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Rubrique Le Soirmagazine

ATTITUDES Gentleman

La rue que je trouvais ce soir-là particulièrement éclairée  par les devantures des magasins grouillait encore de monde, même si le soleil a décliné depuis un petit moment.  Une température douce régnait cependant sur cette rue d’Alger en ces jours de novembre. Le froid glacial qui nous a fouettés il y a à peine quelques jours s’est offert une pause.
Avant de lever l’ancre, je décide de me faire un petit plaisir. J’entre dans un café chic qui me rappelle ceux de l’autre côté de la rive et que j’apprécie beaucoup.  Les clients ne sont pas nombreux et sans doute, comme moi, faisaient une dernière  halte avant de rejoindre les leurs. Deux dames assises non loin de moi attirent mon attention. 
La soixantaine, d’une élégance que je pensais disparue de notre univers, elles papotaient. Elles ont gardé les traits presque intacts de leur beauté d’antan. 
Les cheveux coupés et bien coiffés, elles portaient  des tailleurs qui, loin de marquer leur âge, au contraire les rajeunissaient. Elles sirotaient leur café qu’elles accompagnaient d’une petite gourmandise. Assis non loin d’elles, un jeune homme, la trentaine, avait le nez plongé dans son ordinateur portable.  Quelques paroles furent échangées entre ses voisines, puis, de fil en aiguille, des tranches de vie sont racontées. Il parlait la langue de Molière sans l’écorcher et paraissait d’une correction, je suis tentée de dire séduisante. Moi, derrière, je faisais, comme j’ai plaisir à le dire, «de l’exercice d’observation sociale». Il est marocain, informaticien, installé en Europe et c’est la troisième fois qu’il vient à Alger pour affaire. Elles sont cousines, l’une dirigeant une école d’anglais privée, l’autre, ancienne cadre de l’administration à la retraite. Elles parleront avec nostalgie d’Alger que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître et  lui  proposèrent  quelques endroits touristiques à visiter. C’est le Jardin d’essai qu’elles lui suggèrent  en premier. Lui, toute attention, les écoutait non sans exprimer sa joie d’avoir rencontré des dames aussi charmantes. Puis, fermant son ordinateur, il s’excusa, se leva et se présenta, elles firent de même, et, avec un large sourire il dit  : «Excusez-moi, je dois quitter la table, j’ai été  ravi de vous rencontrer, je dois rejoindre des amis algériens au restaurant El-Djnina, que je vais découvrir.»  L’une d’elles lui répondit : «Vous n’allez pas le regretter !» 
Je le  considère, suis ses gestes à la caisse  et  souris au fond de moi.  Elles  ne manquèrent pas d’afficher leur satisfaction de cette rencontre et de cette conversation enrichissante. Quelques instants plus tard, elles se levèrent à leur tour et se dirigèrent vers le comptoir pour payer leurs consommations. «C’est réglé !» leur annonce le patron.

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