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Rubrique Les choses de la vie

L'après-Covid-19 ou la vraie vie

Un malade, soigné pour le Covid-19 aux Etats-Unis, s'en est sorti miraculeusement au moment où tout le monde le donnait pour mort. Les soignantes ont dû tenir son mobile pour que sa famille puisse lui faire ses adieux au moment du grand départ. Miracle : il survit et sort sous les applaudissements du personnel soignant. Mais, un mois plus tard, Michel Flor reçoit une note d'un million de dollars de la part de l'hôpital Swedich Issaquah où il séjournait. La journée en réanimation lui est revenue à près de
9 000 dollars, c'est-à-dire un peu moins de 200 millions de nos centimes au marché parallèle ! Cela veut dire que si vous restez dix jours dans un lit de réanimation, il faudra que vous ayez les 2 milliards de centimes pour pouvoir sortir indemne de l'hôpital, c'est-à-dire sans être présenté à un juge. En France, c'est un peu plus humain et solidaire mais l'ultralibéralisme est en train de tout pervertir. Cette médecine efficace et moderne a surtout cherché à multiplier les astuces pour gagner plus de sous. Elle abandonne son rôle premier, sa grande mission humanitaire et son devoir de solidarité envers les plus démunis, ces hommes et ces femmes qui se retrouvent souvent à la rue parce qu'ils n'ont plus les moyens de payer le loyer ou de rembourser un crédit. 
Les pays capitalistes se réveillent d'un véritable cauchemar qui avait ­— et qui a toujours — pour nom le Covid-19. Les belles paroles, les envolées touchantes et les discours à coups de fortes doses émotionnelles ne servent plus à rien quand la réalité toute crue s'impose à tout un peuple désarmé devant la maladie, désorienté par les multiples volte-face des pouvoirs pris dans le piège du mensonge et de la manipulation. L'après-confinement est un épisode que nous avons prévu comme un brutal réveil sur un monde toujours debout et qui, bien que peiné par tant de pertes, ne s'est pas écroulé comme le prévoyaient les oracles médiatiques ! La maladie n'a pas décimé les peuples et n'a pas eu les allures catastrophiques de fin du monde qu'on lui présageait. Ce réveil est plus violent chez ceux qui sont allés loin dans l'abandon des politiques protectrices de l’État et livré des pans entiers de leurs économies aux forces privées. 
C'est ce moment de questionnements fondamentaux sur les dérives de la santé privatisée que choisissent certains, chez nous, pour tirer à feu nourri sur notre secteur public et nos choix clairs, inscrits dans la proclamation du 1er Novembre qui parle bien d'un État «social», c'est-à-dire non capitaliste ! Ce n'est pas la médecine gratuite qui a détruit la santé en Algérie. Au contraire, c'est elle qui, bien que non inscrite (elle sera officialisée le 1er janvier 1974) a permis, dès l'indépendance, de prévenir tant d'épidémies, d'éradiquer la tuberculose et la poliomyélite. C'est elle qui, de l'AMG communal au CHU, a sauvé des millions d'Algériens, améliorant ostensiblement leurs conditions de vie et rallongeant même leurs années d'existence, les ramenant à des niveaux comparables à ceux des pays développés. Une santé nationale ne peut se développer et atteindre des niveaux convenables que si les principaux intéressés font preuve d'une réelle volonté d'y parvenir. C'est-à-dire des responsables qui croient en elle et militent pour son succès. Mais quand ceux-là choisissent les cliniques étrangères pour de petites affections sans gravité, il y a problème ! 
Il ne s'agit pas de choisir entre le privé et le public. Le secteur privé active aujourd'hui partout et sauve des vies humaines. Il assure à des centaines de millions d'Algériens un service régulier et quotidien en matière de soins, d'actes chirurgicaux, mais aussi d'analyses biologiques, de radiographies, de dépistage et d'imageries aux techniques les plus avancées. Mais cette médecine ne peut remplacer le service public dans les missions de prévention de masse, de traitements lourds des maladies chroniques, de recherche médicale et de formation des futures élites médicales. Le tout privé a mené certains pays à la débâcle et la plus significative est encore là, présente avec le Covid-19. La faillite de ces systèmes de santé réputés infaillibles ne vient pas de la qualité des soins, ni de l'excellence même de l'organisation des hôpitaux et des cliniques. Elle vient simplement de ce que la dénationalisation massive de la santé a privé ces pays des outils de prévention et de réponses immédiates et salutaires aux graves crises sanitaires. L'abandon des politiques sociales hardies au profit des masses populaires a considérablement réduit les budgets des hôpitaux publics, de la prévention et de la recherche. L'option ultralibérale a dévié la médecine hospitalière qui est devenue une médecine de luxe à plusieurs étages, réservée aux riches ou à ceux qui s'assurent à prix fort. 
Au sortir du Covid-19, les peuples s'interrogent et comprennent, enfin, à la lumière de cette longue période de privations, que l'essentiel est souvent occulté. La société de consommation et de loisirs à quatre sous qu'on leur offrait masquait leur pitoyable existence réelle dans un monde fait pour les riches et les puissants. En revenant à l'essentiel, à la vraie vie, comme diraient certains, les peuples ont ressenti tout le poids des injustices et des oppressions. Alors, ils se révoltent. Mais attention, c'est peut-être une révolution.
Cette révolution se nourrit certes d'iniquités raciales et de violences urbaines mais son fondement est une lutte de classes nouvelle qui revivifie les peuples pris dans le tourbillon de la mondialisation et ses effets pervers. Les slogans périmés des républiques trahies tombent de leurs piédestaux, comme les statues de ces faux héros mais vrais racistes génocidaires. Derrière les motivations justifiant ces soulèvements — meurtres abjects de George Floyd et d'Adama Traoré par des policiers et gendarmes —, se cache l'immense volcan couvant à l'intérieur de ces  sociétés brisées, déstructurées, vivant l'enfer de la privation et de l'exploitation à l'ombre des gratte-ciel de l'opulence. Il y a certainement, là, les germes de véritables guerres civiles qui incubent imperceptiblement et qui, un jour, n'opposeront plus les racistes aux non-racistes ou les Tchétchènes et Maghrébins aux forces de l'ordre, mais tout le peuple d'en bas aux nouveaux seigneurs, riches possédants, pouvoir politique complice et élites cathodiques serviles lâchées comme des chiens sur la populace  !
Et pour revenir aux hôpitaux, je dois dire que j'en ai vraiment marre d'entendre et de lire des comparaisons idiotes, improductives et insultantes pour mon pays, sur les soins en Algérie et en
France ! Si nous sommes prêts à payer 50 millions anciens par jour dans un hôpital algérois privé, super-équipé et luxueux, soyez certains que nous aurons droit à la même qualité de soins qu'à Paris. Parce qu'il y aura les meilleurs professeurs étrangers et nationaux, les infirmières les plus compétentes et un service impeccable. Mais séjourner dans un hôpital durant des semaines, avec toute la panoplie d'analyses, de radiologie, de scanner et d'IRM, se faire traiter, y subir des actes chirurgicaux parfois délicats et sortir allégrement sans payer UN SOU, c'est tout à fait autre chose. Cet hôpital gratuit qui, malgré tout, fait son boulot convenablement, sans faillir à sa mission première, ne peut être comparé aux performances d'un établissement de Genève ou de  Londres qui ne soigne que pour l'argent ! Cet hôpital fut édifié par les patriotes de l'indépendance avec l'esprit révolutionnaire et la volonté de vaincre la maladie qui tuait, chaque année, des centaines de milliers d'Algériens sans soins, livrés à l'indigence et aux épidémies, affamés, mal logés, mal nourris... 
Nous aussi, nous rêvons d'hôpitaux algérois, oranais ou constantinois performants, aux normes de Montréal ou de Londres. Au moins, beaucoup d'Algériens n'auront plus besoin de se déplacer en Europe. Pour leur dignité ! Pour la nôtre, bafouée de long en large par le Président sortant qui n'a pas trouvé mieux, pour se soigner, que l'hôpital des armées de l'ancienne puissance coloniale ! Nous sommes à l'aise pour le dire aujourd'hui parce que nous l'avons hurlé et de la manière la plus forte le jour même où il était dans cet établissement. Et dans ces mêmes colonnes de ce même journal libre.
M. F.

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