L’année qui vient de s’écouler a été, sans
conteste, extrêmement éprouvante tout aussi bien pour les grands que les
petits pays dans le concert des nations. Les espoirs de paix partout ont
été mis à rude épreuve quand ils n’ont pas été tout simplement balayés
par des conflits récurrents à caractère social ou des guerres localisées
dans une région en particulier. C’est le cas du Sahel en proie au
terrorisme, sous couvert de l’Islam ou du Moyen-Orient en Syrie. Les
grands de ce monde n’échappent pas à la règle bien que sur tout autres
registres. On ne saurait les exclure de ce bref tour d’horizon des
événements marquant l’année 2019, année – c’est le moins que l’on puisse
dire – qui n’a pas connu d’avancée significative dans la recherche de
l’instauration de la paix, condition sine qua non pour les projets de
développement susceptibles de sortir des millions de personnes du
dénuement qui perdure. Visiblement, celles-ci ne sont pas au bout de
leurs peines. De plus en plus les conflits les jettent sur les routes,
hors de leurs domiciles, fuyant une mort certaine. Visionnaire, le
dirigeant chinois, feu Mao Tsé Toung, qualifiait, de son vivant,
l’Afrique de future « zone des tempêtes ». Au Sahel, nous y sommes
aujourd’hui dans toute l’étendue des dégâts occasionnés par ces guerres,
aggravées par les interventions de forces étrangères à l’impact
nuisible. Le théâtre des opérations met en branle des pays aussi
éloignés les uns des autres et aux motivations mues par des intérêts
d’ordre économique ou stratégique. C’est le cas de la Russie de Poutine
qui joue, en Libye, sur deux tableaux soutenant les deux belligérants,
en l’occurrence le Gouvernement d’Union nationale (GNA) et l’armée du
général Khalifa Haftar. Les immenses richesses pétrolières libyennes en
sont le facteur déterminant. Les Etats-Unis veillent à ce que les
équilibres ne soient pas rompus en faveur d’une quelconque puissance. La
France, qui considère les pays du Sahel comme sa chasse gardée, n’a pu,
malgré les discours lénifiants, assurer la sécurité et la stabilité aux
Etats de la région, fragilisés par le manque de ressources et la
sécheresse. Bien au contraire, les initiatives françaises, lancées pour
ce faire, se sont avérées un retentissant échec. Qu’on en juge : les
organisations islamistes pullulent, on en dénombre pas moins de quatre
dont les plus meurtrières Boko Haram et Al Qaïda pour le Maghreb
islamique en guerre contre cinq pays réunis dans le cadre du G5.S,
parrainé par la France, qui réunit le Mali, le Niger, le Burkina Faso,
le Tchad et la Mauritanie. 2019 aura été une année de cauchemar puisque
le 10 décembre, un attentat meurtrier va coûter la vie à 71 soldats
nigériens tués par l’organisation Etat islamique et 17 militaires
burkinabè durant le même mois. Cette même année on a recensé 1500 civils
assassinés au Mali et au Burkina Faso. Par ailleurs, 13 militaires
français périront lors d’une collision entre deux hélicoptères de la
force d’intervention Barkhane au nord du Mali. Officiellement. La
riposte devait être déployée par le G5.Sahel (5.000 hommes, l’Algérie
n’y adhère pas) à travers un sommet prévu pour le 17 de ce mois de
décembre qui sera finalement reporté à janvier 2020. Mais surtout
l’année 2019, pour beaucoup d’observateurs et analystes, aura démontré
l’inefficacité de l’initiative du G5.S. De plus en plus les populations
africaines voient les soldats français débarquer sur leur sol comme une
force d’occupation. Autre signe de faiblesse de cette organisation,
c’est la demande de la France faite à d’autres pays du G7 (comme le
Japon !) de rejoindre l’organisation pour le Sahel. Au chapitre des
foyers de tensions, la Libye représente l’illustration par excellence
des ingérences étrangères avec leurs conséquences catastrophiques dont
l’exode prévisible des populations vers les pays voisins – Tunisie
surtout – et la rupture des équilibres stratégiques en vigueur durant la
période El Gueddafi. Il est malheureux d’observer que plusieurs pays «
frères et amis » s’y emploient. C’est la curée ! Ceux-ci soutiennent en
armes et en mercenaires (Russes, Soudanais…) le général Haftar pressé de
forcer, pour s’y installer, les portes de la capitale Tripoli. C’est
peine perdue, cependant. Lancée en avril 2019, à grand renfort de
publicité, son opération éclair est un pétard mouillé. Une chance qui ne
se renouvèlera pas avec l’entrée en scène de la Turquie sous la houlette
de son Président Tayyip Recep Erdogan visiblement déterminé à en
découdre avec les forces en guerre contre le gouvernement légitimement
reconnu par la communauté internationale. L’Algérie est tout à fait
défavorable à cette initiative et privilégie le dialogue pacifique entre
Libyens. Au demeurant, 2019 marque pour l’Algérie une absence bruyante
dans la gestion des affaires du Sahel, voire de la question libyenne. Ce
recul s’explique par la situation politique interne créée par le
mouvement populaire de changement du système et sa conséquence, la
démission du Président Bouteflika et de son gouvernement. Ce vide
profitera à ceux qui ont des visées cachées jusque-là. Au plan mondial,
l’on assiste à une restructuration des forces en présence pour
l’accaparement de parts de marché. La guerre commerciale
américano-chinoise marquera, cette année, en octobre 2019, une pause
avec la signature d’un accord intitulé « Phase 1 ». Au pays de l’Oncle
Sam, une autre guerre est menée, elle concerne le 45e Président des
Etats-Unis, Donald Trump menacé par une procédure de destitution menée
par ses rivaux démocrates. Ce dernier traîne, par ailleurs, d’autres
casseroles sous la forme de scandales impliquant la Russie et l’Ukraine
notamment. Quant à la Russie de Vladimir Poutine, 2019 est l’affirmation
de la puissance russe avec le déploiement de la fusée supersonique «
Avengard », « capable d’atteindre n’importe quel point du globe et qui
plus est capable de surpasser les boucliers anti-missiles ». Rien que
ça. 2019, enfin c’est aussi l’affaire traumatisante de l’abject
assassinat du journaliste saoudien au consulat de son pays à Istanbul,
Jamal Khashoggi, le 2 octobre dernier.
Brahim Taouchichet
Brahim Taouchichet