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Rubrique Ce monde qui bouge

22 février 2019 ! Avant ce n’était pas mieux...

Le 22 février 2019, ce sont d’abord des images. Outre celle de ces foules impressionnantes, c’est d'abord celle de la jeune ballerine Mélissa esquissant un pas de danse, plein d’élégance. Une image qui a fait le tour du monde car avant ce 22 février, c’était plutôt des images donnant à voir un peuple caricaturé à l’extrême, à la traîne, disait-on , des peuples marocain et tunisien.... 
L’Algérie était vue comme un « pays pathétique » où « deux cents têtes font la pluie et le beau temps », les Algériens comme « un peuple tué, qui n'a plus de ressort », écrivait le magazine l'Obs du 21 septembre 2011 en rapportant les propos de diplomates français tenus à la Conférence des ambassadeurs de France des 31 août,1er et 2 septembre 2011 !
 C’était cela l’image de l’Algérie à l’étranger. C’est contre cette vision dégradante du pays qui a payé le plus lourd tribut pour sa libération, un pays pris en otage par une clique politiquo-mafieuse, que les Algériens sont sortis le 22 février 2019 pour dire « barakat » (ça suffit) !
Avec la chute de Bouteflika et le démantèlement de tout ou partie du bloc politico-oligarchique, un pas considérable a été fait. L'Algérie a alors basculé dans un autre temps porteur d’espoirs et de nouveaux horizons mais porteur aussi d’incertitudes. 
Si l’Algérie ne peut plus être gouvernée comme avant, et que la rapine à ciel ouvert comme au temps des oligarques ne sera pas sans risques pour les gouvernants, il n’en reste pas moins que le vieux monde n'a pas tout à fait abdiqué. Rien n’est encore joué. Le système, une partie de ses hommes et ses pratiques autoritaires ont survécu à la chute de Bouteflika. Le changement démocratique est un processus continue qui s’inscrit dans la durée.
Les démocrates, c’est un vrai sujet, n’ont pas su profiter de l’espace libéré par le Hirak, pour se renforcer, se structurer, asseoir leur ancrage sociopolitique avec l’apport d’énergies nouvelles et jeunes. Certes, le pouvoir leur met les bâtons dans les roues, en interdisant par exemple qu’ils se réunissent, mais il n’en reste pas moins qu’ils peinent à s’imposer. 
De l’autre côté, ceux qui, à la faveur du Hirak, ont pris le train en marche, et qui rêvent d’un 26 décembre 1991 à l’envers avec le concours de certains démocrates, sont en train de relever la tête et se remettent à espérer. Les islamistes, puisque c’est d’eux dont il s’agit, sont désormais présents, n’hésitant pas à tenter d’encadrer les marches étudiantes, voire à brandir les portraits de Abdelkader Hachani aux côtés des fondateurs du FLN et des figures de l'ALN. Ils n'ont en aucun cas renoncé à ce qui fait leur ADN ! Il suffit de leur demander s’ils sont prêts à abolir le code de la famille et non de l’amender pour soi-disant le rendre moins insupportable pour les femmes ! 
Sur ce sujet et d’autres sujets sociétaux, il est quasiment certain que les Ali Benhadj, Makri, Djaballah ne céderont pas… Or, il s’agit d’un vrai problème qui concerne 50% de la population. Et on ne peut construire un projet de société démocratique en laissant sur le bord de la route la moitié des Algériens. Seraient-elles disposées à être sacrifiées sur l’autel d’un compagnonnage douteux basé sur une alliance conjoncturelle entre des démocrates et les islamistes du courant Rachad ? Accepteront-elles, une fois scellée cette alliance conjoncturelle, qu’on leur dise « merci de ce bon moment, rentrez à la maison et occupez-vous de la cuisine et des enfants » ! Sans doute que non, car elles sont bien présentes dans les luttes, elles occupent de nouveau l’espace, pas tout l’espace, mais ça viendra. Ce qui n’est pas rien quand on sait qu’avant le 22 février, elles ne s'aventuraient pas quand elles n’étaient pas, de manière résurgente, la cible des islamo-conservateurs. Alors, ne les trahissons pas ! 
Le pouvoir politique, quant à lui, poursuit sa feuille de route comme si de rien n’était. Le Président Tebboune et son Premier ministre rendent hommage au Hirak mais sans céder aux demandes de libération des détenus d’opinion émanant de la société algérienne et des ONG de défense des droits humains. Et pourtant, ce bras de fer entre le pouvoir politique et cette partie majoritaire des Algériens qui sortent le vendredi, qui sont demandeurs d’un État de droit et qui n'accepteront pas un retour en arrière au nom de l'ordre, ne peut durer indéfiniment et sans risque majeur pour le pays. Il faudra bien un jour s'asseoir autour d’une table et discuter que réprimer. 
H. Z.

 

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