
Le Soir Retraite : LIBRE DÉBAT Mutuelles sociales, à quand la réforme ? (2e partie et fin)
Les mutuelles sociales doivent publier un rapport annuel sur leurs
activités et ses comptes. (Cf. article 26 de l’Ordonnance 96- 20,
complétant la loi 90-33 par un article 34 ter). Aucune mutuelle ne
respecte cette disposition. La position des pouvoirs publics dans la
gestion des mutuelles est condamnable à plus d’un titre : aucune tutelle
étatique n’a osé contrôler, auditer ou expertiser la gestion des
mutuelles, le laxisme des responsables hiérarchiques, les laisser-aller,
les laisser-faire, les laissez-passer des organes de supervision et de
contrôle ont fatalement été les accélérateurs du pourrissement qui a
conduit toutes les mutuelles vers la mauvaise gestion et les
prévarications.
Quelle est la position des syndicats dans la déconfiture des
mutuelles ? En tant que partenaire social, le syndicat fait partie des
organes statutaires des mutuelles sociales, et de fait, participe
directement à la gestion et aux programmes de développement des
mutuelles. Il est partie agissante dans les désignations des membres, au
sein des organes de gestion qui sont responsables du drame qui frappe
les mutuelles. Il est question pour le gouvernement, et ce, depuis
plusieurs années notamment dans le cadre de la tripartite, d’ouvrir le
dossier des mutuelles, cela reviendrait à ouvrir la boîte de Pandore.
Qu’en est-il de la position des mutualités retraites ? L’écrasante
majorité des mutualistes retraités méconnaissent leurs droits visà- vis
de la mutuelle. Certains retraités résidant dans des régions éloignées
ne sont même pas identifiés par les services de la mutuelle, d’autres
sont exclus de fait des prestations servies. A l’ère de la
généralisation des moyens de communication, les mutuelles sociales ne
disposent pas de site Internet qui permet de prendre connaissance des
conditions d’ouverture aux prestations individuelles et collectives
servies, et autres avantages et prestations spécifiques.
Les fondements de la solidarité
A titre d’exemple la mutuelle «MIP» (les pétroliers) minore
sciemment la pension complémentaire de retraite de 6% par rapport à sa
valeur réelle, ce qui a obligé un groupe de retraités d’ester en justice
Sonatrach et cette mutuelle pour faire valoir leurs droits (voir article
ci-dessous), et les cas analogues sont légion. Quant aux actifs, ils ont
rompu la chaîne de solidarité avec leurs aînés retraités. Cet
égocentrisme entre les générations, aux ramifications et causes
multiples (sociales, économiques et politiques), s’amplifie au fil des
jours. Le syndrome du «chacun pour soi» est presque devenu une culture
de société. L’inexistence d’une représentation syndicale exclusive aux
retraités, implantée au sein même des structures auxquelles les
retraités avaient appartenu durant leurs activités, est la cause
principale de la désocialisation et l’exclusion des retraités. Les
structures syndicales, élues par les actifs, n’ont pas vocation à
représenter les retraités. Ayant perdu la qualité de salarié-électeur,
le retraité ne rentre plus dans la stratégie et les plans des syndicats,
et leurs causes ne sont plus citées dans les plateformes des
revendications sociales. La mutualité en tant que concept n’est pas
nouvelle pour notre société, elle tire ses racines de nos valeurs
ancestrales, nous citerons les plus usuelles qui sont : zakat, touiza,
timechrate...
Prise en charge syndicale du retraité par l’UGTA
Le mutualiste retraité n’est pas représenté par un syndicat exclusif
(le conseil syndical qui est élu par les électeurs actifs n’a pas les
prérogatives statutaires pour représenter les retraités), cette vacuité
de représentation précarise davantage la situation du retraité. Ce
dernier, qui n’a connu durant sa vie active que le syndicat UGTA, se
retrouve, au lendemain de sa mise à la retraite, marginalisé. La mission
syndicale de l’UGTA est pérenne, elle doit agir, sans discrimination,
entre les générations de ses adhérents : la structuration syndicale ne
doit pas être l’apanage du seul travailleur actif à qui on accorde un
statut d’adhérent à durée limitée à la «période-active ». La Centrale
syndicale UGTA, qui a représenté le retraité durant toute sa vie active,
doit continuer sa mission envers le retraité en lui assurant une
couverture syndicale par l’implantation de sections syndicales binômes,
dont une exclusive pour les retraités au sein des lieux de travail. Les
adhérents doivent prendre conscience de la dérive finale des mutuelles,
ils doivent défendre leurs droits par tout les moyens légaux, adhérer au
syndicat des retraités FNTR-UGTA, en attendant la mise en place des
structures syndicales exclusives, sur les lieux de travail au sein
desquels ils ont exercé durant leur carrière. L’Etat, à travers la
tutelle ministérielle (ministère du Travail, de l’Emploi et de la
Sécurité sociale), doit se réapproprier ses missions régaliennes et
réorganiser le fonctionnement des mutuelles sous la tutelle d’une des
directions de son ministère, la direction générale de la Sécurité
sociale étant la plus apte à mener le chantier de la réforme des
mutuelles et à contrôler sa trésorerie notamment. En conclusion, la
création d’une caisse nationale d’assurance mutualiste CNAM, jumelle de
la CNAS, est primordiale : elle regroupera toutes les mutuelles en
structures faîtières. Cette réorganisation permettra de créer les
mécanismes et moyens de gestion modernes ; d’unifier les prestations
sociales servies, de défendre les acquis et les intérêts de la mutualité
auprès des autorités administratives, politiques et des prestataires, de
promouvoir le développement, la viabilité et la performance du mouvement
mutualiste ; d’ assurer une meilleure prise en charge des risques ;
d’améliorer et d’élargir les prestations aux membres ; de garantir la
représentation des structures affiliées aux différents niveaux ; et
d’agir en qualité d’organisme de supervision, d’appui conseil et de
suivi des activités des structures affiliées. En attendant, le quotidien
Le Soir d’Algérie doit suppléer cette vacance en ouvrant une tribune
dédiée aux mutuelles sociales, pour recueillir les avis et déboires des
mutualistes retraités.
Bahloul Mansour et Saâdi Youcef, Bordj El Bahri, wilaya d’Alger
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