Actualit�s : AVEC UN REVENU INSIGNIFIANT
Mourad, pauvre et seul contre la faim


�Unis contre la faim.� Le slogan retenu pour c�l�brer la Journ�e mondiale de l�alimentation fait sourire Mourad. La faim, il y fait face seul depuis qu�il a perdu son emploi. Plus de dix ann�es de disette, de mis�re qu�il a appris � apprivoiser seul. Il raconte comment il a un jour rejoint le contingent des pauvres.
Nawal Im�s - Alger (Le Soir) - Rien ne pr�destinait Mourad � vivre un jour de la charit�. Et pourtant, pour subvenir � ses besoins et � ceux de sa famille, il est tributaire de la g�n�rosit� des autres. N�ayant travaill� que tr�s peu d�ann�es, il ne b�n�ficie pas d�une forte retraite. Une pension qui lui suffit tout juste � couvrir quelques besoins pendant une quinzaine de jours. Il arrive � faire quelques provisions : du riz, des lentilles, de la pomme de terre. Pas de grandes quantit�s mais suffisamment pour esp�rer nourrir toute sa famille. Un challenge qu�il arrive de moins en moins � r�ussir au regard de la hausse galopante des prix. Il a appris � ruser. �Je louvoie avec la faim�, dit-il malicieusement. Comment ? Il lui arrive souvent de ne faire qu�un seul repas par jour. Le matin, il se permet un caf� sans sucre avant de sortir de chez lui sans destination pr�cise. Il erre dans les rues puis finit par prendre place dans un coin. Il ne tend pas la main mais sa posture, son regard interpellent : il transpire le besoin avec une humilit� incroyable. C�est certainement cela qui lui a souvent sauv� la vie. Tr�s souvent, il est au bord de l�inanition mais il dit avoir dompt� la faim. Il rit puisqu�il avoue avoir transmis cela � toute sa famille. Ses enfants sont soumis au m�me r�gime : ils ont pour instructions de ne pas rentrer � midi � la maison, ils n�y trouveront pas de d�jeuner. Le plus jeune qui est encore � l��cole primaire a la chance de manger � la cantine, les quatre autres font appel au syst�me D ou attendent le d�ner. �J�ai conscience que j�impose � mes enfants un r�gime difficile � suivre mais ai-je le choix ? Je ne peux pas leur mentir, ils doivent apprendre � survivre. Nos a�n�s ont bien v�cu sans manger � leur faim pendant le colonialisme, beaucoup ont surv�cu, mes enfants doivent aussi faire pareil.� Le soir, la famille a droit � un repas qui se limite souvent � des p�tes ou � des l�gumes secs. Les jours o� des �mes charitables donnent � Mourad de l�argent, il se permet une folie : des fruits. Les autres jours, il vit le ventre vide et cela ne semble m�me plus le g�ner. Comment en est-il arriv� l� ? Sans instruction, il a r�ussi � s�int�grer dans une entreprise publique comme agent d�entretien. Pas de salaire mirobolant mais un revenu r�gulier qui lui a permis de fonder une famille. Il a �pous� une jeune fille de condition modeste sans instruction et sans emploi. Le couple a eu cinq enfants. Avec du recul, Mourad se demande s�il �tait sage de faire autant d�enfants mais � l��poque, il ignorait quelle tournure prendrait sa vie. �Je savais que je n�aurais pas une vie facile mais j�ignorais � quel point�, dit-il. Son quotidien s�est compliqu� lorsqu�il a d�couvert qu�il �tait hypertendu puis diab�tique. Il a commenc� � trop s�absenter, � trouver les t�ches que lui confiait son employeur de plus en plus ardues. Il a d� quitter son poste pr�matur�ment sans avoir assez cotis� � la Cnas. Il a un regard r�sign� sur son parcours. Fataliste, il pense qu�il est sur terre pour accomplir un destin. �Et si ma t�che �tait d�accompagner mes enfants pour un avenir meilleur ?� dit-il avec un sourire en coin.
N. I.

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