Placeholder

Rubrique Les choses de la vie

Autant en emporte le temps !

J'ai déjà abordé cette question dans deux chroniques parues il y a dix ans au moins. Il s'agit de la perception que nous avons de l'écoulement du temps et des changements qui interviennent au niveau de cette sensation en fonction de l'espace où nous nous trouvons. Je m'explique : quand je suis à Alger, j'ai l'impression que le temps court très vite alors que j'ai une perception d'un temps plus lent lorsque je me trouve chez moi, à la campagne. De la ville à la campagne, de la grande course contre la montre à la paisible ronde des heures, le temps semble s'être étiré ! 
Mais il serait absurde de penser que le temps ne s'écoule pas de la même manière partout. Dans le centre enfiévré de la capitale ou dans les champs venteux de Bir Sedra, l'heure compte toujours soixante minutes et la minute soixante secondes et cela invariablement de l'endroit où nous nous trouvons. En fait, le calcul du temps obéit toujours aux mêmes règles et une très grande précision permet aujourd'hui de le compter en milliardième de seconde ! Non, le temps n'a pas changé et ne change pas ; c'est notre conscience qui nous suggère ce changement. 
Sur le plan scientifique et depuis les fantastiques découvertes d'Einstein, nous savons que le temps n'est plus cette entité absolue et uniforme que l'on connaissait avant le XXe siècle. La corrélation espace-temps et la notion de relativité ont fondamentalement changé notre connaissance du temps. Mais il n'est nul besoin d'aller aussi loin, ni se compliquer l'existence avec des théories rébarbatives pour expliquer cette perception que nous avons d'un temps qui va plus vite. En effet, notre rapport au temps est altéré par des facteurs dont nous ne mesurons pas toujours l'impact sur notre vie quotidienne et la manière de gérer nos journées. 
L'espace dans lequel nous vivons modifie notre perception du temps. Le formidable développement des technologies et l'accroissement du flux d'informations qui parviennent des coins les plus reculés et qui sont instantanément à notre portée grâce aux nouvelles technologies rendent le rapport au temps différent de ce qu'il était au cours des précédents siècles. Et les choses se sont accélérées avec la naissance du cyberespace qui est une réalité incontournable de notre monde contemporain. Nous sommes passés à un monde géographiquement limité — nos grandes villes sont devenues le nouveau «territoire sanctuaire» — mais, en même temps, ce monde s'est infiniment étendu sur le plan de la connaissance et de l'information. Ce «village global» est un espace virtuel qui n'a rien à voir avec l'espace géographique où nous vivons ; et c'est ce paradoxe qui explique en partie notre perception d'un temps plus rapide, plus fou ! Nous sommes destinataires d'un flot prodigieux et ininterrompu d'informations qui nous donnent la sensation d'aller plus vite que le monde géographiquement limité qui nous entoure.
Dans les époques antérieures, l'information était centrée sur la vie utile. Son caractère pratique la rendait accessible à tous et immédiatement rentable ; elle correspondait aux besoins des personnes et cadrait avec l'espace géographique où elle était diffusée. 
Aujourd'hui, la vie citadine, socialement étriquée, coincée entre le travail, les transports et la maison, réduit davantage le champ spatial dans la mesure où les limites du monde réel sont également celles du milieu urbain, de la cité au sens classique du terme. Tout cela conduit à un rétrécissement de l'espace-temps qui modifie radicalement notre perception du temps. En restant dans le domaine de la vie sociale, il faut signaler qu'en changeant d'une manière fondamentale, cette dernière nous impose une nouvelle façon de gérer notre temps. La multiplication des loisirs, l'arrivée des nouvelles technologies et le temps que nous mettons dans les embouteillages pour aller et venir entre le travail et le domicile, ou pour nous déplacer simplement à l'intérieur du tissu urbain, nous prennent beaucoup de temps. 
Un temps qui s'écoulait plus paisiblement lorsque nous regardions une seule chaîne de télé, que nous n'avions pas beaucoup de loisirs, ni d'internet et que nous rentrions chez nous en quelques minutes ! Ce temps perdu, cette hâte à joindre les «deux bouts» du temps, la course contre la montre qu'entament les citadines dès leur réveil matinal sont des éléments-clés qui expliquent leur perception d'un temps qui va plus vite. 
Mais il existe d'autres facteurs qui déterminent ces changements de perception. Je lisais récemment un texte où l'auteur note qu'un passage de temps est perçu différemment dans certains moments, selon notre état d'esprit : «Imaginons que nous sommes dans un de ces jours où tout semble contre nous, écrit-il. Dans des moments pareils, le temps passe très lentement et nous avons l'impression que ce jour-là ne va pas finir. Bien au contraire, quand nous éprouvons de la joie et que notre vie ne semble pas ennuyeuse, le temps “voyage” à une très grande vitesse.» (fin de citation). À vous de vérifier cette assertion. Mais il est clair aussi que le temps court plus vite au fur et à mesure que nous vieillissons. Grâce à la découverte de Paul Langevin, on peut imaginer le scénario suivant pour bien illustrer la perception du temps. Imaginons que votre frère jumeau part pour un voyage spatial, à une vitesse pas très lointaine de celle de la lumière. Pour vous qui êtes resté sur Terre, le voyage durera plus longtemps que le temps du parcours réel de votre frère. Car, comme il a voyagé à la vitesse de la lumière, il aura moins vieilli que vous ! Cependant, cette théorie est remise en cause par de nombreux scientifiques. De toutes les manières, la question de la dilatation du temps ne concerne pas directement notre sujet et la théorie des jumeaux ne peut être vérifiée que lorsque l'homme pourra se déplacer à une vitesse avoisinant celle de la lumière. 
Notre monde va trop vite, plus vite que nous. Alors, sachons en saisir chaque moment pour en faire une éternité de bonheur. A ces jours qui passent trop vite et qui sont gaspillés dans la satisfaction des ego, bas instincts matériels et calculs mercantiles; à ces jours où le sordide côtoie l'indigne, sachons opposer la sagesse et la tolérance, la bonté et la fraternité pour multiplier à l'infini ces instants où le temps cessera de courir inutilement pour devenir une suite ininterrompue de gestes utiles, d'actes positifs. Nous aurons alors compris que si la durée appartient à l'éternité, nos petits parcours d'humains peuvent devenir immortels si nous les élevons au niveau des grandes valeurs humaines que sont la fraternité et la solidarité.
M. F.

 

Placeholder

Multimédia

Plus

Les + populaires de la semaine

(*) Période 7 derniers jours

  1. Affaire USM Alger - RS Berkane La décision de la CAF tombe !

  2. Coupe du monde de gymnastique L'Algérienne Kaylia Nemour s'offre l'or à Doha

  3. Demi-finale aller de la Coupe de la CAF Le match USM Alger - RS Berkane compromis, Lekdjaâ principal instigateur

  4. Le stade Hocine-Aït-Ahmed de Tizi-Ouzou pourrait abriter le rendez-vous La finale se jouera le 4 mai

  5. Coupe de la CAF, le match USMA-RS Berkane ne s’est pas joué Les Usmistes n’ont pas cédé au chantage

  6. Temps d’arrêt Lekdjaâ, la provocation de trop !

Placeholder