Un confrère particulièrement attentif et rigoureux remarquait, il y a
quelques jours, en s’interrogeant, dans la foulée, sur la portée de la
loi sur les hydrocarbures et le sens de sa contestation dans de telles
proportions et avec autant de détermination. Du texte de loi en
question, il a sorti un détail qui n’en est peut-être pas un mais ce
n’est pas le plus important : entre l’adoption de la loi sur les
hydrocarbures et la sortie du premier baril de pétrole produit dans le
cadre de ce dispositif juridique, il doit se passer au moins… 5 ans !
Pourquoi alors ce point n’est pas sorti dans le débat public sur la
question ? On aurait pu évacuer la question en soutenant qu’il… n’y a
pas eu de débat public mais il y a mieux comme argumentaire, y compris
quand il se décline sous forme d’autres… questions. Deux, plus
exactement, l’une consubstantielle à l’autre. Les voilà, sans hiérarchie
dans l’ordre chronologique : la première consiste à se demander pourquoi
l’adoption d’une loi dont les premiers effets sur l’économie, et,
partant, sur la vie des Algériens, sont si lointains, serait si urgente
au point de la mener au pas de charge ? Pourtant, tout dans le pays
concourt à ce que les décisions importantes, surtout celles qui n’ont
aucun caractère urgent, soient remises à plus tard. Le pays est en
ébullition, une élection présidentielle «imminente» même si elle est
largement contestée, le gouvernement n’est pas vraiment en situation de
crédibiliser des mesures stratégiques tellement sa légitimité est en
cause et le Parlement dans ses deux Chambres est depuis longtemps le
punching-ball préféré de la dérision populaire. Voyons la seconde
question : pourquoi une loi qui a été si peu disséquée par les
spécialistes, en tout cas pas avec l’effort de vulgarisation qu’on
aurait pu attendre, est parvenue à faire l’unanimité… contre elle et
mobiliser autant de monde, au point que le siège de l’APN a été pris
d’assaut une journée durant pour exiger son retrait ? Eh bien, c’est
parce que la confiance ne règne pas et c’est le moins qu’on puisse dire.
Le génie populaire a trouvé la formule et il en a encore usé à
l’occasion : nous n’avons pas besoin de vous écouter pour savoir que
vous mentez ! Surtout quand il s’agit de… pétrole. Des rumeurs, parfois
farfelues, avaient déjà circulé, entre autres sur une vente détournée de
gaz à la France. Allez dire aux Algériens que cette loi sur les
hydrocarbures n’en est pas une confirmation ! Il en est ainsi de la loi
de finances qui a été dénoncée avec autant de fermeté alors qu’elle a
reconduit tous les transferts sociaux et en a rajouté ! La réforme des
retraites a été retirée en dernière instance pour nous dire que,
finalement, elle n’interviendra que dans… quelques années. Pourquoi on
n’a pas fait la même chose avec les hydrocarbures ? La question ne s’est
pas posée mais elle aurait encore fait sourire beaucoup de monde.
S. L.
S. L.