Actualit�s : 11 F�VRIER 1996
L’apr�s-midi de l’horreur


Le 11 f�vrier 1996, � la Maison de la presse Tahar- Djaout, c’�tait une journ�e comme les pr�c�dentes. En d�pit des actes terroristes, attentats et autres assassinats qui faisaient partie du quotidien empreint de terreur de l’�poque, nul ne soup�onnait la tournure qu’allaient prendre les �v�nements en milieu d’apr�s-midi.
Horaires du Ramadhan obligent, les r�dactions commencent � se vider. Il est quinze heures de l’apr�s-midi. Au si�ge du journal Le Soir d’Alg�rie, � la r�daction, certains terminent leur travail, d’autres vaquent � d’autres occupations en attendant de rentrer chez eux. Au service PAO, tous les agents sont pr�sents ; le travail dans ce service atteint son rythme de croisi�re � ce moment de la journ�e. Soudain, tout semble voler en �clats. Une explosion violente, qui semble m�me secouer l’�me des pr�sents, le plonge dans un noir total, une obscurit� in�luctable, une atmosph�re de fin du monde… L’obscurit� a-t-elle �t� un jour aussi profonde ? Un terrible silence est vite remplac� par les cris et exclamations des employ�s du Soir d’Alg�rie. Impossible de s’orienter dans le noir total. Le premier choc pass�, les �v�nements s’encha�nent � une vitesse vertigineuse. La peur et la panique sont omnipr�sentes. L’on prend petit � petit conscience de l’horreur de l’�v�nement qui vient de se produire. Un attentat a vis� la Maison de la presse. Quelques minutes apr�s, l’on ne sait toujours pas o� exactement la bombe a explos�, quelle �difice elle a vis� et les d�g�ts qu’elle a faits. L’urgence � ce moment l� �tait de quitter le si�ge du journal en ruines. Difficile de se frayer un chemin au milieu des tas de gravats et des murs affaiss�s. Une �paisse fum�e noire rend la visibilit� quasi impossible. La poussi�re recouvre tout. Difficile aussi de respirer normalement. Dehors, l’horreur atteint son summum… Vision d’apocalypse, les gens courent dans tous les sens… Les agents de la Protection civile sont sur les lieux, devant le journal Le Soir d’Alg�rie. Les bless�s l�gers sont h�tivement pris en charge sur place, les autres sont �vacu�s tant bien que mal vers l’h�pital… D’autres journalistes, employ�s, agents de s�curit�… arrivent en courant, tentent de comprendre ce qui s’est pass�. Un m�lange de consternation, de peur et de d�solation se lit sur tous les visages. Certains pleurent � chaudes larmes, d’autres restent fig�s sur place choqu�s, ne pouvant exprimer un quelconque sentiment, ne pouvant m�me pas voir s’ils �taient bless�s ou non… Alors que la plupart des pr�sents courent dans tous les sens ne sachant quoi faire ni par quoi commencer… Cherchant des coll�gues, des amis, essayant de se rappeler qui �tait au journal et qui n’y �tait pas. Les premiers moments de stupeur pass�s, apparut la r�alit� de l’�v�nement qui venait de se produire. Des dizaines de corps d�chiquet�s par la violence de l’explosion gisent du c�t� de la rue Hassiba-Ben- Bouali. Des voitures r�duites en tas de ferraille flambent l� o� elles ont �t� rejet�es par le souffle g�n�r� par la d�flagration. C’est le chaos total… Une terreur froide prend possession des personnes qui s’en sont sorties saines et sauves et qui n’arrivant pas � croire � cette r�alit� vu les d�g�ts occasionn�s par la puissance de l’engin explosif. C’est-�-dire qu’elles n’ont pas �t� bless�es physiquement, puisque cet apr�s-midi de l’horreur restera ind�l�bile dans les m�moires de ceux qui l’ont v�cu. Le souffle qui a d�truit compl�tement le si�ge du Soir d’Alg�rie a �galement endommag� les si�ges des autres r�dactions. Le premier corps, celui de Mohamed Dorbane, est sorti de la r�daction du Soir d’Alg�rie. Consternation, d�sespoir g�n�ral, la douleur n’a plus de nom. L’angoisse gagne les pr�sents et une interrogation s’impose : qui sera le prochain ? Ils sont trois, Allaoua A�t-Mebarek, directeur de la r�daction, Djamel Derraza, cruciverbiste, et Mohamed Dorbane, chroniqueur, � avoir �t� sortis sans vie de sous les d�combres. La douleur de leurs confr�res et amis est sans limites. Les services de s�curit� sont sur les lieux, les proches des personnes qui devaient se trouver � la Maison de la presse ou dans ses environs sont tenus � distance. La nouvelle se r�pand comme une tra�n�e de poudre dans la capitale. La d�flagration a �t� entendue sur plusieurs kilom�tres � la ronde. En fin d’apr�s-midi, confr�res, amis, parents sont encore l�, ne pouvant encore croire au terrible �v�nement qui venait de se produire. En d�but de soir�e, une pluie fine et froide a accueilli les personnes qui sont revenues sur les lieux comme pour exorciser leur sentiment de profonde tristesse et d’impuissance.
F. Z. B.

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