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Rubrique Les choses de la vie

19/04/2019 : début de la vraie bataille de succession

Beaucoup d'observateurs et d'hommes politiques nous assuraient, avec moult arguments puisés dans un registre politique poussiéreux et dépassé par les évènements, qu'il n'y aura pas de cinquième mandat ! Comment ont-ils pu ne pas voir la détermination et même l'obstination de plusieurs cercles périphériques du pouvoir, et notamment les forces de l'argent, qui sont des forces politiques identifiées, voire dans certains cas militaires (l'affaire dite des généraux a mis fin au tabou), à vouloir la perpétuité de ces mandatures en série qui les mettent à l'abri de toute mauvaise surprise tout en leur assurant plus de dinars et de dollars. Ils ne lâcheront pas ! Quand on est convaincu de cela, on ne se pose plus la question de savoir s'il y aura un cinquième mandat ou non.
A leur décharge, ces observateurs ont pu être trompés par ce moment de doute troublant qui a traversé les hauteurs du système. Un événement quelconque a dû se produire qui a poussé les hauts dirigeants — qu'ils soient reconnus ou «associés» par une proximité quelconque — à envisager une autre issue. Probablement, choisir un nouveau candidat du consensus capable de protéger les intérêts de tout le monde. D'abord, quelle est la nature de cet événement, pourquoi nous y croyons, quelles sont les raisons du changement de cap et quels sont les scénarios pour
l'après-18 ? 
Primo, il y a de fortes chances qu'il s'agisse d'un affaiblissement physique du chef de l'Etat que tout le monde a pu voir dans une forme précaire lors de sa sortie pour l'inauguration de la mosquée de Ketchaoua et de deux nouvelles stations du métro. En outre, il ne reçoit plus de visiteurs étrangers de haut rang et ne préside plus de Conseils des ministres. Il est possible aussi qu'il ait lui-même voulu sortir par la «grande porte» comme l'affirment certains mais nous n'y croyons pas parce que l'homme n'est pas du genre à abandonner car certainement convaincu de la nécessité de sa présence au sommet de l'Etat pour «parachever» ce qu'il pense être le grand projet de modernisation du pays. 
Mais il n'y a pas que cela qui nous permet d'avancer qu'il y a eu un moment de flottement dû à une situation imprévue, comme l'aggravation de l'état de santé du Président. L'Algérie semble avoir perdu sa voix sur le plan diplomatique ! Ce n'est pas dans les habitudes de Bouteflika de pencher vers l'Arabie Saoudite, au détriment de l'Iran ; ce n'est pas dans ses habitudes de se taire devant l'ingérence intolérable des Occidentaux et leurs honteuses pressions sur le Venezuela ; ce n'est pas lui qui dénonce le lancement d'un petit missile houti sur Riyad tout en observant un silence royal sur le bombardement d'un car rempli d'enfants ! Au plus fort de la domination, victorieuse à ce moment-là, des forces arabo-impérialo-sionistes en Syrie et, au moment où le monde boycottait le pouvoir syrien isolé, il n'a pas hésité à garder l'ambassade algérienne à Damas ouverte, maintenir des liens privilégiés avec Bachar Al Assad et même envoyer l'un des deux ministres des AE dans une capitale dévastée ! Et puis, on a beau le critiquer sur le plan intérieur, c'est probablement l'un des diplomates les plus brillants du XXe siècle encore en vie ! Ce n'est pas normal que notre diplomatie tourne en rond en Libye et au Mali où elle n'a que des mots creux comme ultime riposte à des situations qui s'enlisent dangereusement. Cette diplomatie n'a plus aucun ressort et ne brille guère par les positions inébranlables du passé, ni par ses initiatives reconnues par tous. Elle vit en tentant de vendre l'image d'une paix et d'une stabilité dont on oublie de dire qu'elles ont été arrachées d'abord par le sacrifice d'une nouvelle génération de martyrs. Quant à la «déradicalisation», tous les jours apportent les preuves d'une dangereuse radicalisation de la société algérienne coincée entre les salafistes et les Frères musulmans ! C'est comme si cette diplomatie n'était plus irriguée par sa sève nourricière !
Secundo, face donc à cette situation nouvelle dont nous ignorons l'origine exacte, la solution d'un autre candidat du consensus a dû s'imposer. Mais, pas pour longtemps car les intéressés ont dû comprendre qu'elle est périlleuse pour eux et leur avenir dans ce pays. D'abord, en termes de crédibilité internationale, elle ne présente plus les mêmes garanties ; ensuite elle porte les germes d'une implosion du système, aucun des candidats potentiels n'ayant la capacité de large rassemblement d'un Bouteflika. Enfin, ce candidat, ne venant pas du sommet de la pyramide mais d'un de ses côtés politiques, risque de ne pas être reconnu par les autres côtés : d'ailleurs, certaines sources évoquent une mésentente à propos du nom de ce nouveau candidat du consensus. Personnellement, j'ai toujours cru que Bouteflika briguerait un cinquième mandat comme je suis certain qu'il sera élu au matin du 19 avril avec le score habituel ! 
Tertio, que va-t-il se passer au lendemain de cette victoire fêtée jusqu'à l'aube ? Si l'on reste dans cette réalité où le Président est gravement malade, rien ne dit que son état de santé ira mieux miraculeusement le 19 avril ! Donc, et en toute logique, les véritables décideurs devront agir vite. D'abord, et pour remercier l'oligarchie de son soutien indéfectible, tout ce qui a été annulé par le Président Bouteflika, comme le partenariat de la honte «public-privé», sera remis au goût du jour. Les forces de l'argent auront plus d'argent mais rien ne dit que les travailleurs et les démunis bénéficieront des mêmes avantages. Au contraire, la révision des subventions aura des conséquences dramatiques sur de larges pans de la société. Boulimique, l'oligarchie voudra réduire les lois du travail à leur plus simple expression, alléger la protection sociale des travailleurs et «sauter» le 51/49 qui est une garantie de pérennité pour l'industrie nationale et un élément de souveraineté indiscutable. Les 51% permettent à la décision nationale de rester maîtresse en Algérie car si l'actionnaire étranger a le pouvoir, il peut arrêter la production et se transformer en importateur comme cela s'est passé avant cette loi. Comme il peut vendre l'usine à un Israélien sioniste ou à un ancien de l'OAS, revanchard et raciste et là, bonjour les dégâts(*) ! Sur le plan économique, c'est ce qu'ils entendent par «réformes» : sombrer dans le néolibéralisme !
Sur le plan politique, les promesses sont nombreuses mais si l'on ne crée par rapidement des régions aux larges pouvoirs locaux, on ne fera rien contre la centralisation excessive. Sur la démocratie et sa pratique, ce serait surprenant de voir l'administration endosser subitement les habits de la neutralité ; ce serait également étonnant d'assister au respect du libre choix des votants et donner les résultats des élections à 20 heures ou même à minuit ! 
Sur le plan institutionnel, le scénario le plus probable est que l'on se dirige rapidement vers une révision constitutionnelle mais pas pour les raisons évoquées dans la lettre du Président-candidat. Nous pensons que l'objectif premier de cette révision est de créer le poste de vice-président qui remplacera le chef de l'Etat en cas de défection. Un système comparable à celui des Etats-Unis : le vice-président ira jusqu'au bout du mandat. L'oligarchie a besoin de quelques années de prolongation pour démanteler ce qui reste de l'Algérie révolutionnaire.
Ici, une question primordiale se pose et s'impose : qui, pour ce poste ? Nous avons déjà évoqué l'éventualité d'un désaccord des forces en présence sur le nom du successeur quand la non-présentation de Bouteflika était dans l'air. Le problème sera résolu autrement, et en faveur du candidat le plus proche du cercle présidentiel car nul ne pourra s'opposer à une décision attribuée au président de la République. 
Personne ne nous dit plus sur la guéguerre Ouyahia-Louh mais c'est peut-être par là qu'il faut commencer pour lever une partie du voile qui brouille cette bataille de succession, sujet principal des prochains mois.
M. F.

(*) 51/49 : s'il s'agit d'un atelier ou d'une petite usine sans intérêt, oui, on peut céder une majorité à l'actionnaire étranger. Mais ça reste extrêmement dangereux pour le reste. 

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