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Rubrique Tendances

TAHYA BREZIDAN

Ça y est, la présidentielle est passée. C’est fait. Mal fait, c’est vrai, mais c’est fait. Les chiffres en disent long. Entêtants. Tenaces. Il y a une époque, nous frôlions les cent pour cent. Maintenant, les chiffres volent au ras des pâquerettes. A chaque époque son cachet. Le parti unique n’est plus unique. Il ne s’occupe plus de gérer les élections, désormais. Puis, il n’y avait pas le Hirak. Les électeurs votaient, les décideurs décidaient de l’issue du scrutin. Les choses changent, elles évoluent. Surtout quand le peuple prend en main son destin. Voilà donc, on a un nouveau Président. Il est là. Mal élu, il est là, tout de même. Tahya brezidan, donc ! Je la joue un peu comme «le roi est mort, vive le roi». Puis, le Président a un nom ; ce n’est plus un cadre. Un énarque qui a fait tous les niveaux de la responsabilité qui, normalement, dispose de tous les tenants et les aboutissants d’une gestion au niveau des revendications populaires. Et c’est à ce niveau que se situe le virage historique. Ou pas !
Qu’en est-il du Hirak ? Il n’en démord pas. Il rejette en bloc cette élection. Il ne reconnaît pas cette élection. Il ne reconnaît pas ce Président. C’est là où ça coince. En réalité, rien n’a changé sur le terrain social. Que faut-il faire, maintenant ? Le nouveau Président a tendu sa main pour un dialogue avec le Hirak. Et alors ? Quelle serait, dès lors, la réponse de la rue ? Selon les échos, principalement sur les réseaux sociaux, le mouvement n’est pas près de dialoguer. Négocier plutôt ! Ce n’est pas de la simple sémantique, ça relève de la stratégie politique. De plus, il y a l’écueil des détenus d’opinion, pour lesquels le Président promet de trouver «des solutions». S’il a été très clair pour les détenus affairistes, il l’est un peu moins pour les détenus politiques. Il l’a dit du bout des lèvres : « On leur trouvera des solutions, Nchallah ! » Puis, il l’a dit avec un zest d’hésitation. Que faut-il comprendre par là ? Qu’il n’a pas les coudées franches. Il faut se poser la question. Alors que le Hirak, lui, est très clair dans ses propos. L’autre grande question : dialoguer ou négocier avec qui, le Hirak n’étant pas organisé ? Quels seraient les éléments de discussion ? 
Le Hirak est clair, à ce propos. Il ne cesse de le crier, dans la rue, depuis le 22/2. Et après ! Dans tout cela, il faut se rappeler des promesses (engagements ?) du Président, lors de la campagne électorale. La Constitution sera revue. D’accord ! Sera-t-elle soumise à un référendum ? Ou sera-t-elle soumise aux parlementaires, dont on sait qu’ils ne seront pas touchés par des élections anticipées. Il y a maldonne, ici. Un Président mal élu et des parlementaires mal élus ne peuvent pas disposer d’une Constitution, clé de l’avenir de la «nouvelle République» dont se réclame Tebboune. Juste une précision, qui est de taille pour moi, il ne s’agit pas d’une deuxième République. Et ce n’est pas, non plus, une question de sémantique. Il faut nommer les choses par leur nom. Il est loin le temps des euphémismes ! 
Bien sûr, il faut juger sur pièce. Une Constitution organise une société. Et là, de quel projet de société parle-t-on ? Si c’est juste pour replâtrer, c’est inutile de perdre encore du temps. L’Algérie a perdu 57 ans de son existence ; les sociologues diront que ce n’est rien par rapport à la vie d’une nation, en termes de temps. Sauf que la génération actuelle refuse tout sacrifice ; elle ne veut plus attendre. Espérer ou rêver d’un avenir meilleur. C’est maintenant ! Pas demain ! Ma génération a été l’objet d’un maelstrom politique, qui a duré près de 60 ans. La génération actuelle est dans la rue, elle refuse de céder ces places conquises, malgré la matraque, comme celle qui a touché les Oranais, dernièrement. 
Il n’y a pas que ça. Après la prestation de serment, le Président sera attendu sur le choix de son gouvernement. Il cible la jeunesse pour, dit-il, transmettre le témoin. Il se veut un joint (hamzet wasl) entre la jeunesse en ébullition et la vieillesse encore aux postes de responsabilité. Je suis curieux de connaître les noms du staff. Des ministres. Des ministères à créer. Des secteurs à investir en priorité. Du chômage (le Président a promis de l’éradiquer). Du Premier ministre. Plus curieux encore de savoir si le ministre de la Défense sera dévolu à un civil. Ou allons-nous continuer comme avant ? Dans tout ça, le Président aura-t-il les mains libres d’appliquer son programme ? Il ne faut pas oublier qu’un grand connaisseur du système a refusé de prendre part à l’élection, parce que «même élu, je ne pourrai rien faire», dit-il. Je cite de mémoire, pardon. 
Le nouveau Président aura entre les mains une loi de finances qu’il n’a pas préparée et qu’il n’a pas signée. Qu’en fera-t-il ? S’en contentera-t-il ? En termes de sous, les temps sont durs. Le bas de laine est au plus bas. Ira-t-il à la planche à billets ? Ou, en cas de besoin, ira-t-il vers l’emprunt ? Et l’école algérienne, restera-t-elle aussi dogmatique ? Puis le niveau de l’enseignement, à tous les niveaux ? La question des langues ? Le système de santé va-t-il être touché ? Et la jeunesse ? Et la totale absence des populations envers l’Etat ? Ou devrais-je dire le pouvoir ? Il y a une sacrée différence de définition à faire, ici. Comment faire pour remobiliser l’Algérien ? A mon sens, le regretté Boudiaf a su redonner confiance à ce peuple. Avec des mots simples. Et un regard, sans concession, sur la «mafia politico-financière». Puis, la liberté de penser, de parler, d’écrire, de bouger, de croire… Puis, les libertés, toutes les libertés ! 
Je ne sais pas si je dirais, plus tard, «Tahya brezidan». Bien sûr, il n’y a pas de chèque en blanc. C’est sur pièce que le jugement sera basé. Les mensonges et les faux fuyants ont fait leur sale besogne. Le népotisme, aussi. La rapine, aussi. L’oligarchie, aussi. L’impunité, aussi. Et, tout ça ! Si Abdelmadjid Tebboune veut rentrer dans l’Histoire par la grande porte de la postérité bienheureuse, il le peut ; si, par contre, il quête le petit sas, il le peut, également. Le destin lui tend les mains, à lui de s’en saisir. Qu’il donne un bon coup de pied dans la fourmilière ! A bon entendeur !
Y. M.

 

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