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Rubrique Lettre de province

Atmosphère : front social fébrile, gouvernement dos au mur !

L’enchaînement des grèves qui affectent le monde du travail vient d’atteindre un pic de gravité tel qu’il n’est plus possible de continuer à traiter leurs incidences isolément. Autrement dit, se contenter d’inscrire chacune d’elles dans le cadre étriqué de la revendication sociale qu’elle illustre. Sans en soupçonner clairement l’impact politique de leur débrayage, les enseignants, à eux seuls, ne viennent-ils pas de mettre à nu l’incapacité à faire preuve de réactivité face à un véritable mur d’une contestation aux multiples configurations ? N’étant en aucun cas responsables de la mauvaise tournure caractérisant à présent le passage à la grève des enseignants, la leur est par conséquent autant légitime que celle des pompiers pour ne citer que ceux-là.
En clair, il n’existerait pas de « grèves de trop », comme l’ont écrit avec légèreté certains confrères. Car, dans pareil cas de figure, c’est-à-dire lorsque la règle des séries ne connaît plus de fin, le partenaire qui semble apparaître de « trop » est loin d’être le contestataire mais bel et bien la bureaucratie d’État quand elle déserte ses propres responsabilités. Cependant, si la déplorable morgue de l’administration justifie parfois la réactivité du syndicalisme de l’enseignement, celui-ci est par contre tenu par l’éthique spécifique que lui impose le magistère de l’école. Ce sont précisément ces dérapages-là qui alimentent une certaine critique populaire ou, pour mieux dire, la colère parentale.
Alors que, jusque-là, les autonomes de l’enseignement bénéficiaient généralement d’une bonne presse, il semble qu’il n’en sera plus le cas dorénavant. C’est qu’à la suite de l’incompréhensible louvoiement de leur ministère que beaucoup de questions commencèrent à semer le doute à propos de leur capacité à devenir des interlocuteurs viables. Le doute perçu comme tel dès lors que la table des négociations ne leur fut pas proposée spontanément, ils s’estimèrent en droit de peser par le boycott des cours et examens afin que la puissance publique sache prendre enfin la mesure de leurs contestations. En s’érigeant historiquement (2014-2016) en fer de lance d’une intersyndicale tout à fait qualifiée pour exprimer des inquiétudes et les faire suivre par des actions chocs, les autonomes de l’éducation s’approprièrent même des pans entiers d’une contestation concernant jadis la réforme des retraites. D’où le reproche « d’ingérence » émanant d’une UGTA peu disposée à défendre le pécule des vieillards.
Excessifs aussi bien par leurs incursions à répétition dans des revendications qui leur étaient « étrangères » en quelque sorte que par la légèreté des jugements qui les pousse vers le boycott au nom de la première solidarité qui les agrée, les confédérés de l’éducation nationale contribuèrent à la dilapidation de leur capital de sympathie auprès d’une opinion qui sut très bien faire la distinction entre une grève des transporteurs ne pénalisant que secondairement le voyageur potentiel à l’inverse du « décret » d’une grève des cours dont le préjudice est autrement plus énorme.
Cela dit et suffisamment commenté concernant les dérapages dans les stratégies syndicales des autonomes, l’on peut par contre apprécier la contestation vigoureuse et parfaitement légale d’un corps de pompiers en colère. Ceux qui sont la traduction d’une certaine légitimité dont celle du droit de fustiger l’employeur qui est l’État. Or, celui-ci est demeuré non seulement inflexible mais de surcroît eut recours à de pitoyables sanctions au nom de l’on ne sait quelle « obligation de réserve » que ces agents de la sécurité avaient le devoir de respecter. Un drôle d’autoritarisme que rien ne justifiait pour plus d’une raison dont celle qui rappelle que le gouvernement actuel est loin d’afficher de la sérénité. Embourbé jusqu’au cou dans un cycle de grèves tournantes auxquelles il ne parvient toujours pas à satisfaire les doléances ou, du moins, à convaincre les grévistes de l’impossibilité de conclure le moindre pacte sur la base de ce qui lui semblait n’être que de la surenchère, comment donc pouvait-il s’épargner les féroces critiques ? Celles entre autres qui partent des « cafés du commerce » comme il se dit pour désigner les sources d’un petit peuple habité par sa hantise de la précarité. Du moins, cette inquiétude cardinale traduit la désespérance qui ronge les couches sociales où il ne fait déjà plus de doute quant au futur embrasement de la misère matérielle. Or, face à des situations personnelles de moins en moins rassurantes, comment la ménagère et l’ouvrier réagiront-ils ? Même l’honneur perdu du syndicalisme d’une certaine UGTA dénonciatrice des travailleurs autonomes, ses semblables, attend d’être remplacé. Désormais inapte à désamorcer le moindre mouvement de contestation, l’on se demande déjà quand émergeront de nouveaux organes dont les notoriétés seraient mesurables et l’intégrité morale au-dessus de tout soupçon. Et qu’enfin puisse se négocier sans complaisance la part équitable du travailleur, fût-elle congrue.
Au-delà des préalables énumérés, il existe sûrement une probabilité allant dans ce sens-là. Celle qui prédit que l’on s’achemine vers une recomposition significative du syndicalisme comme l’ont laissé entendre les autonomes quelque temps avant l’arrivée du Hirak. En un mot comme en mille et quel que soit le cas de figure qui prévaudra, l’on peut avoir pour certitude qu’il s’agira d’un « grand remplacement »,(1) comme le suggère justement la formule consacrée, par ailleurs, chaque fois qu’il s’était agi du changement de république !
B. H.
(1) Dans le parler populaire, ne dit-on pas : « taraouhou gaâ » ?

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