin qui ont rendu possible ce résultat. Au final, tout le monde y trouve son compte, et au premier chef le peuple égyptien qui a voté, pour ainsi dire, les yeux fermés et pense trouver en Sissi le chef qu'il cherche en vain depuis Nasser. Reste à savoir si le Président réélu pourra troquer son bâton de maréchal contre la houlette du berger, lui qui semble être plus enclin à tracer des plans sur la comète qu'à agir.
Peut-on reprocher aux Égyptiens d'y croire, alors que nous avons opté le plus souvent pour le moins mauvais pour éviter le pire, et pour une longue détention, comme substitut à la perpétuité ? Certes, Sissi a obtenu un score de despote annoncé, mais il suffit de regarder vers Ankara ou vers Doha pour voir que la promesse du pire vient des projets d'Erdogan et de Karadhaoui. Souvenons-nous : c'est ce dernier qui avait mené campagne sur les antennes d'Al-Jazeera pour l'élection à la tête de l'Égypte de Mohamed Morsi, issu comme Karadhaoui du mouvement des Frères musulmans. Selon le message immuable en terre d'Islam, des intégristes de l'Islam, le cheikh avait affirmé que voter pour Morsi, c'était complaire à Dieu et choisir un autre que lui serait une faute répréhensible. «Tout Égyptien qui craint Dieu et cherche à mériter la grâce divine doit choisir Morsi, parce qu'il établira la justice sur terre», avait-il ajouté. On sait de quelle manière Morsi a accompli sa mission divine, en commençant par nommer les militants de son parti, y compris les plus violents à la tête des gouvernorats et des médias. Résultat de cette politique de charité bien ordonnée qui commence par soi-même : Morsi a été destitué le 3 juillet 2013 par l'omniprésente armée égyptienne et il a été remplacé par le ci-devant et triomphal Sissi.
Du côté de l'autre soutien principal des Frères musulmans, à savoir Ankara, Erdogan qui n'a rien à envier à Sissi, en matière d'autoritarisme, massacre des Kurdes en Syrie, mais s'émeut qu'Israël en fasse autant avec les Palestiniens. Avec le conflit syrien, le Président turc, si populaire chez nos intégristes qui rêvent de califat, a révélé ses accointances avec les milices djihadistes, et l'ALS fantoche. Il ne serait pas étonnant qu'on apprenne un de ces jours que le «calife» Baghdadi s'est réfugié en Turquie, terre de passage et de repli pour les intégristes engagés contre Damas. Quant à l'élection de Sissi, seuls quelques médias à la botte, s'il en reste encore qui ne le sont pas, ont emboîté le pas aux Frères musulmans et crié à la fraude et à la farce électorales. En Égypte même, cependant, la gravité du moment et l'allégresse des vainqueurs (partagée par 100% des 96,5% des votants) n'ont pas découragé les manifestations d'humour local. Dès le premier jour du scrutin, des informations faisaient état de la présence de bulletins sur lesquels les noms de Sissi et de Moussa, son concurrent, avaient été remplacés par celui de Mohamed Salah. Dans l'atmosphère de liesse qui a accompagné la qualification de l'Égypte pour le Mondial, l'apparition de Mohamed Salah, idole du moment, sur des bulletins de vote ne serait pas une surprise.
La presse sportive européenne, envoûtée par le meilleur buteur de Liverpool, aurait cependant quelque peu exagéré en parlant d'un million de bulletins de vote portant le nom de Mohamed Salah. C'est du moins l'opinion du célèbre chroniqueur de télévision égyptien, Amr Adib, qui a ironisé sur l'énormité du chiffre avancé, mais tout en reconnaissant que c'était du domaine du possible. Mais comme on est en Égypte et que l'arme de la justice est souvent dégainée par des Lucky Luke en puissance, il a simplement souhaité qu'il n'y ait pas de poursuites contre Mohamed Salah. Amr Adib pensait certainement à la plainte déposée par un avocat contre l'acteur Omar Waked, accusé d'avoir émis des doutes sur la validité du scrutin présidentiel. L'homme de loi Aymen Mahfoudh a demandé une enquête urgente sur les propos tenus par l'acteur sur son compte Twitter et qui sont susceptibles de «provoquer du désordre». Rien que ça ! Mais en parlant du pire, il y a mieux, si l'expression est permise : un autre acteur très populaire et qui joue souvent les rôles de méchant dans les feuilletons, Nabil Halfaoui, a écrit sur le même site : «Celui qui est contre Sissi n'est pas un traître. Mais celui qui est contre le pays, parce qu'il est contre Sissi, celui-là est un traître.»
Cet acteur, effectivement beaucoup moins séduisant que son confrère, a déjà dressé l'échafaud et tressé la corde pour Omar Waked. L'Égypte, c'est bien et même un peu mieux que nous, mais c'est moins bon quand c'est pire !
A. H.

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