Monde : Les chrétiens d’orient, rite sacrificiel du triomphe
du GME
Tuez-les, tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens !
De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari
Les chrétiens d’Orient vivent une véritable tragédie qui peut se
transformer en plusieurs génocides. La feuille de route du terrorisme au
Moyen-Orient étant la même — ou presque — que celle tracée par les
Etats-Unis et l’OTAN.
Les Eglises non latines de cette région du monde que l’on désigne sous
le vocable de «chrétiens d’Orient», sont éligibles à symboliser le rite
sacrificiel contemporain à partir duquel la reconfiguration de l’Orient
et du Maghreb aura lieu.
C’est une belle opportunité, en effet, que d’intervenir au sol,
directement, pour mettre fin aux massacres des chrétiens au nom des
droits de l’Homme, de la civilisation, des valeurs universelles et de
«l’âme chrétienne» de l’Occident.
Cette affaire mobilisera tout le monde, ici. Les laïcs, les
républicains, les royalistes, les ONG, les courants de toutes les
obédiences se réclamant de l’héritage de Jésus. Pourtant, au
commencement, était l’intervention américaine en Irak, puis les troubles
fomentés par la CIA, les néo-conservateurs et l’Alliance atlantique
en Syrie. Les Etats irakien de Saddam Hussein et syrien de Bachar Al-Assad,
séculiers, certes imparfaits, mais laïques où la religion ne régente pas
la vie dans la cité, ont été la cible principale des va-t-en-guerre
occidentaux.
Pas la monarchie des Al-Saoud, moyenâgeuse, rétrograde et décadente, ni
les autres dynasties aux alentours du même acabit (Qatar, les
Emirats...). Les stratèges américains, instruits par la CIA, ont
identifié les priorités.
La première étant d’abattre le républicanisme et ne pas permettre
l’édification, pas même les premiers fondements, d’Etats nationaux,
indépendants souverains qui risquent de ne pas obéir aveuglément comme
le font Riyad en Orient et Rabat au Maghreb.
Il n’est pas inintéressant de constater que depuis deux décennies, ce
sont l’Égypte, l’Algérie, la Tunisie, l’Irak, la Syrie, aujourd’hui, le
Yémen qui ont subi ou qui subissent des troubles importants.
L’Irak a déjà explosé alors que la Syrie ne tient que grâce à la
vigilance de son armée et de populations civiles qui ont compris la
nature du complot contre leur Etat. Ce n’est pas par hasard qu’en Syrie,
ce sont les communautés chrétiennes qui soutiennent le régime Bachar Al-Assad.
Les malheureux chrétiens de ce pays sachant, parfaitement, que le
démantèlement de Assad signifie la fin de leur existence plus que
millénaire en cette terre. L’exemple irakien, tout proche, et les
malheurs subis par leurs frères en religion les enseignent sur leur sort
plus que n’importe quelle analyse experte. L’impérialisme n’est pas, par
nature, religieux, il n’hésitera pas à laisser «crever» les chrétiens
d’Orient pour mettre en branle son nouveau projet dans cet espace. Le
projet existe, il porte le nom de GME, Grand-Moyen-Orient pour les
francophones. Initié du temps de Bush-fils, il est pris en charge par
l’équipe Obama. La différence entre les deux n’est pas d’ordre
doctrinal, mais tactique. Obama privilégie le travail de sape, le boulot
du renseignement, l’appui sur des forces locales à l’expédition punitive
des bidasses, de l’armée régulière. L’actuel président américain a, en
fait, éliminé du GME les scories, les aspects esthétiques défigurants. Le
chef de la Maison Blanche veut un remodelage du Moyen-Orient sans les
horreurs apparentes que la méthode Bush charriait, un tracé de nouvelles
frontières sans Guantanamo. Boulot que réalisent, ces jours-ci, l’Arabie
Saoudite et les autres coalisés au Yémen sous prétexte d’endiguer
l’influence de l’Iran. Alors que les Houthis sont yéménites depuis la
nuit des temps, que leur rite, chiite, certes, est le plus proche du
sunnisme, et que Téhéran s’est plutôt montré discret en cette affaire.
Les chrétiens d’Orient ? Et si le plan était de les laisser crever ou
partir, Dieu, après tout, reconnaîtra les siens ?
A. M.
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