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Rubrique Culture

Théâtre Le message poignant De nos frères blessés

La pièce De nos frères blessés, de Joseph Andras, mise en scène par Fabrice Henry et jouée lundi soir au Théâtre Abdelmalek-Bouguermouh  au 3e jour du Festival international du théâtre de Béjaïa, a ému jusqu’aux larmes tant elle était poignante et son récit bouleversant.
L’histoire, qui met au jour le parcours héroïque mais singulier de Fernand Iveton, un travailleur algérien d’origine française, engagé foncièrement dans le combat de Libération nationale, mais qui a dû le payer de sa vie, ayant été sauvagement torturé et condamné à mort à l’issue d’un simulacre de procès, puis guillotiné en 1957, a secoué et ébranlé tout le public, pourtant habitué à entendre des faits de guerre invraisemblables. Dans la région, notamment dans ses montagnes, il n’y a pas de famille, sinon des cas rares, qui n’ait été confrontée ou entendu des récits sur des violences coloniales inouïes. Et pourtant, ce soir, il a cédé au drame Iveton, dont beaucoup ignoraient peut-être l’existence, mais qui le découvrent dans sa vérité, ses engagements, ses convictions, mais aussi toute sa fragilité et, surtout, le martyre subi. Un homme dont la vie s’est  brisée tel un vase de porcelaine, dans le corridor de l’aveuglement et de la bêtise et qui n’a pu échapper à l’échafaud, malgré une forte mobilisation et les discours humanistes de l’administration coloniale d’alors, d’autant que dans sa propagande, il n’y avait pas de soulèvement, encore moins de guerre, mais juste des «événements».
Alors il a fallu le liquider brutalement pour en faire un exemple et conditionner, ainsi, tous les Français d’origine algérienne en situation d’être tentés de suivre son modèle. Car au niveau des arguments ayant présidé à son exécution, la sentence a été plus que disproportionnée.
Et pour cause : Iveton, la trentaine non révolue, a été arrêté à Belcourt (Alger) pour avoir caché et déposé une bombe dans son lieu de travail. Un engin, toutefois, qui n’a pas explosé ni tué quiconque, ayant été dissimulé dans un endroit où il ne pouvait faire de victimes. L’objectif d’Iveton n’était autre que celui d’éveiller les consciences et d’attirer l’attention sur les massacres d’Algériens.
Pour autant, son geste a été interprété comme un «acte terroriste» et, à ce titre, il a été traité comme tel, en l’occurrence comme «un rebelle, un traître, un félon, un blanc vendu aux crouilles». Et la demande de grâce, introduite auprès des autorités françaises, notamment, François Mitterrand, alors ministre de l’Intérieur et ultérieurement devenu président et artisan, en 1982, de la loi sur l’abolition de la peine de mort et qui fut rejetée.
Pour mettre en scène ce drame, Fabrice Henri n’a pas eu recours à quelque artifice, se contentant, hormis quelques passages romancés, de reproduire fidèlement le livre de Joseph Andras, récipiendaire du prix Goncourt du «1er roman», en 2016, qu’il a refusé, du reste, d’accepter.
Le metteur en scène a fait la part belle à la narration, laissée à l’apanage de 4 comédiens d’exception (François Copin, Clémentine Haro, vincent Poudroux et Thomas Résende), qui ont magnifié le texte original en le déclamant dans une émotion et un réalisme époustouflants.
En fait, son succès, au-delà de la performance des acteurs, doit beaucoup également à la technique scénographique utilisée, empruntant surtout au théâtre actif qui associe dans un jeu commun acteurs et spectateurs dans une dynamique partagée d’écoute et d’engagement. Plusieurs spectateurs ont été conviés ainsi à lire des passages de lettres d’Iveton à sa femme, ou campant, sur scène, quelques rôles de condamnés à mort, sur le point de passer sous la lame de la guillotine, sur fond d’un chant révolutionnaire, Min djibalina, entonné collectivement.
Un spectacle singulier, original, bien servi par les comédiens et surtout par la qualité et la puissance du texte, que d’aucuns qualifient de chef-d’œuvre.

 

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