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Rubrique Société

Saïd Missoum, le marionnettiste : «Le théâtre des marionnettes est un défouloir pour les enfants»

Âgé aujourd’hui de 77 ans, il garde toute sa vivacité et son esprit joyeux qui fait le bonheur des enfants et des grands à travers ses spectacles de théâtre de marionnettes. Lui, c’est Saïd Missoum, le marionnettiste, un homme affable avec qui nous avons eu du plaisir à bavarder lors de la Journée nationale de l’artiste où il a été enfin honoré à travers une distinction pour ses 40 ans de carrière.
Il est une référence dans l’univers des marionnettistes en Algérie et son parcours il nous le conte avec nostalgie. Au départ, il était épris de la scène et rêvait de devenir comédien. Il se retrouve technicien de la sono au Théâtre régional d’Oran, c’était dans les 
années 80… «J’ai commencé le théâtre à l’âge de 13 ans au Petit Théâtre à la rue de Chanzy plateau Saint-Michelle à l’époque coloniale. Je ne savais pas que ce que je pratiquais était du théâtre. À vrai dire, c’était un groupe de FIDA et Karoumia Mohamed dit Draoua, à Medioni un quartier porte son nom, qui a pris Bakhti Mohamed et moi alors que nous étions des gosses pour camoufler devant les Européens et Kaki venait en amateur de Mostaganem et Sayem 
El Hadj de Bel-Abbès.» Une période qui a beaucoup contribué à sa culture personnelle, ainsi qu’à son apprentissage pour le 4e art, puisque, dit-il, à l’époque, tous les samedis il y avait un spectacle suivi d’un débat. «J’ai vu tous les spectacles de Kaki et de Sayem.» C’est en 1967 qu’il prend part, en tant que comédien, à la première édition du Festival national du théâtre amateur. «En 1969, j’ai créé la troupe du théâtre de l’Atelier, il y avait Bakhti, moi, Belkaïd, Belhadj qui est en France.» 
Une aventure riche et enrichissante qui a duré près de 25 ans, suite à quoi Saïd Missoum décide d’aller vers d’autres horizons. Il quitte la troupe et tente un recrutement au niveau du Théâtre régional d’Oran en tant que comédien. «Malheureusement, on me signifie qu’il n’y avait pas de poste budgétaire pour un comédien, on m’a offert le poste de sonoriste.» Un travail qui n’était pas de tout repos pour le comédien qui n’avait qu’une envie «s’en débarrasser», comme il aime à le dire. «J’ai alors proposé un projet à la direction du TRO de l’époque, c’était en 1989, pour élaborer un spectacle de marionnettes, plus précisément avec la thématique du cirque.»
Une proposition faite à l’époque sans aucune chance d’y parvenir puisqu’il n’avait pas d’expérience dans ce domaine et encore moins dans la fabrication de marionnettes. «Je voulais absolument me débarrasser de la  sono, mais le directeur de l’époque savait que je ne maîtrisais pas le projet que je lui proposais, il avait alors émis des réserves.» Ce sera grâce, dit-il, à Saïd Bouabdellah qui était, à cette époque, régisseur au TRO, puis quelques années plus tard il en deviendra le directeur, qu’il a pu passer de sonoriste à marionnettiste. «C’est lui qui a su convaincre la direction de me donner une chance en me fournissant seulement de quoi acheter le matériel pour la confection des marionnettes.» 
Au début, il ne saura pas par où commencer ni comment parvenir à fabriquer une seule marionnette, il était perdu et s’est endormi avec la peur de ne pas assumer. Ce jour-là,  à 3h du matin, il se réveille. «J’ai l’idée de la coupe, je colle et je finis par réaliser ma première marionnette.» 
 Depuis, il a parcouru un long chemin et il a acquis de l’expérience et de la maturité et son travail est devenu plus professionnel, recherché et esthétique et ses pièces de théâtre de marionnettes connaissent un franc succès, les salles affichent complet.
Actuellement, il a développé son travail avec de la mousse, du papier mâché, il parvient à créer plusieurs personnages. «J’ai réalisé des marionnettes des Muppets eux-mêmes. J’ai aussi réalisé un spectacle de Pinocchio, monté par mon ami Benchmissa Kada de SBA, un autre professionnel des marionnettes. Un autre où les animaux sont les vedettes, les astres… mais toujours avec un message éducatif pour les enfants.»
L’évocation de son ami de longue date, son frère de lutte et de belles aventures, qui a partagé tant de choses avec lui, le défunt Blaha Benziane, est l’un des moments forts de notre entretien. «J’ai rejoint sa coopérative le Triangle ouvert qu’il avait réalisée avec les regrettés Sirat et Hamouda. C’est alors qu’on a créé le spectacle 
‘’Ettefah 3’’ version marionnette où j’ai assuré la scénographie et la mise en scène.»
Même si le théâtre des marionnettes connaît un grand intérêt auprès du public, notre interlocuteur estime que cet intérêt n’est nullement matériel pour le créateur du spectacle mais porteur d’un intérêt pour l’enfant qui se défoule énormément durant les représentations. «J’ai sillonné toute l’Algérie, je suis allé jusqu’à Tamanrasset, à Tindouf,  Béchar et  Ghardaïa.» C’est un accueil des plus chaleureux qu’on lui réserve à chaque fois. Toutefois, il déplore le fait que dans cette discipline, «il y a les pseudo, les parachutés, qui y ont vu un intérêt et par conséquent on assiste parfois à de la débilité, aucune recherche ni esthétique». La solution ne résiderait-elle pas, entre autres, dans la formation de la relève ? À cette remarque, il nous dira : «Pendant la pandémie, je suis parti à Béchar où j’ai assuré la formation de 30 éléments avec le style des Muppets Show, puis à Ghardaïa j’ai lancé une formation pour  animatrices de crèches.»
En parallèle, tous ceux qui le sollicitent il les prend sous son aile et leur apprend l’art de donner vie aux marionnettes, au grand bonheur des tout petits. 
Des projets, des histoires, des personnages, il en a plein la tête et le cœur, il leur donnera vie tant qu’il gardera sa fougue pour perpétuer cet art et voir des étoiles briller dans le regard des tout petits.
Amel Bentolba

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