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Rubrique Les choses de la vie

Sur les hauteurs de Santa-Cruz...

Dans la quiète solitude des hauteurs de Santa-Cruz, l'Eglise catholique d'Algérie s'apprête à rendre un hommage posthume à ses enfants martyrs, victimes de l'intolérance et de la violence. Ils sont dix-neuf religieux qui n'ont pas voulu déserter leurs monastères au moment où le danger planait sur leur vie. Cette cérémonie, connue sous le nom de béatification, se fera en présence d'un représentant du pape François, le préfet de congrégation des causes des saints, le cardinal Angelo Becciu. On regrettera l'absence du Saint-Père et on ne comprend vraiment pas les motifs avancés pour justifier cette absence. La sécurité ? Un sondage Gallup (une référence !) place pourtant l'Algérie parmi les sept pays les plus sécurisés au monde.
C'est vraiment dommage parce que l'occasion aurait été belle pour l'Eglise catholique de rappeler les positions qu'elle a toujours défendues pour la liberté du peuple algérien, comme elle aurait donné un éclat particulier à un événement qui porte avec fidélité les valeurs profondes de la chrétienté. Le martyre des ecclésiastes, offrant leur vie à l'Algérie et à leur foi, n'est-il pas le reflet du sacrifice suprême pour de justes causes ? Cette béatification aurait permis la rencontre fraternelle de deux religions monothéistes profondément ancrées dans cette terre de paix et d'amour. L'Algérie, qui a donné un père à l'Eglise en la personne de saint Augustin, fils de la Numidie berbère, et de nombreuses autres personnalités du christianisme, est le plus grand pays d'Afrique et son histoire est intimement liée à celle de Rome, siège de la papauté. En se rendant au Maroc (mars 2019), et pas en Algérie, le Pape cède à la mode passagère instaurée par les Occidentaux qui consiste à privilégier les pays qu'ils dominent totalement et à avoir toujours des réticences à se rendre dans des pays moins ouverts aux affairistes et touristes européens.
Ceci étant, on ne manquera pas de souhaiter la bienvenue aux hôtes d'Oran, et notamment aux familles des victimes dont la présence sur cette terre arrosée par le sang des leurs a plus qu'une valeur symbolique. Il s'agit, pour elles, d'apaiser la douleur et de se réconcilier avec la vérité. Une vérité malmenée par les propagandistes et manipulateurs qui ont toujours une guerre de retard avec l'Algérie à laquelle ils ne pardonnent pas d'avoir arraché son indépendance. Ces milieux ont alimenté, et continuent de le faire, un mythe, né de leur imagination perfide, qui incrimine l'Armée nationale populaire dans l'affaire dite des «moines de Tibhirine». Pourtant, les enquêtes menées par les juges et les nombreux témoignages recueillis depuis ne laissent aucun doute quant à l'identité des véritables assassins. Ce sont ceux qui ont tué Monseigneur Claverie à Oran et les religieux de Tizi Ouzou ; ce sont ceux-là mêmes qui ont commis l'horreur dans les montagnes de Médéa. On ne peut pas accepter une vérité ici et la refuser là-bas. La «décennie noire» fut terrible pour les Algériens. Elle le fut également pour tous ceux qui ont refusé de quitter le pays et continué à croire qu'il ne leur arriverait rien. Les moines de Tibhirine ont été enlevés par le GIA dans le but de faire pression sur la France et, d'ailleurs, dans ces étranges échanges entre les services de la puissance étrangère et le mouvement terroriste local, il y a à boire et à manger. Mais cela est une autre affaire.
En 2011, l'un des pères rescapés de la tragédie racontait avec force détails les péripéties de l'enlèvement et sa conclusion était : «... L'enquête continue. Pour ce qui est du GIA, le gardien m'a raconté que quand ils sont redescendus, l'un de ceux qui l'accompagnaient a dit à l'un de ses collègues : ‘’Va chercher une ficelle, il va voir ce que c'est que le GIA’’, car ils voulaient l'égorger, mais il a réussi à s'éclipser.» Alors, cette béatification sera-t-elle l'occasion de clore cet épisode douloureux pour des familles éplorées ? Qu'elles comprennent que leurs parents, victimes du terrorisme islamiste, ont tout partagé avec le peuple algérien et qu'ils font partie des 200 000 martyrs recensés chez nous. Ce sont aussi nos martyrs !
Cette cérémonie de béatification doit également être une occasion pour rappeler que l'Algérie est une terre de cœxistence pacifique pour toutes les religions et que les crimes commis par quelques excités ne doivent pas cacher les longs siècles de vie commune fraternelle et calme entre des Algériens de différentes croyances. Cette conception d'un islam tolérant et ouvert aux autres religions est la bonne image de l'islam, celle qui doit être montrée et soutenue car elle reflète nos valeurs ancestrales, notre sens de l'hospitalité légendaire et la grande fraternité qui nous lie aux autres peuples. La paix et le vivre-ensemble ne sont pas de vains mots, comme ils ne sont pas une mode du moment. Ce sont des valeurs qui plongent dans notre passé et reflètent les bases de la vie collective à un moment où plusieurs religions se côtoyaient. Les dérives qui ont mené à la violence de ces dernières années ne font pas partie de notre fond commun ; ils sont étrangers à nos mœurs et restent des excroissances condamnables, alimentées par des courants étrangers. L'Algérie, ce n'est ni le GIA, ni le GSPC, ni même ces mouvements politiques qui prônent le repli sur soi et la haine. C'est tout ce qui reflète l'amour et la tolérance et qu'est-ce cette béatification sur les hauteurs d'Oran si ce n'est un rassemblement pour rendre un vibrant hommage à ceux qui ont aimé ce pays jusqu'à en mourir. Hommes du culte, leur sang s'est mélangé pour que vive la République, c'est-à-dire le respect de la croyance — ou de la non-croyance — de chacun. Il furent 19 chrétiens mais aussi 114 imams qui refusèrent le diktat de la pensée radicale obscurantiste.
La Vérité qui illuminera cette commémoration, pour que cessent le mensonge et la manipulation et la grande Fraternité qui la couvera resteront incomplètes sans cette lueur d'Espoir qui illuminera les hauteurs de Santa-Cruz, rappelant à tous que les prières de là-bas et celles qui montent de toutes les mosquées d'Algérie s'adressent au même Dieu. Puisse cet événement donner à tous les enfants de la ville et de l'Algérie, où qu'ils soient, un signal de réconciliation et de confiance.
Nous concluons avec ces paroles du survivant de Tibhirine : «Il faut espérer que l'amour soit toujours le plus fort. Que l'amour de Dieu aura le dernier mot. Fondée en Dieu, l'espérance doit demeurer. Et ce n'est pas nous qui pouvons résoudre cela. L'espérance invincible, comme disait Christian de Chergé. Elle ne doit pas être vaincue, elle doit toujours rester ouverte, fondée sur Dieu, sur Sa Grâce. Même quand on meurt sous les coups. Comme il disait, l'espérance doit rester ouverte...»
M. F.
 
P. S. : qu'il soit réel ou diplomatique, le «rhume» du président de la République, qui l'a empêché de rencontrer le prince héritier saoudien, est bien tombé puisqu'il a permis à la plus haute autorité du pays d'éviter un rendez-vous pénible et inopportun. Cette rencontre aurait terni quelque peu l'image du pays à un moment où la vérité sur le personnage de Mohammed Ben Salmane n'est pas loin d'éclater. Ce moment crucial et de plus en plus proche montrera que nous avions raison de nous méfier de cette visite.

 

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