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Rubrique Les choses de la vie

Qu’est-ce qui a pris Hamel ?

Tout le monde est en train de suivre l’évolution de cette scabreuse affaire de trafic de cocaïne, œuvre d’un importateur devenu un véritable capo avec des ramifications qui atteignent des niveaux insoupçonnables du pouvoir politique. Mais il faudra bien séparer les deux aspects de cette affaire et ne pas aller vite en besogne. Tout d'abord, une saisie d’importantes quantités de cocaïne n'est pas une nouveauté «algérienne». Il faudra impérativement lier cette affaire à la phénoménale prise d'Algesiras, en avril 2018 où pas moins de 8 700 kilogrammes de cocaïne ont été découverts dans des containers en provenance de Colombie. La drogue était dissimulée dans des cartons de bananes. Auparavant, une autre affaire avait défrayé la chronique lorsque les services de sécurité espagnols mirent la main sur 6 000 kilogrammes de cocaïne (décembre 2017) ! Plus proche de nous, la saisie de 2 000 kilogrammes de cocaïne à Tanger, au mois de mai 2018, avait nettement démontré que les grands réseaux de trafic de cocaïne avaient procédé à un changement d’itinéraire. La vigilance des services espagnols, très liés aux agences de renseignement sud-américaines, rendait le «travail» difficile et il fallait trouver d'autres voies.
C’est probablement dans ce cadre des nouvelles routes de la cocaïne qu'entre cette affaire car il est impensable que les 700 kilogrammes allaient trouver preneurs en Algérie. La destination reste l'Europe et d'ailleurs la drogue saisie à Tanger se trouvait dans une remorque en partance pour l’Espagne. Nous pouvons facilement imaginer le scénario : la marchandise est rapidement réexpédiée vers l'Europe via l'Espagne. Quel rôle a joué Kamel le Boucher ? Avait-il des complices ? Quels sont ses liens avec les réseaux étrangers ? N'a-t-il pas déjà fait transiter d’autres quantités importantes, ce qui expliquerait cette soudaine richesse et sa générosité envers des cadres dont la liste n'est pas close ? 
Les autorités ont fait preuve de leur habituel mutisme, ce qui a conduit inévitablement à l’incompréhension, aux doutes et aux rumeurs… Dès le départ, l'information n'a pas été correctement donnée. Les communiqués du MDN, dans leur forme habituelle, louent la vigilance des agents et officiers mais ne donnent pas l’essentiel, ces éléments d’information qui permettent à tout un chacun de se faire une idée précise de l'affaire. Dès le départ, on était en droit de se poser la question de savoir pourquoi la saisie s'est faite en haute mer et par les gardes-côtes de l'ANP. Alertés par les Espagnols, nos services avaient pris le devant pour éviter que l'affaire ne leur échappe. Redoutaient-ils que les complicités commencent à agir au niveau du port d'Oran ?
Dès le départ, on sentait que quelque chose ne tournait pas rond. Car, juste après ce rôle joué par l'ANP dans une affaire qui relevait de la police et de la douane, la justice dessaisissait les juges d'Oran de ce dossier et le confiait à ceux d'Alger. Ça n'a pas d'importance en soi mais l'impact sur l'opinion était désastreux ! Chacun y allait de sa version : «Les juges d'Oran ont été dessaisis parce qu'ils sont honnêtes» ou encore «on n'a pas confiance dans les juges d’Oran car ceux d’Alger sont intègres et efficaces…» Une chose et son contraire. Le flou qui n’aide guère à comprendre. Nous livrons ces avis comme une preuve de la confusion qui règne quand on explique mal les choses. Nous nous garderons bien de tirer des conclusions hâtives, n’étant pas, nous-mêmes, bien informés.
Mon avis personnel et qui ne date pas d'aujourd'hui est que l’armée a fait du bon boulot. Grâce à ses services, un grand réseau de malfaiteurs parmi les plus dangereux vient d’être démantelé. Il faut faire confiance à ces gars reconnus par les grandes agences internationales comme des spécialistes des questions sécuritaires, ayant leurs sources partout au sein des mouvements terroristes et des associations criminelles. Evidemment, le travail des services s’arrête à l’enquête. L'armée ne juge pas les criminels et ne fait pas de politique. C’est probablement pour cela que la rédaction des communiqués est si délicate qu'elle ne va pas plus loin que l'autosatisfaction.
Mais si l’armée a fait du bon boulot, tout le reste ne semble pas avoir été à la hauteur. Le silence assourdissant sur cette affaire aura empêché la nécessaire clarification. Il a fallu attendre plusieurs jours avant que le Premier ministre, le garde des Sceaux et le chef de la police ne s’adressent au peuple. Les deux premiers usent du ton coutumier mais le troisième sort du texte et dit deux choses auxquelles personne n'aurait accordé de l’importance si l'affaire n'avait pas connu un foudroyant développement dans l’après-midi ! M. Hamel a évoqué des dépassements dans l'enquête. Notez bien qu'il a ajouté : «Mais fort heureusement, les juges étaient à l’affût…» Ensuite, il a dit que «celui qui veut lutter contre la corruption doit être lui-même propre». Ces paroles lui ont coûté cher et je ne pense pas que la décision a été prise avec gaieté de cœur. Le gars était un proche du clan présidentiel et certaines sources le créditaient même d'un statut favorable dans la bataille successorale qui s'annonce. Son éviction fragilise El Mouradia et donne une idée de la bataille qui va s’intensifier dans les prochains mois.
Quant aux affaires de corruption, il n’échappe à personne que ce phénomène n'est pas nouveau et qu'il se renforce de jour en jour, menaçant la maison Algérie d'un effondrement total. Les choses sont allées trop loin. Kamel le Boucher n'est pas un cas isolé. C’est l’archétype de ces nouveaux milliardaires qui brassent un argent fou dans des affaires louches, avec l’immobilier comme point de fixation. Les gains sont rapides et il n'y a pas meilleur moyen de blanchir l’argent mal acquis. Dans la situation actuelle, il faut redonner les moyens aux services algériens pour qu’ils poursuivent leur noble mission d’assainissement et de chasse aux réseaux maffieux qui se développent à un rythme extraordinaire. Evidemment, il faudra respecter le droit des mis en cause, travailler sous couverture judiciaire et ne plus recourir aux méthodes controversées du passé. Finalement, et tout au long de ces années, nous avions raison de nous inquiéter des lobbies d’importation qui constituent non seulement une menace sur le plan économique mais peuvent parfois se transformer en danger potentiel pour la sécurité du pays. Les pratiques frauduleuses telles que l’importation de biens inutiles et en grande quantité pour sortir des masses importantes de devises se prolongent parfois par le trafic de la monnaie étrangère qui donne un sérieux coup au dinar sur le marché parallèle. Nous avons toujours fait la différence entre les importateurs honnêtes et cette véritable maffia qui saigne le pays mais force est de constater que les hommes d’affaires intègres exerçant cette activité sont de moins en moins nombreux. Comme nous devons reconnaître que les listes de produits interdits d'entrée en Algérie n'ont pas eu l'effet souhaité sur le volume global des importations. Il faudra nécessairement penser à des solutions plus radicales comme ne financer par les banques publiques que les produits de première nécessité. Tout le reste devra faire l'objet de transactions au niveau du… marché parallèle ! Les barons de Dubaï qui approvisionnent le Square et d’autres hauts lieux du trafic de devises seront pris de court et l'une des premières conséquences sera une revalorisation du dinar dans ces marchés non officiels. Que ceux qui pensent qu'il reste quelque chose à sauver dans cette Algérie de la sinistrose et de la désespérance agissent, tous ensemble, pour empêcher le pire !
M. F

 

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