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MOUVEMENT POPULAIRE Pourquoi Bordj-Bou-Arréridj est un fort foyer de contestation ?

L’insurrection citoyenne du 22 fevrier a révélé un foyer de contestation inattendu : Bordj-Bou-Arréridj. Omar Tibourtine essaye de comprendre pourquoi cette ville est devenue la deuxième ville de contestation en importance de mobilisation après Alger ?
Bordj Bou-Arréridj se trouve sur les hauts-plateaux de l’est algérien, à mi-distance entre Alger et Constantine dans l’axe est/ouest et à mi-distance entre Vgayeth et M’sila dans l’axe nord/sud. Sa population est un échantillon assez représentatif de la population algérienne.
En moins de soixante ans, la démographie de la ville a été multipliée par huit en passant de 23 000 habitants à l’indépendance, à 180 000 habitants actuellement.
Située sur les plus importants axes routiers et ferroviaires du pays, la cité bénéficie par ailleurs, d’accès pratiques aux portes du sud par M’sila et à la mer par le port de Vgayeth. Sa population est aussi «derdjophone» dont la majorité a été arabisée par la France coloniale et la pratique religieuse musulmane, qu’«amazighophone», encore liée à Ath-Abbès et Ath-Yaâla, majorée par une présence d’Ihitossen installée depuis fort longtemps et en provenance de haute Kabylie.
BBA s’est construite autour d’un poste avancé de la régence othomane d’Alger récupéré par l’armée coloniale française, entre «El Bibane» à l’ouest, «Ivavoren» nord/est et les monts des «Maadhid» au sud. Un subtil équilibre des populations provenant de différentes tribus n’a, pour autant, pas généré de conflits au point de provoquer de grands drames sociétaux.
La fragilité économique post-indépendance, aggravée par une «réforme, puis une révolution agraire hasardeuse», ont stimulé une scolarisation devenue l’angoisse des habitants. Le résultat est palpable dès le milieu des années soixante. BBA est alors une petite ville avec beaucoup de lycéens et d’universitaires, et tout ce que cela engendre sur le plan sociétal. A cette grande mixité sociale et culturelle, s’agrège un récent pôle économique assez dynamique faisant de la wilaya actuelle (Wilaya 3-Zone1, historique) une région très attractive. Ses activités culturelles, théâtrales, musicales notamment et sportives (Un des plus anciens club de foot d’Algérie –CABBA- et une équipe de volley –NRBBA- qui écrase le championnat national depuis une dizaine d’années) lui attirent beaucoup de sympathie.
Paradoxalement, et pour des raisons inexplicables, la ville n’a pas bénéficié de regard bienveillant de la part du pouvoir central au jacobinisme avéré. Le dernier découpage régional est venu aggraver cette frustration par l’amputation de foyers humains (Ath-Abbès, et Ath-Yaâla) historiquement et sociologiquement liés à la ville de BBA, au bénéfice de wilaya limitrophe !
Lycées, universités, infrastructures sanitaires, culturelles et sportives sont des acquis récents comparativement aux villes algériennes de tailles équivalentes, faisant du «bordjien», un homme formé «ailleurs».
Le bordjien a donc voyagé et connaît comment vit-on loin de son terroir… il s’en est enrichi. Baladez-vous à BBA, et vous pourrez apprécier toute la cuisine algérienne. Saisissant ! Tous les genres musicaux y trouvent leur caisse de résonnance. Surprenant !
Pendant la colonisation et avant la seconde guerre mondiale, l’association des oulémas musulmans y exerçait une grande influence, mais la jeunesse (la progéniture des oulémas), s’est structurée massivement au sein du PPA-MTLD, empruntant ainsi une attitude plus transgressive. Ce qui se passe aujourd’hui dans cette ville ressemble à un écho de cette époque pré-révolutionnaire.
Comme tous les jeunes algériens, les bordjiens ont été nourris par la frustration comme le pouvoir nourri par le mépris (El hogra). Ils sont conscients de leurs potentialités, ils savent qu’ils habitent un pays, une ville, la leur, pouvant être le foyer de leur épanouissement et leur bonheur. Cet état est partagé par tous les algériens, soit. Ce qui différencie la population de BBA est une hypertrophie démographique très rapide qui n’a donc pas eu le temps de briser les liens entre les gens. La majorité des pôles actifs se connaissent encore. La conscience politique n’a jamais été absente. Le terreau et l’histoire de la ville l’ont favorisée. Il n’y a pas encore un éclatement des groupes sociaux. Se connaissant, les gens se mobilisent facilement, aidés en cela par les réseaux de communication modernes. Face à ce profil social, certaines récentes fortunes dont les origines restent à éclaircir sont venues perturber un ordre ancien dans lequel les bordjiens se reconnaissaient mais qui leur échappe aujourd’hui. Ce fait aggrave les frustrations et accentue le sentiment de marginalisation dont on se dit victime. La raison de la colère est ainsi multi-factorielle. La ville de BBA a été transformée, déformée à une très grande vitesse. Intégrer tous les intrants socio-économiques demande un temps d’adaptation difficilement compressible. Les équilibres sont précaires rendant sa jeunesse dynamique, inspirée, sympathique et intelligente et enthousiaste, vulnérable face à toutes les sournoises manœuvres bien réelles ou putatives.
Aujourd’hui, l’Algérie est auscultée par le monde, comme Bordj est ausculté par l’Algérie. La cité et sa population peuvent constituer un tremplin médiatique significatif pour des prétentions dont la neutralité inspire légitimement le doute.
Cette Révolution du sourire, pacifique (Silmiya) a subi quelques tentatives de détournement et reste réceptive au discours des prétendus oulémas en mal de légitimité, aux magnats nouvellement auréolés et affublés de costume d’oligarques en mal de reconnaissance et autres apprentis sorciers de la politique de l’ombre et de la «chkara» aidés par les démons de la fitna et la discorde. D’aucun disait que Bordj serait victime de son succès. Non Bordj, grâce à sa jeunesse, saura éviter les écueils de son enthousiasme, sa fraicheur, et son engagement envers le peuple qui lui a donné naissance. Non la jeunesse bordjenne n’est pas à vendre ! Elle ne négocie pas son âme. Quant au bateau révolutionnaire «Bordj», il saura résister aux tempêtes des «mal intentionnés» pour leur dire : «Fluctuat nec mergitur !». Dima wakfin.
Omar Tibourtine
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