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Rubrique Les choses de la vie

Bas les masques !

Je viens de faire un tour dans ces mêmes supérettes que j’ai décrites, il n’y a pas longtemps, comme le dépotoir des sucreries et des breuvages importés de divers pays et exposés au rayon attrape-nigauds des «Promotions». J’y ai constaté un changement radical. Rappelez-vous : les oiseaux de mauvais augure nous prédisaient l’hécatombe dans le cas d’un arrêt brutal de l’importation de tous les produits vendus en ces lieux ! Faux ! D’abord les supérettes sont profusément approvisionnées. Ensuite, tout vient de la production nationale. Les mesures – courageuses — prises par l’actuel gouvernement n’ont pas produit la catastrophe prédite par les experts économiques «biberonnés» aux thèses du néolibéralisme de leurs maîtres occidentaux. Des milliers de petites et moyennes entreprises ont été sauvées de la banqueroute. On enregistre un réel redémarrage de l’industrie nationale et de l’artisanat qui ne savaient plus à quel saint se vouer devant la concurrence déloyale des produits de mauvaise qualité acquis pour quatre sous et revendus au prix fort par une certaine catégorie d’importateurs escrocs (et je ne généralise jamais !). Mais ce redémarrage n’est pas venu du jour au lendemain. Il faut aussi saluer les initiatives prises par le gouvernement précédent qui a compris les enjeux au moment où s’annonçait la funeste crise. Deux ou trois exemples : alors que l’on importait massivement du ciment dont le prix au marché parallèle effleurait les 1 000 dinars le sac, nous voilà exportateurs et le nouveau prix dépasse à peine les 400 dinars ! Autre exemple : la reprise du projet gigantesque de Bellara ainsi que la fin du contrat de la honte avec Arecelor Mittal ont redonné au pays les moyens de s’assurer prochainement l’autosuffisance en rond à béton. Enfin, les efforts consentis au sud du pays ont révolutionné l’approche économique dans cette région vouée éternellement à l’agriculture des dattes et au tourisme. D’abord, un effort sans précédent dans la région de Biskra/ El-Oued a totalement bouleversé l’organisation du marché des fruits et légumes qui ne vont plus du Nord au Sud mais prennent le chemin inverse avec une production continue qui renvoie aux oubliettes les vieilles notions de «primeurs» et de «saison» ! Tout est disponible toute l’année et les prix défient toute concurrence. Sauf que, pour ce dernier point, des énergumènes munis ou non de registres de commerce profitent des occasions religieuses pour gonfler les prix ! Un ami vivant dans un autre pays musulman me disait l’autre jour que les prix baissaient de moitié dès le premier jour de Ramadhan. Comment qualifier ceux qui les font doubler le même jour ? Musulmans aussi ?
Quelqu’un parmi les nombreux lecteurs qui me lisent depuis des années sera certainement surpris par mes propos ici. Habitué à me voir descendre en règle les orientations économiques et les dérives politiques de l’actuelle gouvernance, il trouvera peut-être que je suis devenu complaisant. C’est son droit de faire cette lecture. C’est pourquoi je considère nécessaire de rappeler certaines vérités : quand vous passez votre temps à dénoncer l’importation massive et désordonnée de tout et de rien, quand vous expliquez qu’une partie des sociétés d’import-export n’importe pas pour satisfaire des besoins précis mais le font juste pour bénéficier du taux de change avantageux qui, conjugué au phénomène de la surfacturation, leur permet de réaliser des gains substantiels qu’ils reversent dans le circuit du marché parallèle, quand vous pleurez avec les industriels nationaux et les petits artisans décimés par cette même importation ; quand vous avez dit tout cela en long et en large durant de longues années, quelle réaction devez-vous avoir le jour où des gens tentent de mettre un terme à ce désordre ? Les dénoncer, par «habitude» ou de peur d’être catalogué de «brosseur»? Je ne m’abaisse pas à ces enfantillages et je ne suis pas du genre à écrire juste pour paraître courageux ou pour plaire. Le courage d’écrire a ses moments ! Je comprends que les opposants politiques n’aient pas le droit d’applaudir le gouvernant sinon ils feraient preuve de naïveté politique, mais un journaliste a-t-il le droit de se comporter de la même manière ? Je vais même plus loin : je ne conçois pas mon devoir de journaliste comme une obligation à demeurer objectif en tout lieu et en tout temps. Je ne crois pas d’ailleurs en l’objectivité et même en la «neutralité» du journaliste. J’écris selon mes convictions de gauche. J’écris en relisant à chaque fois les textes fondateurs de la Révolution algérienne et je dévore les engagements socialistes et anti-impérialistes de Larbi Ben M’hidi ! Je soutiens tout ce qui va dans cette orientation-là et je dénonce tout ce qui la contredit, tout ce qui vient des milieux néolibéraux, cette école qui domine la pensée actuelle et fait les beaux jours de beaucoup de journaux et de sites électroniques. Certes, ce pouvoir est engagé jusqu’au cou dans des choix qui vont à l’encontre des recommandations de Larbi Ben M’hidi et l’oligarchie y est superpuissante et très proche des décideurs pour que l’on puisse avoir une quelconque illusion, mais quand un minimum est fait pour la sauvegarde du secteur public, quand l’Etat limite l’importation pour sauver les sous qui restent, je ne peux pas ne pas dire : «persévérez dans cette voie» et c’est ce que je fais !
Je le fais avec insistance parce que ceux qui ont pris cette heureuse initiative doivent être encouragés à continuer, à ne pas baisser les bras, à résister aux pressions de toutes sortes. Un esprit révolutionnaire non pollué par la bureaucratie et l’immobilisme n’agit pas selon les dogmes : il y a la stratégie et la tactique. Stratégiquement, je suis contre l’alliance «patronat-syndicat» qui se fait toujours contre les travailleurs et les options progressistes et je trouve honteux que Sidi Saïd se mobilise pour un partenariat «public-privé» qui n’est qu’une entourloupette pour abattre le secteur public et sucrer les copains ! D’autant plus honteux qu’au même moment, et partout dans le monde, les vrais syndicats bataillent pour le secteur public et les droits des travailleurs menacés par la nouvelle avancée multiforme du capitalisme despotique ! Dans la Tunisie voisine, on assiste à une levée de boucliers des syndicalistes intègres contre les «privatisations» et une véritable mise en demeure a été adressée au pouvoir depuis Sfax. Le chef de l’UGTT ne peut pas, n’a pas le droit d’aider l’oligarchie à s’accaparer des biens du peuple ! Il n’est pas mandaté pour le faire et serait traité de fou s’il venait à encourager les privatisations en se cachant derrière les éternelles justifications foireuses des libéraux ! Ce Monsieur a dit simplement : «Le secteur public est une ligne rouge !» Comme il serait bon d’entendre cela de la bouche du secrétaire général de l’UGTA !
Cependant, quand MM. Ali Haddad et Sidi Saïd se mettent dans le rang des patriotes pour vilipender les organisations étrangères qui menacent notre pays, il est primordial d’être de leur côté et d’amplifier leur voix. Plus nous serons unis, plus ces affameurs des peuples, ces vautours au passé douteux reculeront vite !
Il est d’ailleurs curieux d’assister à un tir groupé de ces malfaisantes associations au moment où nous nous attendions à plus de responsabilité et de compréhension de leur part. D’abord, le FMI, puis la Banque mondiale reviennent à la charge afin de faire avorter les efforts d’autofinancement du redressement économique par la planche à billets. L’objectif est de nous empêcher d’avoir d’autres choix que d’aller chez eux pour des endettements qui nous remettraient sur le chemin de la perte de souveraineté et des problèmes à répétition. Ensuite, revoilà l’Union européenne qui, au lieu de nous remercier d’avoir acheté chez elle pour 220 milliards de dollars contre nos exportations pour 14 milliards, nous menace directement en nous imposant de revoir nos décisions de limitation des importations ! La meilleure réponse serait de lui rappeler que la souveraineté de nos décisions ne se discute pas ! Nous n’avons rien à faire d’accords d’association qui ne profitent qu’à une partie… L’autre, toujours l’autre. Pour ceux qui ont choisi de vivre ici et de bâtir l’avenir de leurs enfants ici, il n’y a pas d’autres alternatives : résister aux assauts de l’extérieur et aux appétits des corrompus et des voleurs de l’intérieur qui, de toute façon, iront se la couler là-bas avec les biens du peuple !
Notre destin a toujours été de résister à la trahison, à toutes les trahisons !
M. F.

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