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Rubrique Ce monde qui bouge

Été 1962, été 2019

Que va dire Bensalah ? Quel avenir pour Bedoui ? Pour l’heure, même si le parallèle semble osé, avec cette affaire Lakhdar Bouregaâ, c’est un pan de notre Histoire, jamais assumée, la crise de l’été 1962, qui revient au galop. 
Cet été-là, alors que les Algériens fêtaient l’indépendance nationale, le FLN/ALN s’entredéchirait pour une question de pouvoir. Ferhat Abbas a parlé d’« Indépendance confisquée », titre de son ouvrage sur cette crise et ses suites, sauf que le libéral Abbas soutenait alors, plus par calcul que par conviction, le « groupe de Tlemcen » dirigé par le duo Ben Bella-Khider, appuyé par l’armée des frontières commandée par Boumediène, contre le GPRA et le « groupe de Tizi-Ouzou » formé par Krim Belkacem-Mohamed Boudiaf, et soutenu essentiellement par les Wilayas III et IV. 
La suite, quoique plus connue, mais pas par tous malheureusement, alimente encore les débats. Ce qui fait que la mise en détention de Lakhdar Bouregaâ, qui a été un des acteurs de cette crise et l’un des rares membres du CNRA (Conseil national de la révolution algérienne) encore vivant, nous a replongés malgré nous dans cette Histoire : ce que nous vivons aujourd’hui, plonge en partie ses racines dans cette crise de l’été 1962 qui aurait fait un millier de morts. 
Bien sûr, l’Algérie de 1962 est différente de celle de 2019. Outre les pertes humaines et matérielles considérables (des milliers de villages détruits ou abandonnés), la guerre avait provoqué le déplacement de 2 à 3 millions de personnes, le regroupement forcé de 2,4 millions de personnes arrachées de force à leurs terres et habitations, un exode de plusieurs centaines de milliers d’autres vers des villes déjà en voie de surpeuplement, le retour de 300 000 réfugiés de Tunisie (et autour de 50 000 du Maroc) qu’il fallait prendre en charge. 
Le pays ne disposait que de 33 ingénieurs, 315 agents techniques, de peu d’enseignants, peu de médecins et pas du tout d’infirmières. Il n’y avait que 14% d’enfants scolarisés ; 85% des Algériens étaient analphabètes. On comptait, selon la Croix-Rouge internationale, 2,5 millions d’enfants atteints de tuberculose et de rachitisme ! L’Algérie de 1962 manquait absolument de tout.
Et la reconstruction dans un contexte de crise au sein des instances dirigeantes du FLN relèvera presque du miracle. Ce sera grâce à ces Algériens, sortis s’interposer aux cris de « sept ans ça suffit » en septembre 1962 entre les combattants en armes, que l’Algérie n’a pas sombré dans le chaos escompté par l’OAS, à l’instar de ce qui s’était passé au Congo et ailleurs en Afrique. 
Quel rapport avec aujourd’hui ? L’époque a changé. La société s’est modernisée et s’est diversifiée socialement. Elle est plus éduquée, plus au fait de ce qui se passe dans le monde. Elle communique plus. Le niveau de vie a évolué. La demande sociale est d’une autre qualité, elle n’est pas celle d’un peuple analphabète qu’on tente d’abrutir en instrumentalisant le religieux. Ce ne sont pas des gens en haillons qui manifestent. On n’est plus en Octobre 88, dans une économie de pénurie, où on a pillé les Souks-el-Fellah.  
Et si ces jeunes qui manifestent font montre d’un pacifisme étonnant, c’est parce qu’ils sont éduqués et instruits. Et s’ils le sont, c’est parce que leurs arrière-grands-parents, peu instruits ou pas du tout, ont payé le prix fort afin que leurs enfants bénéficient d’une scolarité et d’une éducation que le colonialisme français leur avait déniées. Ce qui fait que le chômage et la dégradation sociale, bien que réels, ne sont pas les seuls moteurs de la contestation. C’est cela que le pouvoir politique, ancré dans des certitudes datées, ne comprend pas. 
Pour toutes ces raisons, l’Algérie de 2019 ne peut plus être gouvernée comme en 1962 ou en 2014-19 (le 4e mandat de trop) comme si l’Histoire s’était arrêtée en 1962, comme si la société n’avait pas évolué, comme si elle n’aspirait pas au changement démocratique et au progrès social. Et ce ne sont pas les agitations d’arrière-garde, encouragées en sous-main, des islamo-conservateurs qui vont empêcher la roue de l’Histoire et du progrès social de tourner. 
Quant aux ingérences étrangères évoquées ici et là, soyons sérieux. Dès les premiers vendredis, les Algériens ont dit non à tout parrainage et à toute récupération étrangère, ciblant Macron, Trump, mais aussi les Emirats et les Saoudiens. Alors que quelques jours avant, on avait vu des officiels courir les capitales occidentales pour solliciter leur appui au 5e mandat ! 
Bonne fête de l’Indépendance. 
H. Z.

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