… d’accoucher en France !
Non, sérieux ! Faut absolument tirer cette histoire au clair ! Soit
cette info est fausse. Une fake news ! Auquel cas, ces auteurs, ceux qui
ont propagé cette calomnie et ceux qui l’ont relayée doivent en répondre
devant la justice. Soit c’est vrai, et là, je suis bien obligé Monsieur
le Ministre de vous raconter une anecdote. Oui, je sais que c’est un peu
personnel, qu’au fond, ça n’intéresse personne, mais je la raconte quand
même, parce qu’ici, dans cet espace, le ministre, c’est moi ! J’ai une
fille, Aïda. Elle est née en 2003. Un 24 août béni. Le jour J, celui des
signes annonciateurs de la venue proche de notre chérubin, j’accompagne
mon épouse à la maternité de l’hôpital Béni-Messous, à Alger. Admission.
Formalités. Et tout le toutim. Bien sûr, ici, en Principauté de Dézédie,
ce n’est pas encore ces salles d’accouchement des séries TV étrangères
où le mari peut être présent, habillé d’une combinaison de bloc,
caméscope ou téléphone en main en train de tout filmer, pendant que sa
compagne le maudit et l’insulte de tous les noms. Mais je ne m’en plains
pas ! Car je vis ici. Je sais ce que sont les hôpitaux publics de Bladi.
Et je connais aussi et heureusement la compétence de nos sages-femmes,
de nos infirmières, infirmiers et médecins. Donc, dehors, barre de
chocolat et autres saloperies enfilées au rythme de mon angoissante
attente, vu que je ne fume pas, j’ai rongé mon frein ! Puis, arrive la
délivrance. Aïda s’est décidée à atterrir sur terre. Je monte dans la
chambre. Et là, je découvre ma moitié allongée dans un lit… partagé avec
une autre parturiente ! Une dame d’âge moyen qui venait elle aussi de se
voir délivrée d’un poids certain. Les pieds de cette voisine de lit
arrivaient pile poil au niveau du nez de ma compagne. L’inverse étant
vrai, puisque toutes deux disposées ainsi sur cette couche. Voyez-vous
Monsieur le Ministre, je vais peut-être vous étonner, mais je ne l’ai
pas franchement mal pris. Je me suis dit, c’est comme ça, encore pour un
temps. Mais ça ira sûrement en s’améliorant. Et puis la vision de cette
chambre pleine d’autant de nouveau bonheur, deux mamans, deux bébés et
un papa, l’autre n’étant pas encore là, a éteint en moi toute velléité
de colère. Je n’avais d’yeux que pour ma femme et pour Aïda. Sans
ressentiment, je le répète sincèrement. Aujourd’hui, si l’info propagée
dans la presse et dans les réseaux sociaux s’avère vraie, là par contre,
Monsieur le Ministre, je reprends vivement mon droit à cette colère
passée, tué à l’époque. Rétrospectivement, je n’accepte pas que deux
femmes, deux Dézédiennes, deux citoyennes de plein droit, dont l’une a
un jour conquis mon cœur se soient vu infligées le supplice de se
renifler les doigts de pieds au sortir d’un accouchement en Principauté,
alors que… Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.
H. L.