Des aficionados de Mouloud Hamrouche sont allés jusqu’à sonner à sa porte, lui demandant de se porter candidat à la prochaine élection présidentielle, lui qui a déclaré ne pas pouvoir en être. Cette fois-ci, il n’a pas pris de raccourcis. Il est allé droit au but. Il faut lui en savoir gré, c’est du moins ce que je pense. Même élu président, Hamrouche déclare, haut et fort, qu’il ne pourra rien faire. Un président, élu au suffrage, ne peut rien faire. Ça veut tout dire ! Sauf que « le père des réformes », comme il est surnommé, à tort ou à raison, aurait dû aller plus loin dans sa pensée. Pour être encore droit dans ses bottes. Eclairer davantage le citoyen. Et porter plus la contradiction à ceux qui se présenteront à ces élections. Il y a eu trop de non-dits dans ce pays. On a toujours parlé par euphémisme. Qu’on dise, enfin, les choses par leur nom. Que Hamrouche nous explique donc pourquoi il ne pourrait rien faire ! Bouteflika ne voulait pas être « un trois quarts de Président », qu’on se le rappelle. Voilà, aujourd’hui, un potentiel Président qui refuse d’y aller, parce qu’il connaît la fin. Le futur Président ne commandera pas ; il ne sera pas le premier magistrat du pays. Tebboune, Benflis, et les autres, sont, d’ores et déjà, avertis. Le pouvoir sera ailleurs. Mais où, nom d’un chien errant ? Dites les choses comme elles sont. Vous ne risquez rien. Allez, monsieur Hamrouche, un peu de bon sens, finissez votre idée ; allez jusqu’au bout de votre raisonnement, argumentez et ne nous laissez pas crever de faim. Puis, si jamais vous êtes élu Président, donnez un bon coup de pied dans la fourmilière ! Allez chiche, monsieur Mouloud Hamrouche !
L’Italie organise le championnat du monde de couscous. C’est comme si l’Algérie organisait le championnat du monde des pâtes. Ce ne serait que justice. L’Italie jure ses grands dieux que le couscous est authentiquement italien. Que les Africains du Nord l’ont volé. Personne ne réagit. Ni les Algériens. Ni les Tunisiens. Ni les Marocains. Et moi qui pensais que le couscous était kabyle. Il me faut revoir ma copie. Le couscous est italien. Et le championnat du monde revient, cette année, au Sénégal. Que restera-t-il aux Algériens si on leur enlevait le couscous ? Un plat de pâtes à la sauce bolognaise ! Et si demain les Finlandais revendiquaient la paternité du burnous ! Ibn Khaldoun doit se transformer en ventilateur dans sa tombe. Au fait, Ibn Khaldoun est-il algérien ou tunisien ? Mais comment prouver que le couscous est à nous ? Les historiens peuvent-ils répondre à cette question ? Et la merguez est-elle algérienne ? Au moment où nous nous empiffrons de chawarma, le couscous se fait discret, se tient à l’écart et tente – lui aussi – la harga vers l’Italie. Et si l’Algérie décidait d’organiser un festival du couscous, on pourrait inviter nos voisins italiens pour goûter au couscous de Djelfa, de Ghardaïa ou de Tébessa. Je vois d’ici certains faire la tête. Qu’est-ce qu’il a à parler de couscous au moment où l’Algérie est à un tournant décisif de son histoire ? Qu’est-ce qu’il a à nous bassiner avec ce championnat à la noix au moment où, chaque semaine qui passe, des Algériens sont embastillés ? Voilà où on en est monsieur Hamrouche ! Pouvez-vous faire quelque chose ?
Makhloufi, Taoufik de son prénom, est médaillé d’argent à Doha, dans une épreuve reine, le 1 500 mètres. Il a été tacticien. Intelligent. Rusé. Oui, le Kényan était plus fort. Qu’à cela ne tienne ! Sans trop de fanfare, il a filé le train au médaillé d’or. Il n’a pas lâché. Il n’a pas fléchi. Il n’a pas lâché du regard les talons du Kényan. Comme il me semblait seul, ce valeureux Algérien ! Mais il n’a pas craqué. Il a serré les dents. Il a mené sa course, de bout en bout, comme un pro. C’est un pro ! Il est resté deux ans sans courir. Il a su revenir. Il l’a eu sa médaille. Le drapeau algérien a été levé. Il a eu la victoire sereine. Aérienne. Belle. Il s’est drapé en vert, blanc, rouge. Il a fait les photos de la postérité. Hier, devant mon poste de téléviseur, grâce à la parabole, j’ai été fier. J’ai vibré durant toute la course. J’ai applaudi Makhloufi. Je l’applaudis, encore. Les moments de joie sont rares, en ce moment. Les mauvaises nouvelles courent les rues. Et les pages entières de journaux. Alors, Makhloufi fut l’hirondelle qui, sur ses ailes légères, a fait de ma nuit dernière une nuit printanière. Merci monsieur Makhloufi !
Revenons aux mauvaises nouvelles ! Car je n’en vois pas de bonnes. Je suis désolé, c’est comme ça. La seule bonne nouvelle, c’est la médaille d’argent de monsieur Makhloufi, au milieu d’un ensemble de nouvelles catastrophiques. Tenez-vous bien ! Le moustique tigre (encore !) est signalé à Blida. Pas seulement. Il est signalé à Guelma. Il se balade. Il va, d’ici et là. Il attend son heure, pour nous foutre sa cochonnerie. Pour le moment, il n’a pas encore fait de victime. Il n’y a pas que le moustique tigre qui fait des siennes. Un mur s’effondre. Il en avait marre d’être debout. Fatigué de sa station debout, il s’affale par terre. Sauf qu’il tue deux écoliers et en blesse deux autres. A qui la faute ? Au mur ? Ou à ceux qui ont laissé le mur s’effondrer ? Ou à ceux qui ont construit ce mur ? Pire encore, à Sétif, un criminel a pratiquement égorgé un citoyen. Au centre-ville. Pas loin de la cité administrative de Sétif. Seigneur, comme la vie d’un Algérien est devenue banale. Sans consistance. Sans relief. Nulle d’indices. On s’adosse à un mur. Et on en meurt. On sort de chez soi. Et on se fait égorger. Comme ça ! Dans tout ça, il y a – au quotidien – des saisies de drogue et de psychotropes. Il est loin le temps du zembretto. La harga n’est pas seulement par voie maritime. Elle est aussi dans la tête de l’Algérien. Cet Algérien qui ne voit pas le bout du tunnel. Et ce n’est pas le 12 décembre qu’il le verra. L’Algérien essaie de sortir du tunnel chaque vendredi et chaque mardi. Et le seul bout qu’il voit, c’est l’énorme trou de serrure d’une prison algérienne. Alors, on aura encore de mauvaises nouvelles. Jusqu’à la nausée. Jusqu’à n’en plus pouvoir. Jusqu’à l’ultime vertige. Mardi est un empan de mon rêve. Et le vendredi promet une moisson d’espoir. Le 12 décembre, je le vois très loin. Je ne sais pas pourquoi. A cause, certainement, du poids de toutes ces mauvaises nouvelles. Rien ne va plus dans notre pays !
Y. M.
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