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Rachid Debbah, ex-latéral gauche international de l’USMA : «L’USMA m’a tourné le dos»

Rachid Debbah a écrit une belle page de l’histoire de l’USMA des années 60 et 70, cette formation spectaculaire qui avait atteint sept fois une finale de Coupe d’Algérie sans pour autant remporter le trophée. Lui-même en a perdu cinq, mais il a été l’un des premiers latéraux à «révolutionner» son poste car il ne se contentait pas de défendre et il amorçait des montées offensives sur son couloir gauche. Souvenirs, souvenirs....

Le Soir d’Algérie : A 18 ans, vous étiez déjà titulaire avec les seniors à l’USMA. Mais comment tout a commencé ?
Rachid Debbah
: Quand j’étais jeune, on disputait souvent des matchs interquartiers à Climat-de-France sur les hauteurs d’Alger. Il y avait un certain Hacen, le droguiste de Belcourt, qui m’a remarqué et je me suis présenté à un concours à l’USMA où j’ai signé ma première licence en 1963. Comme j’habitais la Casbah, il était logique que j’atterrisse dans ce club.
En seniors, vous débutez contre l’OMSE et dès la deuxième rencontre face au NAHD, vous inscrivez votre premier but sous les couleurs usmistes.
Non, c’était contre le CRB, et c’est surtout grâce à Salah, le défenseur central de l’époque qui dirigeait aussi les jeunes, qui m’avait recommandé et je me suis imposé avec les seniors.

Et qui était votre entraîneur ?
C’était Mohamed Maouche, et lors de ma troisième rencontre de championnat, on s’est déplacés à Bel Abbès pour affronter l’USMBA sur ses terres. J’en garde un mauvais souvenir parce qu’en face, il y avait un défenseur bélabbessien, en l’occurrence Belaïd Lacarne, qui n’a pas trouvé mieux que de m’asséner un violent coup de poing dont je me souviens à ce jour, et ce, pour m’empêcher de mener à bien une contre-attaque.

Et il n’a pas été expulsé ?
Non, pas du tout, même pas un avertissement.
Et plus tard, il deviendra un des meilleurs arbitres algériens en étant même retenu pour officier lors de la Coupe du monde de 1982 en Espagne...
Il est devenu un bon arbitre, mais, sur le terrain, il était rugueux et agressif comme joueur et je sais de quoi je parle.

Et en ce temps-là, la star de l’USMA c’était bien le regretté Abderahmane Meziani ?
Oui, c’était le meilleur joueur de l’équipe. Un grand technicien et un remarquable attaquant.

Ses feintes et ses dribbles ont fait sa renommée. Au cours des entraînements, il devait vous faire souffrir ?
Moi, je le connaissais bien et de ce fait ses «gris-gris» ne nous trompaient pas. Mais, c’est vrai qu’il était au-dessus de tous. Allah yerrahmou.
Il y avait un autre attaquant usmiste, Hamid Bernaoui qui, bien avant Maradona, s’était aidé de la main pour marquer des buts.
Il l’a fait, oui, mais on formait une équipe spectaculaire qui pratiquait un beau football. Après, qu’il ait marqué de la main, cela fait partie du jeu aussi.
Une équipe spectaculaire qui s’écroulera face au grand CRB lors de la finale de la Coupe d’Algérie en 1969...
Après un premier match nul (1-1) au stade du 20-Août, on s’est inclinés par quatre buts à un chez nous à Bologhine.
Et un an plus tard, l’USMA s’incline à nouveau lourdement (5-3) face à ce même CRB, emmené par un grand Lalmas. En fait, c’est lui qui a fait la différence.
Le CRB avait Lalmas, certes, mais nous aussi on avait Meziani. Il faut dire que nous avions un manque de chance aussi.
L’USMA a perdu sept finales. Ce n’est pas que la malchance...
Certainement, mais c’était peut-être un complexe ou une appréhension des finales.
Vous en avez perdu combien vous-même ?
J’en ai perdu pas moins de cinq, ce qui est énorme.

Mais comment se fait-il que vous n’avez jamais tiré les leçons des premières finales perdues ?
Même avec le recul et le temps qui passe, je n’arrive pas à me l’expliquer moi-même. En ce qui me concerne, lors de la finale contre l’USM Annaba, j’avais été blessé toute la semaine et l’entraîneur m’avait fait évoluer à un poste inhabituel d’ailier gauche, ce qui était un peu vraiment risqué pour une telle rencontre.

Lors de la finale de 1972 contre le MCA que l’USMA a de nouveau perdue lourdement (4-2), vous avez eu affaire au virevoltant Omar Betrouni qui vous a fait des misères.
Omar a toujours été un ami et, sur le terrain, je ne voulais pas le tacler brutalement ou le retenir par le maillot. Bien sûr, j’étais défenseur et il fallait l’arrêter mais je ne voulais pas utiliser de moyens illicites, j’aurais pu le faire.

Et vous auriez risqué l’exclusion ?
Non, je n’avais pas peur d’être exclu, mais mon amitié envers lui ne pouvait pas s’exprimer uniquement en dehors du terrain. Il avait réalisé un grand match. On a joué au foot, ce n’était qu’un match et, aujourd’hui encore, quand je le rencontre, on prend des cafés ensemble et on se remémore les souvenirs de l’époque.

Et quel est le meilleur souvenir que vous gardez de cette époque ?
Sincèrement, je suis déçu et je ne garde que de mauvais souvenirs.
Pourquoi uniquement que des mauvais souvenirs ?

Vous êtes là en train de m’écouter, mais moi j’ai défendu le maillot de l’USMA et de l’équipe nationale et je dois dire qu’aujourd’hui, je vis une situation critique, dans la précarité. 
A mon âge, j’habite encore chez mon père. Et si ce n’était pas grâce à lui, je serais à la rue avec ma femme et mes enfants. Non, moi le football ne m’a rien donné ! Ceci dit, je ne suis pas en train de demander l’aumône. J’exprime juste une réalité.

Vous totalisez cinq sélections et, aujourd’hui encore, on se souvient de votre bicyclette ratée face au Maroc ?
Sur cette action, je crois que j’ai été naïf. Le ballon allait sortir en corner. Comme je voulais éviter sa sortie, j’ai tenté un coup de ciseau pour le renvoyer vers le centre. Mais j’ai attrapé la balle avec l’extérieur de mon pied gauche et le cuir est allé se loger dans la cage vu que Mohamed Abrouk était déjà sorti. C’était un but contre mon camp mémorable et je crois que c’est la plus grosse connerie que j’ai commise tout au long de ma carrière.

A l’USMA, vous étiez le co-équipier d’un certain Saïd Allik. Comment était-il comme joueur ?
C’était un joueur de devoir et un excellent co-équipier avec lequel j’ai toujours eu de bonnes relations à ce jour.

Après avoir été le président de l’USMA pendant de longues années, il est aujourd’hui le manager général du CRB. Qu’en pensez-vous ?
Comme manager, il est compétent et son palmarès avec l’USMA parle pour lui. Il est vraiment capable de mener à bien sa nouvelle fonction.

Ça ne vous dérange pas qu’il soit passé de l’USMA au CRB ?
Non, pas du tout. Nous vivons à l’heure du professionnalisme et les mentalités ont changé. Tout comme n’importe quel travailleur peut changer d’employeur, il est libre d’offrir ses compétences à qui il veut.

La plupart de vos anciens coéquipiers sont devenus des entraîneurs ou se sont lancés dans des affaires commerciales. Pourquoi pas vous ?
J’ai été confronté à de nombreux problèmes familiaux qui m’ont empêché de suivre ces voies, mais il faut dire que le football est ingrat. dans ces moments difficiles, l’USMA m’a tourné le dos malgré toute ma carrière au sein de ce club. 
Pas une invitation et pas un seul coup de fil ! Et pourtant, j’ai défendu le maillot rouge et noir pendant plus de quinze années. heureusement que mon père était là et savez-vous qu’il a un lien avec l’histoire du célèbre chahid Ahmed Zabana ?

Dans quelles circonstances ?
Durant la période coloniale, mon père était gardien de prison à Serkadji. A la veille de son exécution, Ahmed Zabana a remis une lettre à mon père qui était destinée à ses parents. Bien sûr, mon papa a transmis cette missive à qui de droit. Ensuite, mon père a été arrêté et emprisonné pour avoir aidé Zabana à faire part de ses adieux à ses parents.

Ce n’est qu’en 1981 que l’USMA a remporté sa première Coupe d’Algérie après sept finales perdues. vous deviez  être heureux pour votre club ?
Oui, comme tous les Usmistes, c’était un sacre mérite et tant attendu.
Et vous aviez participé à la fête ?
Non, et pour la simple raison que personne ne m’avait invité.
Mais plus tard, quand Allik est devenu président de l’USMA au cours des années 90, il a organisé votre jubilé...
Oui, mais c’était un jubilé plutôt mince. C’est grâce à l’association des anciens internationaux algériens présidée par Ali Fergani que j’ai pu survivre et je tiens à les remercier au passage.
On dit que Hacène Lalmas est le meilleur joueur algérien de tous les temps. Vous qui avez eu l’occasion de l’affronter sur le terrain, qu’en dites-vous ?
Pour moi, c’était le meilleur joueur de son époque, incontestablement. mais depuis, le football a évolué et il y a d’autres grands joueurs. De notre temps, on évoluait sur du tuf ou de la terre battue et, pourtant, je me hasardais à exécuter des bicyclettes ou des têtes plongeantes comme un kamikaze parce que c’était très dangereux sur de telles surfaces. par conséquent, on ne peut pas comparer avec ce qui se passe aujourd’hui.
Aujourd’hui, les joueurs touchent des salaires mirobolants. Cela doit vous révolter ?
Moi, en 2007, j’ai été obligé de faire une demande de logement social que je n’ai jamais eu d’ailleurs. Maintenant que les joueurs actuels gagnent des centaines de millions par mois, cela ne me révolterait pas s’ils les méritaient. Il n’y a aucun spectacle et en plus c’est souvent de l’argent public.
Quel est pour vous le meilleur arrière-gauche algérien à l’heure actuelle ?
Je n’en vois aucun du fait que je ne suis plus le foot national. Seul l’international m’intéresse.
Et à l’international, quelle est votre préférence ?
Le meilleur, c’est Marcello, le Brésilien du Real.
propos recueillis par Hassan Boukacem

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