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Rubrique Kiosque arabe

Mais, n'oubliez pas le pacte du Quincy !

Il fallait sans doute procéder comme ça : «détrumpiser» la Maison-Blanche en commençant par le «maillon faible», et dans la chaîne des amitiés étrangères US, ce maillon porte un nom arabe. La disgrâce du prince Mohamed Ben Salmane qui était dans l'air, bien avant l'élection de Joe Biden, en remplacement de Trump, meilleur ami des Saoudiens, serait donc bien enclenchée. Le premier coup a été porté, la semaine dernière, quand les Américains ont fait savoir, par les canaux habituels, que l'actuel homme fort de Riyad ne serait plus leur interlocuteur privilégié. Puis, le coup de grâce a suivi, vendredi dernier, sous la forme d'un des procédés habituels des services secrets américains qui consistent simplement à officialiser une information qui était déjà archi connue. À savoir qu'après enquête de la CIA, il est établi, désormais, que Mohammed Ben Salmane a trempé dans l'assassinat, en  2018 à Istanbul, du sulfureux journaliste saoudien Jamal Khashoggi. Ce dernier avait été attiré à l'intérieur du consulat saoudien à Istanbul, et avait été assassiné dans des conditions effroyables, comme l'attestent les images vues dans le monde entier. Ce qu'il y a de remarquable dans ce rapport de la haute autorité qui coiffe tous les services secrets américains, dont la CIA, c'est qu'il  justifierait presque l'assassinat en question.
L'infortuné Khashoggi qui aimait tant les États-Unis, mais beaucoup moins qu'il en était aimé, aurait mérité un peu mieux que cette épitaphe qui dit : «Le prince héritier d'Arabie Saoudite a validé une opération à Istanbul, en Turquie (c'est vrai que les Américains ne sont pas forts en géographie), pour capturer ou tuer le journaliste saoudien Jamal Khashoggi». Ils disent bien «capturer ou tuer», ce qui peut laisser supposer que le commando chargé de la sinistre besogne aurait pu avoir uniquement pour mission de le capturer, mais il y a eu dérapage. Et nous savons qu'en matière de dérapages, les services secrets américains, et la CIA en particulier, n'en sont pas à leur coup d'essai. Mais admirons la suite qui arrive juste derrière : «Le prince héritier considérait Khashoggi comme une menace pour le royaume et plus largement soutenait le recours à des mesures violentes si nécessaire pour le faire taire.» La raison d'État, vous connaissez ! Si un opposant est susceptible de représenter une menace pour le pays, alors l'autorité de ce pays, MBS en l'occurrence, peut et doit même, en cas de nécessité, éliminer la menace. On connaît déjà la ligne de défense de Mohammed Ben Salmane, si à Dieu ne plaise, il devait être déféré devant une juridiction pénale nationale ou internationale. 
C'est la règle du sujet dans le système politique américain: un Président élu peut défaire ce que son prédécesseur a fait, même si c'est une œuvre d'utilité publique, profitable et populaire. Au regard de son successeur, la grande erreur d'Obama avait été d'instituer un système de sécurité sociale, pour permettre aux plus pauvres, c’est-à-dire au plus grand nombre, de se soigner. Dès qu'il a mis le pied à la Maison-Blanche, Trump s'est empressé d'enterrer la seule réalisation positive d'Obama, ce qui a sans doute contribué à aggraver le bilan de la pandémie de Covid-19. Si on devait répertorier les plus grosses fautes de Trump, on y passerait l'année, et c'est sans doute devant les difficultés à surmonter que les sénateurs américains ont renoncé à le destituer. Plus retors et plus méthodique, Joe Biden n'a eu qu'à regarder sous le coude de Trump et à récupérer un document que ce dernier se refusait à rendre public, le rapport concernant MBS. Ce qui est avantageux pour le nouveau Président démocrate, c'est que la divulgation du fameux rapport secret peut et devrait relancer la machine à ennuis judiciaires contre Donald Trump. Ce qui se suppose de nouvelles questions et des accusations du fameux pactole offert en cadeau de bienvenue au Président républicain à toutes les bonnes affaires qui ont suivi. 
On a dit de Joe Biden qu'il avait des difficultés de mémoire, mais c'est oublier que les institutions américaines, dont les services, en ont, et avec un pouvoir d'investigation, en plus. L'armée de chercheurs et d'enquêteurs que compte Washington saura bien dénicher encore quelques poux suspects sous la moumoute de Trump et menacer à la longue ses espoirs de revanche. Malgré son souci de redorer l'image de son pays, assez écornée par l'action de Trump, Joe Biden pourrait être tenté d'ordonner une enquête plus approfondie sur le meurtre de Khashoggi. En attendant, le nouvel élu démocrate a en tête le souci de ménager son partenaire saoudien, puisque avant la divulgation du fameux rapport, il s'est entretenu avec le roi Salmane. On ne saura pas grand-chose de cet entretien, si ce n'est l'allusion aux droits de l'Homme et à la répression des oppositions au sein du royaume wahhabite, mais il faut sauver l'essentiel. On sait que l'alliance entre les États-Unis et Israël est aussi solide que celle conclue, au nom de ce dernier, entre Dieu et Moïse, sans la crainte des adorateurs du veau d'or, déjà acquis. Celle conclue entre l'Amérique et l'Arabie Saoudite n'est pas aussi éternelle que l'autre, puisqu'elle est renouvelable tous les soixante ans, mais la reconduction est tacite et Khashoggi est mort. Il ne faut jamais oublier cette alliance scellée entre Roosvelt et Ibn Seoud et passée à la postérité sous le nom de «Pacte du Quincy», le croiseur US à bord duquel il a été signé. 
Cela s'est passé le 14 février 1945, le jour de la Saint-Valentin: les Américains ont sans doute oublié de signaler ce détail à leur nouveau partenaire, si tant est qu'il l'ignorait. À moins d'une répudiation brutale par l'usage de la triple formule mise à l'encan, ailleurs, par le simple sacrifice d'un bouc, un mariage conclu à la Saint-Valentin a aussi l'éternité pour lui. 
A. H. 

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