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Kamel BERROUDJI (Ex-international et Trésorier de l’AAIF) : «L’OMR est en voie de disparition»

Kamel Berroudji a été l’un des meilleurs ailiers droits du football national des années 60 et 70. Son explosivité, sa vitesse et ses débordements ont fait les beaux jours de l’OMR, de l’USMA et aussi de la sélection nationale. Aujourd’hui, à plus de 70 ans, il est toujours en activité comme trésorier de l’Association des anciens internationaux à laquelle il apporte sa longue expérience dans le secteur bancaire. Retour sur le parcours de la légende du... Ruisseau.

Le Soir d’Algérie : Vous avez débuté à l’OMR, mais dans quelles circonstances ?
Kamel Berroudji : Disons que c’est l’OMR qui m’a lancé. J’ai débuté un peu tard puisque c’est en junior que j’ai intégré cette équipe. Auparavant, j’ai été formé dans la meilleure école, celle de la rue et du quartier.

A l’OMR, vous étiez dirigé par un des meilleurs entraîneurs de l’histoire du foot algérien, le regretté Smaïl Khabatou.
Oui, Smaïl Khabatou a décelé très vite mes qualités mais je dois dire que Pelé aussi m’avait remarqué.

Le roi Pelé lui-même ?
C’était lors du fameux match Algérie-Brésil à Oran en juin 1965. Moi, je jouais avec la sélection juniors qui affrontait l’Allemagne, championne d’Europe à l’époque, en ouverture de cette grande rencontre de gala. Ce jour-là, nous avions gagné par deux buts à un et en me voyant évoluer, Pelé s’est tourné vers nos dirigeants en disant : «Mais, vous devriez faire jouer ce jeune avec votre équipe nationale !»

Après cette rencontre Algérie-Brésil à Oran, une deuxième manche devait avoir lieu à Alger, mais elle fut annulée à cause du coup d’Etat du 19 juin 1965. Comment l’aviez-vous vécu ?
Ce que je retiens surtout, c’est que Ben Bella m’avait applaudi ainsi que mes coéquipiers pour notre belle victoire sur les Allemands. Nous étions jeunes et ce n’est que plus tard que nous avons appris l’annulation du match et l’annonce du coup d’Etat.

A l’époque, votre modèle c’était le brillant Brésilien, Garrincha qui occupait le même poste d’ailier droit comme vous.
Bien sûr, il y avait Garrincha, mais aussi Amancio du Real de Madrid. Par contre, Lucien Leduc, l’ex-entraîneur français de l’EN, me surnommait Johnstone en référence à l’ancien rouquin dribbleur du club écossais de Celtic Glasgow.

Mais c’est lors d’une dispute avec Lalmas qu’il vous a surnommé ainsi...
En fait, le CRB formait l’ossature de l’EN dans les années 60. Je m’étais accroché avec Djemaâ, le milieu défensif du Chabab.

Lalmas était capitaine mais il était aussi très autoritaire. Alors, il est intervenu et je lui avais répondu sèchement que cela ne le regardait pas. Enervé, il s’est tourné vers Leduc en disant qu’il prenait son sac et qu’il n’était plus capitaine. A ce moment-là, c’est moi qui ai pris mes affaires en lançant au sélectionneur : «M. Leduc, moi je m’en vais. Prenez onze joueurs du CRB et tout sera réglé.» Il m’a retenu en criant : «Non, Johnstone, reviens.» Ensuite, cela s’est arrangé.

En ces années-là, au sein de l’équipe nationale, il y avait un sérieux conflit entre Lalmas et Mekhloufi.
Oui, c’était vraiment chaud entre les deux. D’ailleurs, lors d’une rencontre face au Maroc, Mekhloufi avait hérité du brassard de capitaine et Lalmas n’a pas du tout apprécié, ce qui s’était ressenti sur notre rendement puisqu’on a fait match nul, deux partout, avec deux réalisations de Hachouf pour nous.

En fait, c’était un peu l’origine de ce sempiternel problème entre les pros évoluant à l’étranger et les locaux ?
On peut dire qu’avec Mekhloufi qui était le stratège de l’AS St-Etienne en France et Lalmas qui était le maître à jouer du CRB, le problème entre pros et locaux avait déjà débuté.

En ce qui vous concerne, après plusieurs années à l’OMR, vous rejoignez l’USMA en 1972 où vous resterez quatre saisons.
Je suis arrivé à l’USMA un peu épuisé, car en Algérie, on ne savait pas préserver la santé d’un joueur. Il n’y avait aucun moyen de récupération et en plus à l’OMR, je devais disputer non seulement les matchs officiels mais aussi toutes les rencontres amicales. Une fois, à l’Est du pays, l’OMR était invité. Comme j’avais deux côtes cassées, je voulais déclarer forfait, mais les dirigeants m’ont fait jouer quand même sous la pression des organisateurs qui n’entendaient pas voir évoluer l’OMR sans Berroudji, et j’ai évolué avec une gaine de protection.

Avec l’OMR, vous n’avez pas remporté de titre majeur, mais avec l’USMA vous avez joué trois finales de Coupe d’Algérie, sans pour autant gagner le trophée.
J’ai gagné un titre de champion de division deux, et participé à trois finales de Coupe d’Algérie, c’était déjà pas mal. Malheureusement, on n’a pas pu s’adjuger le trophée.

Il y a eu cette fameuse finale de 1972 perdue (4-2) face au MCA d’un Omar Betrouni. Vous étiez en concurrence avec lui en sélection pour le même poste d’ailier droit...
Ce que les gens ne savent pas, c’est que Betrouni était plus coté que moi, c’est vrai, mais j’estime que j’étais plus fort que lui.

C’est uniquement votre opinion ?
Non, je vais vous expliquer. Il était plus médiatisé que moi parce qu’il a inscrit des buts décisifs avec la sélection et le MCA. D’ailleurs, je lui ai dit : «Omar tu as eu beaucoup de chance. A chaque fois que tu tirais, le ballon entrait soit en rebondissant sur un défenseur, soit en tapant un poteau.» Et ce discours ne lui a pas plu évidemment.

Mais, en quoi étiez-vous plus fort que Betrouni ?
J’étais plus présent en ce sens que je me repliais souvent pour défendre et ensuite remonter le ballon. Ensuite, j’étais plus vaillant. Moi, je n’avais pas peur d’aller au combat alors que Omar était plutôt craintif. A l’OMR, moi j’étais la cible et le joueur-vedette. Par conséquent, à chaque match, j’avais deux ou trois défenseurs devant moi pour me contrer. Lui, au MCA, il n’était pas la seule star, il était bien entouré avec les Bachi, Tahir, Bencheikh et consorts. Enfin, il m’est arrivé de jouer trois à quatre rencontres par semaine, avec l’OMR, la sélection militaire et la sélection nationale.

C’était éprouvant, un tel programme démentiel sans pouvoir récupérer ?
Oui, une fois en une semaine, j’ai affronté le FC Nantes, cador du championnat de France, qu’on a battu (2-0) avec l’EN. Deux jours plus tard, on a croisé le fer avec le club brésilien de Vasco de Gama. Puis, pas le temps de récupérer que je devais défendre le maillot de l’OMR contre le MCA. Ce jour-là, j’étais vraiment out, ce qui a fait le titre d’un journal : «Quand Berroudji est malade, le Ruisseau s’écroule.»

En raccrochant à l’âge de trente ans, pourquoi n’avez-vous pas fait carrière comme entraîneur ?
Pour la simple raison que je suis quelqu’un qui ne supporte pas que sa mère ou son père soient insultés. Pour moi, les parents, c’est sacré. Mais, j’ai entamé une carrière d’entraîneur avec l’IRB Reghaïa, ensuite j’ai mené une formation de sport et travail jusqu’en quarts de finale de la Coupe d’Algérie et on a été éliminés par l’USMA qui avait plus d’expérience dans cette compétition. Ensuite, j’ai dirigé l’équipe de Si-Mustapha que j’ai fait accéder puis celle de Corso où je n’ai pas pu rester à cause des événements des années 90, et après j’ai arrêté.

Vous avez eu l’occasion de rencontrer trois président de la République. Dans quelles circonstances ?
D’abord en 1965 à Oran où Ben Bella était présent et m’a longuement applaudi lors de ce duel face aux Allemands. Ensuite, lors des finales de Coupe d’Algérie perdues, à chaque fois le président Houari Boumediène me serrait la main et me glissait un petit mot.

Qu’est-ce qu’il vous disait ?
Il me souhaitait de remporter la Coupe d’Algérie. Ensuite, j’ai eu l’occasion de rencontrer et de discuter avec l’actuel chef de l’Etat, M. Bouteflika, avec l’Association des anciens internationaux. D’ailleurs, c’est un homme de caractère. Quand Merzekane lui a indiqué que c’était moi Berroudji, il lui a répondu sèchement «oui, je sais qui c’est».

Vous êtes actuellement le trésorier de cette AAIF (Association des anciens internationaux de football) dont Ali Fergani est le président. Pourquoi cette fonction ?
Parce que j’ai cumulé 48 ans de métier dans la banque et c’est tout naturellement que j’ai hérité de ce poste.

On recense plus de 630 anciens joueurs internationaux algériens. Quel est le rôle exact de l’association ?
Le but principal, c’est de venir en aide à ces anciens internationaux.

Et ils sont nombreux à être dans le besoin ?
Oui, il y en a énormément et notre problème, c’est qu’on ne peut pas contenter tout le monde.

Pourtant, certains d’entre eux vivent bien.
Il y en a très peu qui ont réussi l’après-football. La plupart d’entre eux avaient déjà un commerce et ils ont su le faire fructifier. Mais, la majorité vit plutôt dans la précarité.

Et l’association, comment est-elle financée ?
Grâce à Ali Fergani, qui est bien connu, il y a des sponsors qui aident l’association, mais ce n’est pas énorme. On a reçu également une aide de la fédération à raison de 50 millions de centimes.

Est-ce que vous seriez pour un impôt sur les salaires des joueurs actuels pour le verser à l’association ?
Le problème c’est que les clubs sont en difficultés financières et que ce n’est pas le moment de leur imposer d’autres dépenses.

Quel regard portez-vous sur l’équipe dont vous avez fait les beaux jours, l’OM Ruisseau qui a coulé au point de se retrouver en division inférieure ?
Il y a pire. J’ai appris que c’est un club qui n’a plus d’argent et qui est en voie de disparition. Dommage, parce que c’était une belle école, mais les magouilleurs sont passés par là et ce n’est plus qu’une ruine de ce qu’était vraiment le Ruisseau de mon époque.
Propos recueillis par Hassan Boukacem

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