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Rubrique Société

MOURIR SEULS Des souvenirs comme dernier compagnon

Des faits divers, rares, mais qui marquent ! Il s’agit d’un homme vivant seul retrouvé mort plus d’une dizaine de jours après son décès.
A Baba Hassen, cette nouvelle a bouleversé plus d’un. Vivre seul comporte des risques, celui de ne pas être secouru à temps ou encore ne pas avoir un ultime compagnon pour son dernier souffle.
«C’est ma hantise»
«Il y a eu récemment le décès d’un collègue. Il habitait seul et vraisemblablement, il a fait une attaque cardiaque. Sa fille mariée a donné l’alerte dès qu’elle s’est rendu compte qu’il ne répondait pas au téléphone. Cela a été comme une onde de choc pour moi. L’imaginer mourir seul dans une maison, m’a profondément affectée», raconte Naïma très peinée. Souhila, habitant à Baba Hassen, raconte l’histoire de son voisin : «Il venait de louer un appartement dans un immeuble limitrophe. Il disait qu’il vivait seul et qu’il était en conflit avec sa famille pour des problèmes d’héritage. Et c’est la raison pour laquelle il a rompu toute relation avec elle. Ce sont ces collègues de travail qui ont donné l’alerte car il ne se présentait pas à son poste de travail malgré les mises en demeure et était injoignable. Il a fallu l’intervention de la Gendarmerie nationale pour forcer la porte et découvrir son corps inerte depuis une dizaine de jours. Nous avons été tous choqués par cette histoire car mourir seul ne faisait pas partie de notre culture.» Heureusement, nous sommes loin du cas de l’homme vivant seul retrouvé chez lui 11 ans après sa mort, en France, l’année dernière.
«Je ne veux encombrer personne»
Ghania est grand-mère 19 fois et maman de six enfants. Une tribu en somme ! Et pourtant, elle vit seule depuis des années. «J’ai toujours refusé de quitter mon domicile, mon quartier, mon repère et mes activités. Et, je ne veux pas que mes enfants aient à le faire pour moi. Je ne veux pas qu’ils changent leur façon de vivre à cause de moi. Et je refuse de cohabiter avec mes fils, comme le veut la tradition, car mes belles-filles ont, elles aussi, besoin de se sentir à l’aise», explique cette dynamique Mamina. Même si elle est autonome, son état de santé peut provoquer des risques. «C’est vrai que j’ai des crises à cause de ma tension artérielle qui n’est pas stable, mais je maintiens ma décision. Mes enfants, les membres de ma famille et mes amis m’appellent tout le temps et je suis en contact permanent avec eux. Même la nuit, jusqu’à 22-23 heures, on me téléphone. Cela rassure tout le monde.» Mais pourtant, elle ajoute: «C’est vrai que quand j’ai un pic assez fort, j’ouvre la porte d’entrée, surtout le soir. Je me dis de cette façon, si le matin, je ne me réveille pas, ils comprendront tout de suite et je ne resterai pas seule à pourrir.» Et d’ajouter en riant : «Et ils n’auront pas à défoncer la porte et à démolir la maison.»
«Transformation de la cellule familiale» 
Ces témoignages renseignent sur la transformation qu’a connue la cellule familiale. Nous sommes passés du stade de la famille élargie à celle moléculaire ou nucléaire. Radjia Benali, de l’université de Batna, écrit dans Éducation familiale en Algérie entre tradition et modernité, Insaniyat ( إنسانيات s) , 29-30 | 2005, 21-33, que «la société algérienne puise dans ses traditions des moyens de maintien et de régression (besoin de contrôle, de puissance, de pression qui attisent conflits et affrontements parfois destructeurs entre belle-mère/ belle-fille) et de changements qui font que les rapports se transforment et sont plus apaisés. La mise à distance entre parents et enfants mariés n’est pas forcément distanciation affective, mais c’est une autre façon de garder des liens d’attachement forts. Une trop grande proximité n’implique pas forcément des liens affectifs profonds, mais peut cacher des animosités et des colères rentrées». Ainsi, avec les transformations et les déplacements géographiques, la famille «se transforme, elle se contracte et se dilate et des compromis sont trouvés pour soutenir les parents et les accompagner que ce soit à distance ou à proximité. La famille rétrécit certes, mais elle n’en garde pas moins les valeurs de la «ayla» et de la «h’ouana» qui est présente. Elle relève notamment dans son analyse : «Le changement social est plus subtil et plus soft que ne le supposent les nostalgiques de la tradition.» Cette universitaire relève, aussi, l’apparition d’un autre phénomène et non moins important : «En perspective, une autre problématique nous semble d’actualité : il s’agit des couples qui ont laissé leurs enfants suivre des études à l’étranger où ils se sont installés. Ces couples se retrouvent parfois totalement seuls et cette solitude peut être renforcée après le décès du conjoint ou le divorce. Cette population n’est pas aussi marginale qu’on peut l’imaginer et mérite un travail de recherche pour comprendre leur état d’esprit, les aménagements qu’ils ont effectués pour vivre ‘’seuls’’ et pour maintenir les liens avec leurs enfants et petits-enfants.»
Sarah Raymouche

 

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